lundi 25 novembre 2019

Ce n'est pas nécessaire de tout dire

Salut!

L'autre jour, un ami me décrivait une scène d'une série télé que je n'avais pas vue.  Et là, il me dit:

-Et tel personnage prend une décision importante et ça a tel effet.

-Ok, mais comment elle l'a pris.

-Ben euh.

Il y avait un regard perdu qui accompagnait cette déclaration.

-Ben on le voit pas vraiment.

-Mais comment tu sais qu'elle prend cette décision?

Un autre regard perdu m'a renseigné sur un point important: il ne le savait vraiment pas.  Plus tard, j'ai regardé un extrait de l'épisode en question.  Et en effet, on ne voyait pas LA scène de la prise de décision, mais même sans avoir vu tout l'épisode, je pouvais comprendre que le personnage l'avait prise, pourquoi et à quel moment, sans même l'avoir vu.  Parce que d'autres indices me laissaient voir la décision prise, parce que l'ensemble parlait beaucoup mieux que les détails, cette scène-là n'était pas nécessaire et on pouvait très bien comprendre qu'elle se soit passée sans qu'on la voit.

Mettre un tel truc en pratique à l'écrit est un autre défi, mais ça reste possible.  Après tout, ça fait des siècles que les écrivains prennent des raccourcis du genre, elle chevaucha toute la nuit et vit à l'aube les portes de la ville ou il passa l'après-midi à faire du ménage et alla se coucher avec un appart impeccable.  (Moi faire ici une inversion des genres?  Mais non voyons...)  Sauf que ça va un peu plus loin.

On a tous lu une scène dans un livre où la décision ou l'action d'un personnage nous apparaissaient clairement même si on n'avait rien vu de celle-ci.  Du genre, l'allié se présente à la scène finale vêtu des mêmes vêtements que l'antagoniste, montrant son changement d'allégeance.   On a pas vu ce retournement, mais on en comprend les conséquences en un claquement de doigt.  Ainsi, on s'économise des pages de verbiage et on entre directement au coeur de l'action.  Les conséquences deviennent plus importantes que les causes, car ce sont celles-ci souvent qui alimentent la suite de l'histoire.

Il faut en savoir assez pour être guidé dans l'intrigue, mais les zones d'ombres, les trous, le lecteur peut apprendre à les combler par lui-même.  C'est un art, un véritable art que d'y arriver.  Si le contexte est familier au lecteur, on peut laisser des trous qu'il comblera facilement.  Pas besoin de décrire en détail le fonctionnement d'une élection dans un pays démocratique pour un contemporain.  Mais le triomphe d'un empereur romain, lui?  Comment on le décrit?  Faire une ellipse est une solution dans ces moments, mais il faut quand même faire sentir l'émotion pour faire passer ce que l'on souhaite.  Pour qu'on en comprenne le sens, il faut que le lecteur comprenne les codes de ce dont on parle.

Et voilà l'important: la mise en contexte.  Si on le connaît, si on connaît les personnages, d'où ils viennent, quelle est leur personnalité, on peut se permettre de sauter des moments de l'intrigue, de ne pas les raconter, mais de sauter directement aux autres éléments.  Parce que l'on peut déduire et comprendre sans tout se faire expliquer.  Prendre le lecteur par la main au début, lui donner tout plein d'information, mais ensuite, être capable de le laisser marcher par lui-même à certains moments.  Cela permet aussi de résumer en une phrase, en un regard, en un geste une situation, une décision ou un retournement.  Je le répète, c'est un art.

Mais quels résultats fabuleux quand on y arrive!

@+ Mariane

2 commentaires:

Gen a dit…

Tu prêches à une convertie là-dessus! (Et ça a pas rapport avec le billet, mais.... OH! Tu lis Monstress! <3 C'est tellement GÉNIAL cette BD!!!)

Prospéryne a dit…

Luc me les avais prêté! Critique du tome 1 à venir, mais j'ai pas eu le temps de lire les tomes 2 et 3... :/ À suivre!