mercredi 6 février 2019

Sault-au-Galant d'Isabelle Grégoire

Sault-au-Galant  Isabelle Grégoire  Collection Littérature d'Amérique  Québec Amérique  224 pages


Résumé:
Émilio Mondragon, fils de réfugiés colombiens installés dans un petit village de la campagne québécoise a disparu.  Cette disparition devient le révélateur des tensions qui couvent depuis l'arrivée du groupe de colombiens.  Si en apparence, leur intégration se passe bien, beaucoup de frustrations, de colères et de secrets couvent sous la surface.  Entre les nouveaux arrivants et les vieux habitants du village, il y aura des déchirements, des alliances et des révélations.

Mon avis:
Ce livre a frôlé le coup de coeur!  Et au final, non, mais pour des raisons bien précises.  La construction du texte m'a tout de suite plu au départ.  Cette histoire de réfugiés, débarquant dans un petit village tranquille comme il y en a tant dans les campagnes du Québec est racontée du point de vue de plusieurs personnages, tant du côté des colombiens que des québécois.  Sauf que.  Là où il aurait été fascinant de sauter de personnage en personnage pour raconter toute l'histoire, l'auteure s'est limitée à quatre seulement et c'est dommage.  J'aurais aimé voir un bout de l'histoire racontée par Gabriela, par Caroline, par Mme Tousignant, par Robert le garagiste, par Cristobal, par Maxime Thivierge...  Tous ces personnages ont un rôle à jouer dans l'histoire et on ne voit pas leur point de vue.  On se contente de revenir toujours aux même quatre personnages, mais passé leur premier passage comme narrateur, leur récit perd un peu de sa pertinence et le texte, au lieu de s'envoler, reste au même niveau.

Par contre, au point de vue des idées, le roman est riche à foison et explore bien le rapport complexe entre les résidents et les nouveaux arrivants.  Les préjugés des uns et les difficultés des autres mènent à un mélange explosif, d'autant plus que le drame se joue sur un fond d'intimidation et d'adultère.  L'auteure a choisi de mettre en scène des réfugiés colombiens et non musulmans ou asiatiques et c'est un choix très pertinent: ils ont la même religion, tout le monde fréquente l'église du village, mais même cette proximité ne suffit pas à réduire la différence vécue entre les deux groupes.

Les raisons de la venue des colombiens au village est purement économique et le livre explore bien les répercussions de ce fait très simple: le village a besoin de ces nouveaux arrivants, mais en même temps...  Le seul truc qui m'a causé un peu de problèmes à ce niveau est le personnage de Louis Therrien.  Comme si contrairement à d'autres personnages, celui-ci, un homme d'affaire, était le moins maîtrisé de tous dans sa composante professionnelle.  Beaucoup de passages le concernant semblait avoir été pris ailleurs et non pas dans du vécu comme pour les trois autres personnages.

Même si j'ai trouvé qu'il avait manqué une occasion en or de s'élever encore plus haut, ça reste un excellent roman avec une thématique brûlante très bien racontée et une plume souple et agile.

Ma note: 4.5/5

2 commentaires:

Jean-François a dit…

Ce problème en région est malheureusement fréquent et pas juste avec des immigrants. Je connais sans trop réfléchir au moins 3 histoires de gens de la ville partant à la campagne pour racheter ou partir une entreprise car c'est un manque criant dans ce village ou cette région et devoir fermer quelques années plus tard parce que la clientèle ne vient pas... "il est pas du coin", "Il engage pas de gens du coin", "C'était meilleur avant..". C'est triste mais même pas besoin d'être un immigrant pour être écarté en région.

Je dit pas que c'est toujours commande ça ni envers tout le monde, mais j'ai trois histoires en tête et si je creusais un peu j'en trouverais d'autre aisément.

Prospéryne a dit…

Ce n'était pas le thème du roman, mais en effet, souvent les gens qui sont habitués de vivre dans de petites communautés où tout le monde connaît tout le monde peuvent réagir assez mal aux «transplantations». Ce n'est pas toujours le cas (voir le village de St-Ubalde qui a accueilli une famille de réfugiés syriens tout le monde ensemble!), mais ça existe, c'est sûr.