Salut!
Qu'est-ce qui est au fait plus ordinaire qu'une chicane de famille? Qu'est-ce qui est plus ordinaire qu'une femme au foyer, prise dans son quotidien, dans ses petites manies, ses petites faiblesses, mais aussi ses grands états d'âme? Pourtant, sous la plume de Michel Tremblay, une telle femme devient un personnage extraordinaire. Presque une amie d'une certaine façon, tellement on se sent proche d'elle. D'autre autre façon, c'est un personnage de roman, un vrai, un grand. Cette personne, c'est la mère de Michel Tremblay, une femme bien ordinaire si on y pense bien, mais auquel il a su donné un souffle, une amplitude et une aura qui va bien au-delà de ce qu'elle a été comme personne. Ce personnage a toutes les richesses des personnages forts de la littérature: le caractère, la personnalité, la force intérieure, l'éloquence. Pourtant, cette femme a essentiellement vécu dans un petit appartement d'un quartier ouvrier, une vie simple, monotone on pourrait dire. C'est l'auteur qui sait faire de petits événements du quotidien de grands moments de vie.
J'aime ces auteurs qui nous font voir les petits détails de la vie d'une autre façon. J'aime les auteurs qui savent conter le quotidien comme pas un. J'aime ces auteurs qui en nous racontant la vie de l'épicier du coin, nous raconte en même temps tout le quartier. Cet homme qui promène son chien tout les matins, on nous fait découvrir que sous sa timidité se cache un amoureux de la philosophie qui regarde le monde à travers ce qu'il a appris avec Kant, Marx et Platon. Cette femme immigrante, voilée, discrète, que les gens voient en femme soumise, mène son ménage à la baquette, citant pêle-mêle le Coran, sa grand-mère et le président Obama pour asseoir son autorité. Ces personnages, qui sous la plume d'une autre personne ne serait que des figures secondaires, deviennent des acteurs de drame ou de comédie. À quoi tient ce petit miracle?
Je crois que c'est la finesse de l'observation qui permet de faire jaillir l'extraordinaire de l'ordinaire. Une femme marchant dans la rue est banale, sauf si on l'observe attentivement: elle a une démarche qui lui est propre, ses vêtements parlent, tout comme sa coiffure, son allure, son attitude. Et dans ces petits détails, on peut trouver les éléments propres à raconter une histoire. On peut faire de cette femme une personne unique. Et quand une personne devient unique, elle se pare de tous les attributs d'un personnage de roman. Nul n'est plus étrange, divertissant, inquiétant ou drôle qu'un élément dont on se sent proche. Que l'on reconnaît pour l'avoir déjà connu ou vécu.
Je reconnais que les personnages qui sont confrontés à des événements plus grand qu'eux-mêmes sont vraiment intéressant. À travers eux, on peut vivre des aventures que jamais on ne vivra dans la réalité. Que ces aventures se passent dans une contrée imaginaire, dans l'avenir, ou sur notre bonne vieille terre. Se dépasser à travers un personnage, c'est un peu se dépasser soi-même. On n'en sera pourtant jamais aussi proche que l'on peut l'être d'un personnage qui nous rappelle notre mère ou notre grand-père: ceux-là sont du connus et donc, on peut s'y identifier beaucoup plus facilement.
Les auteurs qui puisent dans leur quotidien, dans la vie qui les entourent et dans les petites aventures et mésaventures que l'on vit chaque jour montre une autre facette de nos vies. Là où certains voient ennui, routine et grisaille, ils y remarquent l'étincelle qui transforme tout, qui fait d'un petit déjeuner un événement sortant de l'ordinaire, même s'il a lieu chaque matin. Parce qu'ils habillent tout, de la coiffure, des gestes aux saveurs, aux odeurs et à la lumière d'une douceur et d'une couleur qui nous rend le tout familier et suave. Et qui font de gens ordinaires, de ceux qui ne feront jamais les grands titres et qui ne seront jamais couverts de gloire, des êtres que l'on aime pour ce qu'ils sont, avec leurs forces et leurs faiblesses. Et peut-être justement surtout grâce à leurs faiblesses qui les font passer de l'état de nature... à plus grand au fond, que nature.
@+ Mariane
2 commentaires:
Moi aussi ça me fascine ces auteurs qui arrivent à nous raconter le petit quotidien banal et à le rendre passionnant. Suzanne Myre le fait dans le genre ironique, Alice Munro dans le style tendre et Tremblay dans le style... ben, Tremblay! :) J'aime beaucoup les lire. Comme tu dis, je crois que leur force, c'est leur finesse d'observation.
On apprend beaucoup de choses en regardant les gens. Ensuite. c'est le rôle de notre imagination de combler les petits trous et de patience de savoir mettre tout ça sur le papier. :)
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