Salut!
Souvent, quand je mets un livre de Patrick Senécal dans les mains de mes clients, ils me jettent un petit coup d'oeil par en-dessous et me lancent: «Il doit vraiment être bizarre ce type non?». Euh non. À chaque fois que j'ai eu le plaisir de le rencontrer, il m'a fait l'effet d'un type parfaitement normal, amateur de trucs sombres certes, mais pour le reste, tout ce qu'il y a de plus ordinaire. À moins que comme beaucoup de ses personnages, il ne cache sa vraie nature sous les apparences de la normalité. Mais là... Va savoir! En tout cas, j'ai jamais entendu parler de tueur en série sanguinaire dans le bout de Drummondville...
N'empêche, on dirait que ça fascine les gens les écrivains d'horreur. On pense que ce qu'ils écrivent est leur vie, ou du moins, leurs fantasmes de vie. Euh... À mon sens, c'est négliger la part absolument fondamentale qu'occupe l'imaginaire dans la création artistique. De la même façon dont les auteurs d'horreur écrivent des trucs qu'ils ne feraient absolument jamais dans leur vie quotidienne, les auteurs de romans d'amour se servent de leur imagination pour créer des histoires romantiques. Cependant, je ne pense pas que Nora Roberts ou Barbara Cartland, pour ne citer que celles-là soient tombées des milliers de fois en amour. C'est pourtant le nombre approximatif de romans qu'elles ont respectivement écrit. On ne se pose pas la question à savoir si elles ont eu ce genre de vie amoureuse. Elles ont pourtant utilisé le même outil que les auteurs d'horreur: leur imaginaire. La différence? Ce qui les fascine, ce n'est pas l'amour, mais l'horreur, ce petit frisson de terreur qui courre le long de la colonne vertébrale et qui met tous nos sens en éveil tandis que la terreur se répand dans nos veines.
La plupart des auteurs que je connais qui écrivent de l'horreur (peu nombreux, je dois l'avouer), sont des gens débordants d'humour, bien souvent en couple, plein de vie, adorant la bonne bière, les discussions à bâtons rompues et personne ne jurerait en les voyant dans la rue qu'ils ont en train d'imaginer la scène de dépeçage de leur prochain roman. Parce que c'est leur imaginaire qui est en activité, pas la réalité. Par contre, ce qui les fascine, c'est justement ça, le petit frisson de l'horreur et la peur. Les fascine, les fait vibrer, leur fait peur. C'est le même principe pour les auteurs de romans érotiques, la sexualité les fascine, alors ils écrivent dessus, laissant le soin à leur imaginaire de créer des trucs qu'ils ne vivraient sans doute pas dans leur vie quotidienne. L'art, c'est utiliser la fiction pour poser des questions, atteindre un idéal, comprendre d'une autre façon la réalité. Et à travers leurs oeuvres, nombreux sont les lecteurs qui exorcisent leurs peurs.
Bon, maintenant que cela est dit... je n'ai pratiquement jamais lu de Patrick Senécal. Il ne me fiche pas la trouille, mais ses livres, si!
@+ Prospéryne
3 commentaires:
Excellent texte!
J'aime surtout la conclusion que tu tires de ta réflexion, au sujet de la fiction, de cet outil que l'auteur utilise pour comprendre la réalité.
C'est ce que j'aurais dû répondre à un collègue, hier, à Trois-Rivières, qui me demandait comment je faisais pour écrire au Je pour des personnages féminins, plutôt que de me contenter de hausser les épaules, l'air un peu truite.
Personnellement, je me méfie presque des auteurs qui ne sont pas capables d'écrire des trucs sanglants ou violents! :p
Comme j'utilise ma fiction pour sublimer mes peurs et me débarasser des sombres créatures qui traînent dans les recoins de mon esprit, les artistes qui créent toujours des trucs positifs et lumineux m'inquiètent : leurs démons intérieurs, ils les libèrent comment? Lolol! ;)
@Pat, merci beaucoup! Dommage que tu l'aies lu une journée trop tard pour le SLTR. J'espère que tu n'as pas eu l'air trop truite quand même! :P
@Gen, ouin, vu comme ça, c'est inquiétant... Par contre, de la même façon dont certains artistes sont attirés par les choses sombres pour se libérer de leurs peurs, d'autres peuvent être attirés par les trucs archi-lumineux, comme si ça pouvait leur permettre d'atteindre un idéal. Mais s'ils sont trop déconnectés de la réalité, moi, je décroche! ;)
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