vendredi 26 septembre 2014

Fragments d'un instant: Safari

En voiture, je parcours une rue plutôt locale d'une petite ville.  Je ne roule pas trop vite, je fais juste un mini-détour.  Quand soudain, je les vois.  L'un face à l'autre.  En fait, j'ai vu l'un avant l'autre, mais quand je les aies vus, je me suis arrêtée.  En pleine rue.  Un duel avait lieu juste sous mon nez.

(Pour vous mettre dans l'ambiance, mettez ceci en trame sonore)

Deux écureuils se dressent devant moi, queues relevées, droite comme des I.  Ils sont à moins d'un mètre devant moi, l'un d'entre eux en pleine rue, l'autre à quelques centimètres d'une voiture.  Ils sont immobiles, comme seuls peuvent l'être des écureuils ou des chats, d'une immobilité pleine de nervosité, dont ils peuvent sortir en un éclair.  

Les deux se toisent d'un regard mauvais.  Seules leurs queues raconte leur nervosité, agités de brefs mouvements ondulants de la gauche vers la droite.  L'atmosphère est électrisante.  Qui gagnera?  Droite ou Gauche?  Pour moi, ils sont pareils!  Je les observe, fascinée par la tension entre ces deux petites boules de nerfs.

Je vois du mouvement dans mon rétroviseur.  Zut, une voiture arrive!  Je donne un mini coup de pédale et Droite et Gauche dégagent à la vitesse de Scratch à la poursuite de sa noix.  Je ne saurais pas la conclusion du duel.  Dommage, mais bon, il faut bien que je retourne bosser moi!

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Duchesse attend sur le bord de la rue, en fait, un large boulevard très passant.  Je n'ose l'approcher, elle n'est qu'à quelques pas de moi.  Elle fait semblant de m'ignorer avec superbe, mais je me doute bien qu'elle surveille le moindre geste que je pourrais faire.  Donc, d'une oreille, elle s'assure que je ne m'approche pas, mais le reste de son attention est attirée par les deux côtés de la route où les véhicules circulent à vive allure.  Je ne bouge pas, mais je l'observe: c'est une magnifique chatte grise, de gouttière de toute évidence, grise et tigrée, mais vraiment très très belle, avec la noblesse naturelle de son espèce, doublée d'une sorte d'arrogance tranquille.  

Je ne bouge pas parce que je ne veux pas qu'elle traverse la rue en se sauvant de moi.  Pourtant, je n'ai pas trop à m'en faire: Duchesse est intelligente.  Elle surveille attentivement une trouée dans la circulation qui passe sous son nez.  Dès que celle-ci s'ouvre devant elle, Duchesse s'avance sur la chaussée d'un pas conquérant.  Elle traverse la rue comme un mannequin traverse le podium d'un défilé: d'un pas sûr, comme si le monde entier la regardait, rapidement, mais en faisant durer le moment.  Comme si, à cet instant précis, le monde tournait autour d'elle .  Elle a la queue bien dressée, la tête haute et semble me dire que je suis folle de penser qu'elle pourrait prendre des risques en traversant la rue.  Quoi, elle?  Elle est bien trop intelligente pour ça voyons!

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Une volée d'oiseaux, les abords d'une voie rapide: mauvais mélange.  Je vois la volée s'approcher bien trop vite du lourd camion qui me précède.  Une belle volée d'oiseaux blancs dont j'ignore l'espèce.  L'un des oiseaux est trop bas, oh non, il est trop bas, il va percuter le camion!!!  À la dernière seconde, le volatile repli ses ailes et fait un superbe tourné-roulé digne d'un acrobate du Cirque du Soleil évitant ainsi la collision avant de rouvrir ses ailes et de rejoindre le reste de la volée en quelques battements.  Fiou, je lâche un soupir.  À 100 kilomètres/heure, un tel impact lui aurait été fatal.  Visiblement, il a l'air d'avoir l'habitude d'éviter les camions.  Et surtout l'intelligence.  Qui parlait de cervelle d'oiseau déjà?

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Je passe devant un parc, courant le long d'une rue très fréquentée de la métropole.  Petit regard vers la droite en attendant que le feu passe au vert.  Je remarquer tout d'abord un amoncellement de plumes et de poils, puis comprend: les pigeons et les écureuils sont en phase régal!  C'est une véritable mêlée de gris et de beige, ponctuées des bonds et des petits vols autour du festin.  Tout près, assis sur un banc, un homme réduit en miettes un pain complet.  Morceau par morceau, les volatiles et les mammifères se jettent dessus, faisant disparaître le moindre petit bout de pain.  C'est bizarre de voir se côtoyer de si près ces animaux qui souvent ne laissent personne les approcher, s'enfuyant au premier signe de menace.  Là, ils sont tout près les uns des autres, se frôlant dans leur gloutonnerie, presque confiant, insouciant.  La faim fait-elle à ce point disparaître les peurs et les frontières entre les espèces?  Ou ne serait-ce que le fruit de la gourmandise?  Peu importe, c'est un spectacle rare.  La lumière change, je m'éloigne de la scène.  Je ne pense pas la revoir un jour.

@+ Mariane

2 commentaires:

Gaby a dit…

Merci pour ces petits moments Safari :)
Un petit moment de pur bonheur animalier fini bien ma journée :)

Prospéryne a dit…

Mais de rien Gaby! :)