«C'est une insulte au livre ce truc-là!»
Je regarde la personne à qui je viens de montrer ma liseuse, toute fière. Elle n'est pas la première à réagir comme ça. Je l'ai déjà montré à une demi-douzaine de personnes jusqu'à maintenant et je n'ai eu aucun Wow ou encore aucun ah c'est cool. Ok, c'est la réaction la plus violente que j'ai eu jusqu'à maintenant, mais elle montre parfaitement celle des autres: le numérique, ça ne passe pas. De l'indifférence polie au petit coup d'oeil discret et à peine curieux au gadget, j'ai eu droit à plusieurs réactions différentes. Une bonne façon de voir où en sont les gens par rapport au livre numérique en somme. Je ne suis pas moi-même une fervente du livre numérique, alors là, pas le moins du monde, mais je ne vois pas de raison de ne pas m'y intéresser. Parce qu'une liseuse et un livre numérique, c'est avant tout destiné à être lu, avant tout et surtout.
Je me revois encore au BookCamp Montréal, entourée de geeks, seule à défendre ma vision du livre et me faisant regarder de haut comme si j'étais une passéiste complètement out. Je savais que ce n'était pas le cas. J'en suis toujours convaincue. Le milieu du livre va subir énormément de changements dans les prochaines années, c'est sûr et certain, mais je ne pense pas que la vision du livre auquel j'ai eu à faire face durant cette journée triomphera. Parce que la résistance est profonde et qu'elle n'est pas dû au changement de technologie. La vitesse auquel les gens se sont adaptés au MP3 montre bien que le problème n'est pas la liseuse en elle-même, mais l'attachement à une certaine façon de faire, à une certaine mentalité liée au livre papier duquel le livre numérique dans ses applications actuelles s'éloignent. Il y a d'immenses possibilités liées au livre numérique certes, je suis tout à fait d'accord, je les vois très bien, mais le numérique a aussi ses limites bien réelles. Et je constate que bien souvent, les gens qui sont des partisans du numérique préfèrent jouer à l'autruche avec les désavantages plutôt que de dire que le papier a lui aussi ses avantages, le plus grand d'entre eux étant avant tout d'être pérenne. Un livre papier, avec un minimum de soin, ce n'est pas tuable. Une liseuse, c'est plus fragile et ça nous rend dépendant de la technologie, de l'électricité et ça nous oblige à entrer dans la danse de la connexion internet à tout prix liée à celle aux réseaux sociaux, Facebook, Pinterest et tout le tralala. On met le pied dans l'engrenage et on y passe au complet, à moins de résister et encore là, c'est pas évident: se laisser prendre aux filets est si facile...
Et moi dans tout ça? Jusqu'à maintenant, je dois avouer que j'aime bien ma liseuse. Si je fais abstraction du fait que je n'aime pas trop avoir à l'ouvrir à chaque fois que je veux lire, c'est même très sympa. On aura beau dire, c'est très confortable. On s'habitue à l'écran brouillé entre chaque page et au final, ça devient semblable à une expérience de lecture normale. Moins le toucher et le contact physique avec le livre. Bon, ok, j'ai pris un livre extrême pour commencer. Soyons honnête, tous les Jules Verne que j'ai lu jusqu'à maintenant étaient de vieilles éditions de poche, souvent prise en bibliothèque. Alors côté odeur de vieux papier poussiéreux et texture, j'étais servie. Rien de tout ça avec ma chère liseuse. Non, au contraire, le côté tactile est absent, on est moins stimulé. Tout se passe au niveau des yeux. Et aussi niaiseux que ça puisse paraître, ne pas voir mon signet avancer dans ma lecture et ne donc pas avoir de repaire visuel sur le où j'en suis rendue est perturbant. Ok, je vois le nombre de pages lues, mais c'est pas la même chose. Ce sont des chiffres et ils n'ont pas tant de réalité physique que ça. Alors, je m'habitue tranquillement à ma chère liseuse. J'apprivoise lentement la bête. Pour l'instant, elle est sage et trône parmi mes pile de livres, attendant sagement son tour. C'est un outil pour lire, pas mes livres eux-mêmes. J'ai comme l'impression qu'elle ne sera pas trop souvent de côté, juste avec les livres libres de droit, tout ce à quoi on a accès est tellement génial que ce serait fou de s'en priver. Laisser-moi vous dire que je regarde désormais la date de décès de certains auteurs avec attention!
Alors, j'en suis là. La bête est là, elle m'attend, mais même si c'est une bête, je suis en train de l'apprivoiser. Et pour ceux qui pense que je vais un jour lâcher le livre papier, oubliez-ça: ma liseuse et mes autres livres sont complémentaires, pas opposés. Différents, ils ont chacun leurs avantages et leurs inconvénients et avoir les deux me permet d'avoir le meilleur en tout.
@+ Prospéryne
8 commentaires:
Je pense que le principal problème, c'est que les geek tripeux de technologie ne sont pas les plus grands lecteurs. Ils n'ont jamais reçu ça des livres en héritage (ou alors ça leur a pas fait plaisir). Donc ils ne comprennent pas les avantages du papier.
Pour l'instant, moi je résiste au numérique surtout pour une question de coût et pour ménager mes pauvres yeux fatigués des écrans (comme j'explique souvent, je peux lire sur papier sans lunette, mais pas sur un écran de liseuse).
Et parce que si je passe au numérique, comment est-ce que je vais prêter mes livres à mon chum?
Tant que tu l'appelleras «la Bête», tu risques d'entretenir des réserves à son sujet ;)
@Gen, fort probablement que les geeks n'ont jamais vraiment trippé sur le papier, ce qui explique leur réaction. Mais je dois dire dans leur cas, j'ai eu comme l'impression que c'est la techno qui les emmène à la lecture, ils n'ont pas le réflexe d'y aller au départ. Ils adaptent les livres à ce qu'ils connaissent et ne prennent pas le temps de connaître et comprendre la culture du livre et de la littérature. Décevant, mais dans quel domaine ils agissent autrement?
Je comprends tes craintes face aux écrans de liseuse, jamais je ne lirais devant mon ordi, mais sincèrement, jusqu'à maintenant, le e-ink ne m'a pas trop fatigué les yeux... Reste qu'en effet, pour le prête de livres numériques de personne à personne, la technologie est encore nulle. Pauvre Vincent! :P
@Pat, je l'appelle la bête, comme Gen appelle son ordinateur bibitte. C'est son petit surnom gentil. Et puis, ma bête, c'est comme le loup du Petit Prince: elle a l'air effrayante au départ, mais à force de la côtoyer, on finit par l'apprivoiser!
@Prospéryne : Je reste encore sceptique quant au fait que la liseuse amène les geeks qui ne lisaient pas à la lecture. À ce que je vois, ça les a amené à télécharger ben des livres libres de droit et à les oublier ensuite... mais bon.
Et je sais pas pourquoi, mais le E-Ink est encore trop dur pour mon astigmatisme. Moins pire qu'un écran d'ordi, mais toujours pas aussi doux que le papier.
@Gen, de ce que j'en aie vu (et je le reconnais, mon échantillon est limité), ils se mettent à lire, mais des trucs optimisés pour les IPad et autres livres numériques enrichis. Les livres standards, textes seulement doivent leur paraître trop ennuyeux.
Et ne t'en fais pas pour les écrans, ça te donne juste une raison supplémentaire de ne pas y toucher! ;)
Quand je lis «la Bête», j'imagine des pentagrammes, c'est pour ça ;)
Je ne suis pas fan de cette technologie. J'ai trop peur que le livre papier finisse par disparaitre un moment donné. je dis pas que jen acheterai jamais une, mais pour l'instant je préfere lire dans un bouquin que de me casser les yeux sur un écran :) après, si toi tu aimes ça, c'est tes affaires cest toi qui la payer lol
@Pat, des pentagrammes? Non, la Bête de la belle et la Bête plutôt!
@Bubulle, je l'ai acheté au terme d'une assez longue réflexion et j'étais rendue à tester cette technologie de moi-même. Par contre, ne me mets pas dans la catégorie des fans, c'est une décision raisonnée, par un coup de coeur.
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