Les Anciens Canadiens Philippe Aubert de Gaspé Bibliothèque québécoise Fides 357 pages
Résumé:
Jules D'Haberville et Archibald Cameron de Locheill sont des amis, même plus, des frères. Ils ont grandi ensemble au collège des Jésuites de Québec et ont passé tous leurs étés dans la seigneurie du père de Jules, à St-Jean-Port-Joli. Arrivé au seuil de l'âge adulte, les deux jeunes gens se retrouvent à l'aube de leur carrière militaire également. Or, en cette année 1757, le sort est sur le point de s'acharner sur leur amitié: car tous deux prennent part à la violente guerre qui va ravager le continent nord-américain, chacun sous des drapeaux différents.
Mon avis:
Je me permets de commencer par citer l'auteur:
J'écris pour m'amuser, au risque de bien ennuyer le lecteur qui aura la patience de lire ce volume; mais je suis d'une nature compatissante, j'ai un excellent conseil à donner à ce cher lecteur: c'est de jeter promptement le malencontreux livre, sans se donner la peine de le critiquer: ce serait lui accorder trop d'importance, et, en outre, ce serait un labeur inutile pour le critique de bonne foi; car, à l'encontre de ce vieil archevêque de Grenade dont parle Gil Blas, si chatouilleux à l'endroit de ses homélies, je suis, moi, de bonne composition et, au lieu de à ce cher critique: «Je vous souhaite toutes sortes de prospérités avec de goût, » j'admettrai franchement qu'il y mille défauts dans ce livre, et que je les connais.
Ça donne tout de suite le ton. D'ailleurs, ce qu'il y a de particulier avec ce livre, c'est que l'auteur ne se gêne pas pour faire tout un tas de commentaires sur ses personnages. Il ne se contente pas de raconter une histoire, son narrateur fait littéralement partie du récit. Et il en raconte des histoires! Autant d'histoires drôles tirées de sa jeunesse chez les Jésuites (dont on soupçonne facilement qu'il n'a pas été l'élève le plus sage!) que des commentaires sur l'intrigue. Il a laissé plusieurs pages très riches à la fin du livre pour appuyer tel ou tel point qu'il mentionne ou encore raconter que certaines histoires ou certains faits qu'il raconte sont authentiques. Un autre point important à souligner est le fait que le récit est tout entier est couturé de surnaturel. Des histoires, de fantômes, de revenants, de diables et d'autres personnages mi-historique, mi-réaliste. Bon, il y a l'énorme anachronisme de La Corriveau (jugée sous le régime anglais et qui est pourtant présentée comme ayant vécu des années avant la Conquête), mais pour le reste, on se laisse entraîner. On est surpris par l'emprise du surnaturel sur la vie des habitants de l'époque. Sur ce point, je ne doute pas de l'auteur. Le quotidien est baigné dans ces histoires et on est très attentif aux signes de la nature. Cependant, je dois avouer que pour la lectrice du XXIe siècle, le roman est très long à décoller et demande qu'on s'y accroche tellement il perd du temps à raconter des histoires de fantômes et autres. Le voyage de retour entre le Collège des Jésuites et la Seigneurie du père de Jules demande plusieurs chapitres et malheureusement, on y perd beaucoup de temps. Et pourtant les batailles les plus importantes de la guerre de Conquête elle-même sont traités en quelques malheureux paragraphes, ce qui est dommage, vu l'érudition dont le reste fait preuve. L'intrigue est centrée sur les relations entre la famille d'Haberville et Arché et en ce sens, c'est excellent, bien développé, mais bien sûr très représentatif des moeurs de l'époque, c'est à dire que j'aurais volontiers fait une tournée de Valium pour calmer tout ce beau monde à quelques reprises. Par contre, j'aurais foutu des baffes à Blanche, la soeur de Jules: rater sa chance de bonheur et faire rater celle de l'homme qu'elle aime à cause d'un événement que tout le monde lui a pardonné? Pas fort, fort, d'autant plus que l'auteur présente ça comme un acte admirable. Je ne regrette pas du tout cette lecture, mais je dois avouer qu'elle a plus ou moins bien vieilli.
Ma note: 3.75/5
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