lundi 8 juin 2020

Le futur vers le passé

Salut!

En 1999, quand je me suis assise au cinéma en compagnie d'un de mes amis mordu-à-un-point-extrême pour regarder l'épisode 1 de Star Wars, qui était aussi le 4e film sorti chronologiquement dans une galaxie lointaine, très lointaine, la mode n'était pas encore très forte de reculer dans le temps pour aller explorer le passé des événements.  Certes Tolkien avait écrit plusieurs tomes des Contes et légendes inachevées, mais la mode de l'antépisode n'était pas si forte.  Seulement, voilà, depuis que la trilogie de Georges Lucas a été dévoilée, on dirait que les créateurs ont découvert une mine d'or inexplorée.

À vraie dire, il y a quelque chose de normal là-dedans, surtout pour les univers issus de l'imaginaire.  Ils ont dans leur ADN la création d'un arrière-monde qui prend racine dans le passé.  Parce que construire un arrière-monde signifie construire l'histoire de cet arrière-monde.  D'où vient la structure politique, d'où vient la culture, d'où vient la société, l'architecture, l'art, les conceptions du monde, comment toutes ces choses qui existent aujourd'hui ont été conçues, sont arrivées?  Pour que le monde qui se déploie devant nous soit cohérent, c'est d'une absolue nécessité.  Il faut le savoir ou, si on ne le sait pas, l'auteur(e) lui(elle) doit le savoir.  Donc, souvent l'histoire que l'on nous raconte s'appuie sur des événements qui sont déjà arrivés et qui ont un impact fort sur le présent.

Dans ma jeunesse, quand on allait voir un film, si on allait voir un autre film dans le même univers, on allait voir la suite.  Donc, en toute logique, on progressait dans le temps (à la notable exception de la série Retour vers le futur qui exploitait joyeusement l'idée de va et vient dans le temps).  Maintenant?  Ishh...  Star Wars a lancé la mode, mais les Animaux fantastiques sont situés bien avant Harry Potter, on a étiré Bilbo le hobbit sur trois films de trois heures (alors que ce n'est qu'un prélude au Seigneur des anneaux), on a fait un reboot de Star Trek pour lequel (tousse) on a réécrit l'histoire des personnages... bref, on avance pas.  On revient sur nos pas, on revit la même histoire, on recule dans le temps, on reraconte le passé...  Mais pourquoi?

Bon, ok, une des raisons est facile à comprendre: c'est beaucoup plus facile de retourner sur ses pas et de parler de quelque chose qui s'est déjà passé.  Risque minimum!  On a une bonne idée des événements, mais on ne sait pas le comment et même parfois le pourquoi.  Ou des fois, on pense le savoir, mais la réalité est toute autre chose...  Ça devient intéressant de connaître la vraie histoire, avec ses zones d'ombres.  De revivre les mêmes moments aussi.  De comprendre.  On rejoue la même histoire qu'on a adoré.  Encore.  Et encore.  Et encore.  On reste ainsi dans le connu, le familier, le rassurant.  En fait, on dirait que les adultes sont devenus comme les enfants: ils veulent revoir la même histoire, encore et encore, comme des gamins qui mettraient la Reine des neiges sur repeat en changeant légèrement le décor et les acteurs.

Mais c'est aussi saprément emmerdant à la longue.  Et en parallèle, ça en dit beaucoup vers nos sociétés actuelles.  De un, on ne prend plus de risques en créant de nouveaux contenus.  Pourquoi créer du nouveau quand on peut réutiliser des histoires qui ont déjà marché et carburer sur ce succès? De deux, on n'avance pas, on revient toujours en arrière.  Comme si on avait trop peur de l'avenir...

On dirait qu'on revient à la Renaissance où l'une des grandes idées étaient de retrouver la grandeur de l'Antiquité.  C'est fou.  On ne revient jamais en arrière pourtant.  Le passé peut être intéressant à explorer quand il éclaire le présent, mais le revivre n'est pas quelque chose de possible et j'ajouterais, de souhaitable.  Reculer a du sens quand c'est pour mieux avancer, pas quand ça devient une valeur en soi.

@+ Mariane

2 commentaires:

Gen a dit…

Comment ai-je pu manquer cet excellent billet!!!

Ok, j'adore!!!

Cela dit, tu pointes toi-même une partie de la réponse : on a toujours plus ou moins fait ça. Les gens de l'Antiquité rallongeaient l'Illyade et l'Odyssée, ceux du Moyen Âge faisaient vivre de nombreuses aventures aux personnages de la Commedia Dell'Arte, ceux de la Renaissance réécrivaient la mythologie, y'a eu 28 adaptations des Trois Mousquetaires au cinéma... et là on refait indéfiniment Star Trek, Star Wars pis des films de super héros. Un moment donné, on va passer à autre chose.

Maintenant, pourquoi on fait ça? Là aussi t'as la réponse : peur du risque, surtout au prix que les productions cinématographiques coûtent. Conscience aigue, aussi, que tout a été écrit et que c'est dur de se renouveler. Mais ça va finir par arriver.

... ptêt que c'est toi qui va écrire le prochain univers dont les générations suivantes finiront par s'écoeurer! ;)

Prospéryne a dit…

J'aimerais bien! :D Mais tu peux le faire toi aussi! ;)