lundi 4 novembre 2013

L'âge où on tombe dans la marmite

Salut!

«Les jeunes lisent» me disait une connaissance récemment.  «Au primaire, ils lisent, c'est au secondaire que cela se gâte.  On dirait tout à coup qu'ils s'éloignent des livres, qu'ils ne veulent plus lire.  Certains, parce que c'est à cet âge que d'autres tombent dans la marmite comme Obélix et qu'ils prennent des habitudes de lecture pour le reste de leur vie.»  Mon expérience personnelle me dit que cette personne a loin d'avoir tort: dans les Salons du livre, on voit les yeux des jeunes briller devant les livres, les histoires.  Les files devant les auteurs jeunesse sont souvent longues!  Et pourtant, quand j'y croise des adolescents en sortie scolaire, le désintérêt est manifeste.  Certains passent leur journée assis le long des murs à bavasser plutôt que de visiter les allées toutes proches.  Pourquoi donc?

Certes, au secondaire, on commence à nous faire lire des classiques.  Des livres moins «grand public».  Alors qu'on primaire, c'est le côté ludique, amusant qui domine, au secondaire, souvent, on veut faire lire aux ados de la vraie littérature.  Ouf...  Ok, j'avoue, côté littéraire, Fascination et cie, ce n'est pas du haut de gamme.  N'empêche, de la même façon qu'il faudra apprendre à un néophyte à savourer la musique classique ou un grand cru, apprivoiser la littérature en dehors de ses canons, ça s'apprend.  Une des premières étapes est sans doute de comprendre que la «grande littérature», ce n'est pas écrit en sanskrit et que ça peut autant nous faire tripper que les aventures d'une jeune fille forcée à prendre part à des Jeux du cirque romain version futuriste.

L'autre est de faire en sorte que les ados ne ressentent pas comme une obligation de lire.  Daniel Pennac est sans doute le plus grand pourfendeur de cette philosophie qui dit que l'on doit faire entrer, de gré ou de force, les grands classiques dans la gorge des ados.  Si la réalité auquel il s'attaque est française, la même prévaut ici: en témoigne les luttes incessantes de deux amis profs de français pour faire lire leurs élèves.  L'obligation, surtout à l'adolescence, est source de refus.  On ne veut pas être obligé de faire quelque chose, à moins que ce ne soit par choix personnel.  Ce que dise les profs, l'autorité, on s'en balance.  On croit que c'est plate, juste parce que ça vient d'avant notre génération et que les vieux n'y comprennent rien...  Ouais, on a tous dit ça étant ado!  Le problème no 1, c'est que ce n'est pas vrai.  Le problème no 2, c'est que souvent les ados y croient et que ça leur fait fuir tout ce qui est fait de papier imprimé sauf les revues qui parlent de télé-réalités ou de starlettes.  À l'univers des innombrables histoires des livres, ils préfèrent celles des jeux vidéos (dont les scénarios, je l'avoue, sont souvent de mieux en mieux faits) et celles des obscures salles du septième art qu'est le cinéma, négligeant le fait que de plus en plus de films se basent sur des succès littéraires.  Et que oui, le livre est toujours différent du film!

On perd alors une bonne partie des ados, mais la poignée qui reste?  Ils deviennent des lecteurs compulsifs, bien souvent.  Addicts même dans certains cas!  Des lecteurs qui le reste pour toute leur vie.  L'adolescence est l'âge où l'on tombe dans la marmite, où l'on adopte des habitudes que l'on gardera toute notre vie ou presque.  Croisons les doigts pour que plein d'ados y découvrent les joies de la lecture qu'ils y découvrent CE qui les fera tripper dans les livres pour le reste de leurs vies.  Qui les fera tomber dans la marmite pour le reste de leurs jours.

@+ Mariane

2 commentaires:

Gen a dit…

Je ne comprends effectivement pas pourquoi on s'obstine à faire lire des gros classiques (souvent pénibles même pour nous qui savons les décoder) aux ados. Comme c'est l'âge où ils abandonnent la lecture, c'est le moment où jamais de leur donner du stock hot. Et je parle pas de bouquin américain à succès.

Non, je me souviens de la face d'une classe de secondaire cinq qui lisait "Un dimanche à la piscine à Kigali". Complètement secoués par le bouquin, ils se sont rendus au bout sans faire d'histoire. Et le commentaire qu'ils passaient le plus souvent c'était "Où est-ce que je peux trouver un autre livre aussi frappant?".

Ce qu'il faut aux profs, c'est des bouquins québécois modernes, pas trop longs, des trucs qui décoiffent. Et, surtout, une liste de suggestions pour les profs : vos élèves ont aimé le bouquin A? suggérez-leur B et C et D...

Prospéryne a dit…

@Gen, certains profs y arrivent très bien, mais ce n'est pas le cas de tous. D'autant qu'ado, tous les jeunes ont des goûts très différents...