Salut!
Jeune adolescente, ma mère m'avait strictement interdit de lire des romans Harlequin. (Avec évidement l'effet contraire que j'en aie lu des tas en cachette!) Elle ne voulait pas que je forge ma vision de l'amour à travers le miroir déformé de ces romans à l'eau de rose où les héros débarquent friqués et beaux à mourir et où les héroïnes sont systématiquement de jeunes filles en fleurs prêtes à cueillir. J'ai lu ailleurs que les livres pornos pour femmes sont ces romans d'amour parce que c'est dans la valse émotionnelle où l'homme dit oui, oui et les pourchasse de leurs avances que les femmes prennent leur pied. De voir un homme à leurs pieds quoi! Je peux parfaitement comprendre la préoccupation maternelle concernant ces bouquins étant donné que ça aurait été me bercer d'illusions: je n'ai toujours pas rencontré de millionnaire près à se jeter à mes pieds pour mes beaux yeux!
N'empêche, je trouve encore aujourd'hui que l'interdiction totale n'est pas la meilleure des préventions. Dire que c'est un conte de fée et aborder le genre avec réalisme me paraît davantage raisonnable. Ce qui me fascine par contre, c'est qu'il est parfaitement vrai que l'on forge une partie de notre vision du monde dans les livres. Un lecteur assidu de Nietzsche ne sera sans doute pas la personne la plus positive en ce bas-monde par exemple! Le lecteur d'essais géo-politique remettra plus facilement en cause les nouvelles annoncées au Télé-journal car il ira plus loin que les faits exposés. Et il sera plus critique. La variété des expériences humaines exposées dans les romans permet de se frotter à un large éventail d'expériences que l'on ne pourrait pas nécessairement vivre par nous-même. Et de prendre de bonnes notes mentales pour acquérir de l'expérience pour nous-même.
Certes, les livres ne règlent pas tout. Grâce à la littérature, on peut appréhender un monde qu'on aurait pas eu la chance de voir soi-même, mais lire des romans Harlequin ne changera pas le monde non-plus! Il y a une petite limite quand même. D'autant plus que de lire des livres genre Twilight donne une expérience relativement limitée du monde... en plus d'être totalement irréaliste! La littérature apporte son eau au moulin, tout comme le cinéma, la télévision, la publicité, mais surtout et plus important encore, les pairs qui par leurs opinions, leurs actions ont une énorme influence sur nous. Les livres sont une pièce d'un puzzle, pas l'image finale elle-même. Et tout est en constante évolution, qui dit que nos préférences littéraires d'un moment influenceront toute notre vie?
N'empêche, si j'ai une fille un jour et que je la prends en train de lire les Harlequin, je vais sans doute l'emmener à la bibliothèque pour que ses choix ne se limitent pas à ça! ;)
@+ Mariane
4 commentaires:
Personnellement, ma première vision de la femme idéale, je l'ai constituée à partir du personnage Arialde Henke (de F. Pelletier) quand j'étais enfant: une femme dynamique, intelligente, instruite, écologiquement engagée, avec un sacré caractère et jolie par-dessus le marché... au point que j'en étais secrètement amoureux (j'avais 9 ans, pardonnez-moi !)
Beaucoup de ces éléments sont encore dans ma définition d'une femme intéressante.
Je me souviens aussi qu'au secondaire, j'avais lu un Harlequin en espérant y trouver des trucs de séduction... mais bon, quand on est pas millionnaire et baron, ça ne marche pas. :P
Je pense que si les parents doivent effectivement garder un oeil sur les lectures de leurs enfants, l'interdiction n'est généralement pas une solution, sauf dans le cas d'ouvrages propagandistes quand ils sont lu par des jeunes encore influençables... et encore ! Il y a moyen, comme parent, de faire un retour sur la lecture et de s'en servir pour éveiller l'esprit critique.
La lecture contribue, certes, à constituer sa vision du monde, des gens et des relations sociales... comme de nombreux autres médias. La télé, le web, les journaux, les pairs, les figures d'autorité... une personne aura un esprit sain si elle s'alimente à toutes ces sources, prends le temps de les explorer mentalement et les utilise finalement pour accepter ou rejeter une idée, élaborant petit à petit son soi intellectuel et social.
Pour citer notre Prospéryne: "Les livres sont une pièce d'un puzzle, pas l'image finale elle-même".
@Sébas, «une personne aura un esprit sain si elle s'alimente à toutes ces sources, prends le temps de les explorer mentalement et les utilise finalement pour accepter ou rejeter une idée, élaborant petit à petit son soi intellectuel et social. » Parfaitement d'accord! Seulement, développer l'esprit critique demande du temps et aussi d'accepter en tant qu'autorité d'être remis en question. Et c'est pas tout le mond euqi peut l'accepter.
L'interdit est le meilleure des incitatifs! :-)
Notre vision du monde se forge à partir de certaines lectures, mais les écrits eux-mêmes sont faits aussi à partir de certaines visions du monde. C'est comme un cercle en fait!
Ce qui est important c'est la diversité des lectures, l'esprit critique aussi. Et cet esprit on le forge tout au long de notre vie avec des lectures variées mais aussi via nos expériences. Mais ceci n'est jamais facile et ce n'est jamais un chemin court et tranquille
@Alice, si se forger une vision du monde était facile et tranquille, ça ne serait jamais aussi intéressant! (et tu as raison, l'interdit est le meilleur des incitatifs!)
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