vendredi 29 juillet 2011

Le sens des mots

Salut!

Une réflexion que je me suis faite souvent: pour être auteur, il faut bien connaître le sens des mots.  Parce qu'écrire, c'est la façon suprême de jouer avec la langue et les mots.  Certains sont des virtuoses dans leur utilisation de la langue, mais il y a en a d'autres qui sont tout aussi bon, sans être des virtuoses.  Et il y a en d'autre qui se contente de raconter une histoire.  Mais la langue française est si belle déjà, pourquoi ne pas l'utiliser à son plein potentiel?  Je ne dis pas ici de parler pointu ou d'utiliser le plus-que-parfait du subjonctif aux trois phrases.  Je parle de trouver le mot précis, d'en comprendre le sens et de savoir bien l'utiliser.  Les meilleurs écrivains sont ceux qui ont compris ce principe et qui savent le faire.

Ok, je suis exigeante et dans un monde parfait et idéal, j'aimerais que tous les écrivains me surprennent et sachent utiliser chaque mots à son plein sens, à leur plein usage.  Je me rappelle un livre pour ados, pour l'essentiel à l'écriture bâclée, d'avoir tiqué sur une phrase bien précise.  L'auteur, dans une scène fortement chargée en terme d'émotions décrit le personnage en disant qu'il enroule ses doigts autour d'un verre de milkshake.  Pas qu'il prend le verre, pas qu'il l'agrippe, pas qu'il l'attrape, pas qu'il le serre entre ses doigts, il enroule ses doigts autour du verre.  Il y a quelque chose dans le terme, dans le r qui roule, dans le mouvement qui n'a rien d'une agression, qui parle d'une main comme on parle habituellement d'une corde ou d'un ruban qui m'a fait trouvé cette phrase magnifique.  L'auteur a trouvé ici une excellente façon d'utiliser le son et le sens du mot pour faire pleinement faire ressortir l'émotion dans cette phrase.  Une phrase dans un livre complet par contre.  Atteindre une telle maîtrise est un art et je sais que ce n'est pas tout le monde qui en est capable.  Mais même le plus humble des auteurs réussit parfois ce tour de force.

J'ai lu un livre il y a quelques années.  Rouge Brésil de Jean-Christophe Rufin.  Certaines phrases étaient tellement belles que j'avais envie d'en pleurer.  Des phrases qui parlaient de réalités profondes et en même temps, dont la musicalité étaient d'une beauté à couper le souffle.  Je n'ai pas revu ça souvent.  Même chez cet auteur que j'adore, ce n'est pas tout le livre qui est comme ça, seulement quelques phrases que l'on découvre par hasard au milieu d'un paragraphe et que l'on relit dix fois pour en saisir la beauté, la perfection, on les lit à voix haute tellement elles sont belles et que les sons des mots y sont ordonnés autant que le sens pour donner un cristal ciselé que l'on ne peut qu'admirer.  Ces auteurs qui réussissent ce tour de force, c'est ceux qui dans mon esprit sont des littéraires, car leur qualité d'écriture ne se limite pas à raconter une bonne histoire, elle va plus loin.  On parle ici d'une écriture qui permet à une langue de trouver son plein potentiel.  Son plein épanouissement.  Et j'adore ça!

@+ Prospéryne

5 commentaires:

Gen a dit…

J'aime moi aussi ce genre de jeu avec la langue et j'espère arriver un jour à écrire des phrases comme celles-là. Mais le danger quand on essaie de trop travailler ses phrases, c'est de "sur-écrire" et de perdre le lecteur dans la métaphore.

Prospéryne a dit…

@Gen, je ne le sais que trop bien combien c'est difficile, mais parfois, c'est possible d'y arriver et je te le souhaite de tout coeur que ça t'arrive un jour!

Dominique Blondeau a dit…

un réviseur linguistique ou un traducteur doit connaître aussi le mot juste et précis. Pour l'écrivain, le mot juste et précis donne un effet poétique à la phrase, comme les doigts qui s'enroulent autour du verre...

Pat a dit…

La différence entre l'éclair et la petite étincelle, qu'ils disent :)

Par contre, je suis d'accord avec Gen. Si le roman est travaillé d'une couverture à l'autre avec le désir d'en «mettre plein la vue», ça rend le texte très lourd.

Excellent billet, soit dit en passant.

Prospéryne a dit…

@Dominique, le livre où il y a la phrase avec le verre est une traduction et à mon avis, vraiment pas une des meilleures! Alors, erreur de l'auteur, ou erreur du traducteur, je ne sais pas. Mais les efforts des deux restent importants, ça c'est sûr!

@Pat Merci! Je comprends le sens de sur-travaillé, oui, il doit toujours y avoir une note de spontanéité pour que la magie opère. C'est d'autant plus difficile... Et on l'apprécie d'autant plus quand ça arrive! :)