lundi 27 février 2023

Noter ou ne pas noter, telle est la question

 Salut!

Depuis quelque temps, je vois une tendance se dessiner: on ne note plus les critiques. Plus de séries d'étoiles après une critique de spectacle, de film, d'albums ou encore plus important en ce qui me concerne, de livre. La décision de Lettres québécoises à ce sujet et plus particulièrement l'entrevue qu'avait donné Mélikah Abdelmoumen à la défunte émission Plus on est de fous, plus on lit (que je m'ennuie de cette émission!) m'ont fait beaucoup réfléchir.

Parce qu'après tout, une note, qu'est-ce que ça représente?

Et bien, c'est une façon un peu simpliste de résumer notre opinion sur un livre lorsque l'on en parle. Il y a maintenant fort longtemps, on m'avait demandé ce que disait mon système de note interne au blogue. J'avais pondu ce billet, qui date maintenant de dix ans... Mais un des points que je soulève dans ce billet est très important: la critique reste profondément subjective. 

Et une note? Ishh! Encore plus! J'ai plusieurs fois jonglé avec la note que j'allais accorder à un livre parce que, bien honnêtement, j'étais embêtée. J'ai toujours fait au mieux, mais il y a des fois où je revois une critique que j'ai faite et que je me demande pourquoi au juste j'ai donné cette note. Pas toujours, fort heureusement. Mais parfois.

Mais pas dans le texte de mes critiques. Parce que trois chiffres séparés par une virgule ne peuvent remplacer une argumentation où l'on soulève les points forts, souligne les faiblesses, nuance un détail, explique un effet, gratte un peu plus loin que la surface. Même dans mes critiques les moins réussies, j'ai toujours essayé de rendre mon opinion sur un livre de façon claire et argumentée. J'en suis d'ailleurs très fière, parce que le faire de manière constante au cours des 13 dernières années a été un sacré défi, mais un défi que je suis fière d'avoir relevé, un livre à la fois.

Un autre problème que j'ai toujours eu personnellement avec les critiques notées, un défaut que j'ai d'ailleurs moi-même, c'est la manie qu'ont plusieurs à sauter le texte et à se jeter sur la note finale. Qui ne représente qu'une microscopique partie du boulot que je mets sur cette partie de mon activité de blogueuse. Ah, Prospéryne a mis 4.25 sur 5 à ce livre... et passe à côté du texte que j'ai passé une bonne heure, souvent plus, à peaufiner, à relire, à réfléchir, à retravailler. Pour être sûre et certaine que ce que j'y avais écrit représentait mon exacte pensée sur ce livre. Du boulot que je disais. Alors la pensée que tout le monde saute pour aller regarder la note que j'ai souvent décidée en tout dernier... Mouais, ce n'est peut-être pas une pensée si agréable au fond.

Depuis le début de 2023, je me suis demandé quelle serait la réaction si je ne notais pas mes critiques. J'ai donc publié mes deux premières critiques de l'année sans note. La réponse? Un bruit de criquets. Personne ne semble avoir remarqué ou du moins, ne s'est donné la peine de le souligner. Certes, je n'ai publié que deux critiques (d'autres s'en viennent, promis!), mais ça m'a quand même donné une petite idée: les gens s'habituent à ne pas voir des notes et ceux qui s'intéressent à mon avis savent qu'il vaut mieux lire que de sauter à la fin. Une façon aussi de motiver mes lecteurices à prendre le temps de s'intéresser à ce qui me prend le plus d'énergie.

Alors voilà, plus de notes sur ce blogue. La seule chose que je vais garder qui ressemble à une note, c'est la mention coup de coeur, parce que ça, c'est toujours utile! ;)


@+ Mariane

jeudi 16 février 2023

Crépuscules, Collectif

 Crépuscules  Collectif  Les Six brumes 235 pages


Résumé:

Recueil de nouvelles sur les genres de l'imaginaire, science-fiction, fantasy, horreur, pour les 20 ans de la maison d'édition Les Six brumes et réunissant des auteurices marquants qui ont publié chez eux.

Mon avis:

Diversité est un mot clé de ce recueil, qui va dans les registres de la fantasy, de l'horreur, de la science-fiction et même dans celui des histoires de bûcherons! Un joyeux mélange qui met en scène de très belles plumes. Détail remarquable, le niveau est relativement égal entre les nouvelles du recueil: pas de nouvelles qui se démarquent particulièrement par leur qualité supérieure ou inférieure à la moyenne. La différence est dans les histoires racontées, dans les styles et dans les thèmes abordés, ce qui est très agréable.

Et côté thème, on va dans tous les registres, de l'horreur plus psychologique au fantastique à la Maupassant, de la fantasy classique, à la science-fiction policière. La nouvelle qui introduit le recueil, Du sang sur  le mackinaw de Luc Dagenais donne le ton de ce mélange des genres avec une nouvelle mélangeant l'univers des camps de bûcherons, une enquête sur un meurtre et des amours gais, rédigé dans un registre que n'aurait pas renié Honoré Beaugrand. C'est l'une des nouvelles que j'ai préférée dans le recueil.

Mes autres coups de coeur sont les nouvelles de Pierre-Luc Lafrance, qui avec Retrouvailles, signe une nouvelle qui met en scène deux anciens camarades de classe se croisant à la veille de leurs retrouvailles du secondaire. Une rencontre qui finit par revenir sur les événements arrivés dix ans plus tôt, avec une note fantastique qui se glisse dans le récit au fil de celui-ci, par gouttes. La nouvelle d'Ariane Gélinas, Quatre fois l'île, qui mêle univers nordique, fées et volonté de la nature s'inscrit dans la lignée de ses autres textes. L'érotisme y tient bien sûr une part importante, mais aussi le bizarre et l'étrange s'y glissent. La dernière nouvelle, Crépuscules de Frédéric Durand, est sans doute la plus étonnante et la plus efficace du recueil parce qu'elle met en scène une lectrice lisant le recueil et par un effet de miroir et de mise en abîme, joue avec les perceptions du lecteur sur sa lecture.

En fait, le seul reproche concernant ce recueil est l'ordre dans lequel les nouvelles ont été placées, celles contenant un contenu sexuel explicite se retrouvant placé les unes à la suite des autres et les nouvelles d'horreur elles aussi rassemblées à la queue leu leu. Pour le reste, peu de reproche à faire!

Idéal pour découvrir une grande variété de plumes, autant dans les styles que dans les thèmes.

lundi 13 février 2023

Que serait le texte sans son con?

Salut!

Il m'arrive souvent, quand je texte une anecdote à ma meilleure amie de tourner un peu les coins ronds de l'histoire pour avoir à en écrire moins. Que voulez-vous, je déteste taper sur un clavier de cellulaire! Il arrive souvent qu'elle me réponde d'un retentissant CONTEXTE? parce qu'elle ne comprend rien à mes histoires... Parce que oui, le contexte fournit souvent des éléments qui changent complètement le sens d'un mot, d'une phrase ou d'une réaction.

Est-ce que cela vous est déjà arrivé de regarder la scène d'action finale d'un film d'action sans savoir qui étaient les protagonistes et qui étaient les antagonistes? Moi si. Dans la scène finale, tout le monde se tirait joyeusement dessus et c'était... très confondant. Est-ce que c'est bien que personnage x se fasse tuer, est-ce que personnage y réussi un bon coup ou est-ce qu'elle vient de mettre les héros dans le pétrin? Aucune idée! Quelques minutes plus tard, dans la scène finale, j'ai fini par comprendre qui était qui et ça a été agréable de comprendre. Parce que finalement, ça donnait du sens à la fusillade!

Mon exemple était dans un contexte très précis, mais on peut élargir aussi au contexte plus large. Si on lit le Seigneur des anneaux sans avoir lu Bilbo le Hobbit, on ne pourra pas comprendre pourquoi Bilbo passe autant pour un original aux yeux de ses pairs tout simplement parce qu'on ne connaît pas le personnage avant ses aventures! Qu'il soit un excentrique semble normal, alors qu'avant sa grande aventure aux côtés de Thorin et ses douze compagnons nains, Bilbo était le modèle du hobbit pantouflard et bien ancré dans ses habitudes, surtout concernant les plaisirs de la table. De même, on ne saura rien de la réelle puissance de Gandalf. Et encore, je ne parle pas de toutes les découvertes que l'on peut faire à son sujet en lisant Les Contes et légendes inachevées ou le Silmarillion, tant directe , comme la façon dont il est arrivé en Terre du Milieu et indirecte, comme ses origines et son statut d'Istari.

Donc, un lecteur qui ouvre le Seigneur des Anneaux sans connaître l'univers élargi pourra apprécier une excellente histoire. Mais le lecteur qui connaît le contexte pourra quant à lui voir les allusions, comprendre les réactions, saisir les enjeux plus profonds, bref, il aura une connaissance plus approfondie du récit. Ce qui est, bien souvent, la marque des fans d'une oeuvre est justement de connaître ce contexte, de voir les liens, petits et grands et de s'en délecter, d'en débattre. Dépassé un certain point par contre, on peut en devenir fou au point d'en rabattre les oreilles à tout le monde et de devenir tatillon sur le moindre détail.

Mais que ce soit pour une petite oeuvre ou une grande, le contexte reste important. Aucun personnage ne peut agir dans le vide et même encore là, le vide peut-être porteur d'un contexte. Comment le personnage est-il arrivé là, d'où il part, quel était son but en arrivant là, était-il en fuite, en mission, est-il tombé dans un piège, est-il en train de se cacher, prépare-t-il un coup? Ce sont tous ces éléments qui doivent être là pour que les actions d'un personnage prennent du sens. 

Le con de contexte ne rend pas le texte plus stupide, mais plus intelligent. D'ailleurs, les racines latines du mot le relient aux sens d'assemblage, réunion, enchaînement. On ajoute au texte, on ajoute à l'histoire. 

Bref, on ajoute du contexte!

@+ Mariane