lundi 18 juin 2012

Michel David et les romans du terroir

Salut!

Petite constatation personnelle: j'aime beaucoup les romans du terroir.  Oui, oui, je le dis et je suis sincère, j'ai beaucoup aimé ces romans que bien souvent les gens ne connaissent que parce qu'on les a obligé à se les farcir lors de leurs odieuses études secondaires.  Quand on les aborde sans la moindre contrainte, quand on est libre de les apprécier, c'est sûr que c'est tout autre chose.  La première différence, c'est qu'on va les juger pour eux-mêmes avant tout.  Et alors, on est mieux à même d'apprécier la poésie de leur écriture et la saveur des expressions utilisées.  Parce que la littérature d'une époque est aussi le reflet d'une langue.  Donc, entendons-nous, j'aime bien lire des histoires se passant au début du XXe siècle, parlant de gens vivant sur leurs terres, de leurs histoires de famille, de ce genre de choses.  Alors pourquoi est-ce que je n'aime pas Michel David?

Grande question non?  Parce qu'après tout, où est la différence?  Les thèmes sont les mêmes, on se concentre sur des histoire prenant place ou dans des petits villages ou en ville dans les milieux ouvriers, on parle d'histoires de familles, de la vie quotidienne.  Du travail de la ferme ou de l'usine, de la condition des femmes, des relations de couple.  On parle des mêmes choses et pourtant... non.  La grand différence est celle-ci: écrire un texte à l'époque et écrire un texte sur l'époque.  Détail insignifiant de prime abord et qui a pourtant son importance.

Les auteurs des romans du terroir ont connu le milieu duquel ils parlent.  J'avais lu Un homme et son péché il y a quelques années et j'avais eu la chance de tomber sur une dédicace de l'auteur (dans un livre de bibliothèque, faut le faire!).  Il y disait: «Ceci est une histoire vécue.»  De qui?  De Donalda?  De Séraphin?  Je ne sais pas.  Reste qu'il a écrit sur des personnages et dans un contexte qu'il a connu lui-même.  Tout comme Germaine Guèvremont, Ringuet et combien d'autres qui ont écrit des histoires parlant de ce qu'ils connaissaient, de leur Québec rural et paysan.  Certes, le fait de raconter une histoire les obligeait à imaginer, à recréer un univers, à l'enjoliver, à le brodeur et à l'améliorer, mais à la base, ils savaient de quoi ils parlaient.  Leurs romans ne sont d'ailleurs pas des romans historiques au sens moderne du terme, ce sont des livres qui parlent de leur réalité.  Ils racontent donc des histoires parlant des préoccupations de leur temps.

En un sens, Michel David a fait la même chose.  Il a écrit des livres parlant d'une autre époque, mais la résonance n'est pas la même parce qu'il part de préoccupations bien de notre temps pour parler d'une autre époque.  On le voit juste à la quatrième de couverture.  Des histoires de villages certes, mais l'importance accordée à la vie intime des couples est beaucoup plus importante que dans les romans de terroir même.  Les sentiments y sont plus plus exprimés, étalés, analysés et certaines situations qui auraient pu être acceptables pour l'époque y sont dénoncées.  Comme dans les romans modernes.  Les curés n'y sont pas des anges gardiens des âmes des ouailles des villageois.  Comme on les voit aujourd'hui et non à l'époque.  La vie rurale y est montrée avec sa dureté, mais sans ce vernis épais apporté par les romans du terroir qui faisait de la vie sur la terre la plus belle vie du monde.   Elle n'est pas autant mise en opposition à celle de la ville, aujourd'hui si encensée dans la littérature.  Les deux types de romans utilisent donc les mêmes thèmes, mais de façon très différente.

Alors, lequel on lit?  Pour moi, le choix est vite fait, mais je respecte les goûts des autres par contre! ;)

@+ Prospéryne

3 commentaires:

Gen a dit…

Tu mets le doigt sur le danger lorsqu'on écrit des romans historiques : montrer l'histoire telle qu'on la comprend à présent et non telle que les gens la vivaient.

Je crois que c'est encore plus dangereux quand on travaille avec une époque récente, parce que les témoignages de l'époque sont encore accessibles et lisibles.

Prospéryne a dit…

@Gen, comme disait un de mes profs d'histoire à l'université: le plus grand danger en histoire, c'est de juger les gens et les événements avec un oeil moderne, alors que les gens de l'époque avait une vision totalement différente de la nôtre.

Gen a dit…

Ouaip! Et c'est encore plus dangereux quand on passe de la dissertation au roman je pense!