lundi 30 avril 2012

L'essai vs le roman

Salut!

Lire des essais, j'aime beaucoup ça.  Je n'en lis pas beaucoup hélas parce que je trouve que l'investissement en temps que cela demande est beaucoup trop important.  Ça demande du temps et de la concentration de lire un essai, même s'il est bien écrit et bien vulgarisé.  Pourtant n'aller pas croire que la lectrice de romans que je suis ne fasse pas preuve d'exigences.  Ni que le fait de lire des romans n'est pas aussi instructif.  Tout dépend comment on le prend.

Un essai, c'est présenter un sujet en profondeur, à l'aide d'arguments, d'exemple, mais de manière structurée, professorale même dans certaines cas.  Un essai est là pour nous convaincre de quelque chose.  Pour nous démontrer la justesse d'une idée.  Pour nous instruire, mais surtout pour nous démontrer le système de pensée construit par quelqu'un sur un sujet quelconque.  C'est plus exigeant à la lecture parce que le fait que l'auteur ne cherche pas à enrober sa pensée pour la faire passer demande plus d'attention du lecteur, parfois plus d'érudition, mais surtout plus de concentration.  Je suis incapable de lire un essai de façon légère, non, pour bien comprendre l'auteur, il faut se concentrer dessus, laisser ses autres livres de côté pour quelques temps et plonger dans ce bouquin-là en particulier.

Un roman par contre, c'est tout le contraire.  La forme artistique laisse beaucoup de place, même si les sujets abordés peuvent être tout à fait les mêmes.  Un essai sur l'utilisation de l'énergie nucléaire et ses dérives?  Utiliser un bon roman de science-fiction pour démontrer ses effets et le sujet passera aussi bien, sinon mieux.  Un essai qui défend le droit à l'avortement?  Mettez en scène une femme et le déchirement qu'elle vit face à ce choix.  Un essai historique pour démontrer les abus des conquistadors espagnols?  Vous avez deviné, le roman utilisera la fiction, des personnages, des mises en situation pour montrer la réalité d'une autre façon.  Et le message passera, que la personne assise ou train de lire en soi consciente ou non.

Parce que parfois, le message est subtil dans les romans, il faut savoir lire entre les lignes pour le comprendre.  Mais il est bien là.  Combien de personnes ont vu la critique anti-xénophobe dans Harry Potter?  Car les enfants de moldus, c'est cet autre qui vient d'ailleurs et avec lequel on doit vivre chez soi.  Les 7 tomes sont un plaidoyer pour l'acceptation des autres dans leurs différences et les Mangemorts, l'incarnation de ce refus.  Les Hunger Games, c'est un plaidoyer contre la toute-puissance de l'image sur la réalité et de la déréalisation du monde.  Dans certains romans, la critique est claire, nette et précise, dans d'autres non, mais en filigrane, il y a toujours l'intention de défendre une idée, une façon de voir le monde et les péripéties des personnages correspondent aux arguments de l'essayiste.  C'est ainsi que Stephenie Meyer défend la vision mormone de l'amour et du mariage dans Fascination en utilisant un contexte différent, mais qui revient exactement au même: on baise pas avant d'être mariés et Monsieur doit défendre la faible Madame.  À travers son imaginaire, elle a défendu sa vision du monde en la rendant accessible à des jeunes qui n'auraient certes pas accroché au discours moralisateur que d'autres personnes utilisent.

Je me rappelle avoir été bouleversée par la lecture de La virevolte de Nancy Huston parce qu'elle y questionnait les limites de l'amour maternel, du sacrifice de soi pour ses enfants quand on est une femme.  Et pourtant, nulle part dans le livre, on ne donnait d'arguments pour ou contre ce fait.  On suivant simplement le personnage de Lin dans ses questionnements, ses choix, ses doutes et ses craintes.  Plus tard la même année, j'avais lu l'excellent essai, Le conflit, la femme et la mère d'Elisabeth Badinter sur exactement le même thème.  Dans les deux cas, on explorait la maternité et ses répercussions sur la vie d'une femme, mais les deux approches étaient complètement différentes.  Néanmoins, dans les deux cas, le message passait et était parfaitement compréhensible.  C'est seulement la manière de l'exprimer qui était différente.  Pour convaincre un gouvernement de changer ses politiques, l'essai s'applique mieux.  Pour faire passer un message au niveau des émotions, le roman convient davantage.  Chacun a ses forces et ses faiblesses.  C'est pourquoi ils se complètent si bien.

@+ Prospéryne

samedi 28 avril 2012

Les derniers jours de Stefan Zweig de Sorel et Seksik

Les derniers jours de Stefan Zweig  Adaptation scénaristique: Laurent Seksik  Dessins Guillaume Sorel  Casterman  88 pages

 Résumé:
1941.  Stefan Zweig quitte New York en compagnie de sa seconde femme, Lotte, direction le Brésil.  Il est désabusé du monde et sombre dans la dépression.  Malgré tout, il tente de refaire sa vie sur sa terre d'adoption.  Las de la guerre, il est de plus en plus sombre, malgré l'enthousiasme de Lotte.  Ce sont les derniers mois de la vie d'un homme qui a crut en l'homme et en a été profondément déçu.

Mon avis.
Cette histoire est extrêmement triste, donc à ne pas lire un jour de déprime, ça n'aidera en rien à votre moral.  Stefan Zweig est ici dans les derniers mois de sa vie, il a vu le monde qu'il a a connu et qu'il a estimé être le meilleur qu'a connu l'humanité être détruit sous la botte des nazis.  Pour cet humaniste pacifiste et fervent cosmopolite, le nazisme et le fascisme représentait la totale antithèse de ce qu'il souhaitait pour l'humanité.  Sa femme Lotte, asthmatique, essaie de voir le positif dans chaque chose et de tenir le coup, mais le moral glissant de son époux les mènera vers la mort.  Stefan Zweig est désabusé, déçu au plus profond de son être, blessé dans son essence.  Il ne croit plus en l'être humain, lui, le grand humaniste.  On ressent très bien la lente chute vers l'abîme tout au long du livre.  Malgré les efforts de tous, l'écrivain sombre de plus en plus.  Lotte ne voulait pas mourir, mais elle suit son mari dans la tombe quand même.  Tout l'album transpire ce sombre chagrin, cette tristesse, ce désabusement.  Quelques éclats de bonheur persistent, mais pas assez pour repousser la grisaille.  Pour souligner ce fait, l'album est entièrement en teintes pastelles.  Des bleus, des gris, des verts, même la luxuriance de la forêt amazonienne est en demie-teinte.  Les dégradés de couleurs sont parfaitement adaptés au ton de l'histoire, ils soulignent magnifiquement bien les personnages et les cadrages permettent de bien saisir l'histoire.  Les encrages sont minimalistes, juste de très fins traits pour souligner les contours des objets, le reste, c'est l'habileté du dessinateur avec son pinceau qui l'a fait.  Les seules scènes où la couleur devient rougeoyante, c'est celle où l'on voit les actes des nazis.  L'autodafé de ses livres, la transformation en cendre de ses rêves et de ses espoirs.  On comprend sa décision, même si on se dit qu'elle est davantage le fruit d'une dépression et d'un extrême pessimisme plutôt que le reflet de la réalité.  Il s'est suicidé avant de savoir que les Russes avaient triomphé à Stalingrad et la grand victoire d'El Alamein.  L'humaniste avait abandonné l'espoir en la bonté de l'être humain, pourtant la base de l'humanisme.  Triste fin.  Cette bande dessinée a le grand mérite de faire comprendre mieux l'homme à défaut d'accepter son geste.

Ma note: 4/5

vendredi 27 avril 2012

Me semble que la BD n'est plus comme dans le temps...

Salut!

Constatation faite au cours de ma résolution 2011 où j'ai dévoré beaucoup de BD: je m'ennuie de la vieille BD belge.  J'ai cassé mes dents de lectrice de phylactère sur des séries comme Yoko Tsuno, Le Scrameustache, Aurore et Ulysse et beaucoup d'autres.  J'ai tâté des Schtroumpfs, des Garfield, et je me suis tapée l'intégrale des Astérix et des Tintins.  Entre autre.  Par contre, curieusement, je n'ai jamais ouvert un Boule et Bill.  Ça manque à ma culture sans doute.  Enfin, entendons-nous: de la BD, j'en aie tâté, lu et adoré tout au long de mon adolescence et quand je les relis, je retrouve le même plaisir de lecture.  Mais quand je me plonge dans la production actuelle... Ben, je ne sais pas.  On dirait qu'il manque quelque chose.

Ce n'est pas faute d'avoir essayé.  J'ai l'impression que les dessinateurs de BD n'ont jamais été aussi talentueux que maintenant.  Des BD aux dessins absolument magnifiques, j'en aie vue des tas.  Mais le scénario?  Il me semble parfois que l'art de raconter une bonne histoire en BD semble s'être dilué.  Perdu?  Non, il y a encore de très bonnes choses qui se publient, mais disons que je vois beaucoup de BD passer que je qualifierais de réussite au niveau visuel et de bâclée au niveau scénario.  Je suis sévère, mais dans le 9e art, pour qu'une BD soit bonne, il y a une subtile alchimie à respecter entre le dessin et le scénario pour que tout baigne.

Je dois être une nostalgique.  Aujourd'hui, on dirait que l'image l'emporte souvent sur le propos, mais je suis de celle qui adore avant tout se faire raconter une bonne histoire.  Rien ne bât ça.  Malgré tout, je continue de fouiller, en me demandant comme faisait à l'époque les auteurs pour qu'album après album, tous soient aussi bons.  Je suis consciente que le sens critique se développe avec l'âge, mais disons tout de même que mes premiers émois de lectrice ne sont plus aussi fort aujourd'hui.  Je trouve ça dommage, mais en même temps, je découvre autre chose en BD qui me plaît davantage, comme les BDs en noir et blanc que les puristes appellent des romans graphiques.  On évolue tous dans la vie.  Pour ma part, je découvre qu'une partie de moi est nostalgique d'une certain époque de la BD qui n'existe plus aujourd'hui, ou du moins, qui ne domine plus les parutions.  Dommage pour moi, mais tant mieux pour ceux qui aiment la production actuelle!


@+ Prospéryne

jeudi 26 avril 2012

Coma de Francois Gilbert

Coma  François Gilbert  Leméac  119 pages

Résumé:
Satô vit depuis un an dans un hôtel de Shangaï.  Depuis en fait qu'Ayako lui a crevé un oeil.  Celle-ci a depuis sombré dans le coma et c'est sa mère qui vient chercher Satô à Shangaï pour tenter de ranimer sa fille.  Une façon d'ouvrir une porte en Satô qui sera dure à refermer.

Critique:
Le fait de situer cette histoire en Asie était une excellente idée.  Il y a peu d'éléments qui nous rapprochent tant de la culture japonaise que de la culture que de la culture chinoise, mais dans l'atmosphère, on sent la différence.  Le livre est constitué de jeux entre les identités des personnages, particulièrement Satô.  Il ne sait pas qui il est, il se cherche et ne se trouvera pas nécessairement.  Incapable de s'aimer, il n'a pu que faire souffrir Ayako.  Et la mère de celle-ci qui se déguise pour aller voir sa fille, essayant de se recréer elle-même.  On joue sur les identités profondes, mais on s'y perd un peu au fond.  Un peu trop flou par moment pour que l'on y entre profondément.  Ce n'est que par après, en repensant au livre que j'ai fait des liens et que j'en aie saisi l'essence.  N'empêche, ça reste trop en surface pour laisser une trace durable.  Une belle lecture, mais du genre qui malheureusement ne laisse pas énormément de traces.

Ma note: 3.5/5

Je remercie Socadis et plus particulièrement Josée pour ce service de presse.

mercredi 25 avril 2012

Oh non, pas cette série-là, merci!

Salut!

Discussion avec un client l'autre jour:

-Et le Trône de fer, tu l'as lu?
-Non, j'hésite.
Il a un air étonné.
-Pourquoi?
-Ben, c'est quand même 4 gros tomes...
-Ben voyons, au rythme où tu lis, ça va être vite passé!
-Ouais...  Enfin, si j'ai le temps!

Et oui, souvent, j'hésite à me lancer dans une série à cause... du nombre de pages.  Je l'avoue, j'ai fui certaines lectures ces dernières années à cause du manque de temps.  Je suis une lectrice boulimique à la base, mais jamais au point de ne pas être réaliste face à des séries.  Ça prend du temps de lire une brique de 1000 pages et quelque part... Ben, maintenant j'hésite à me lancer dans de tels livres.

Comprenons-nous, si j'avais une femme de ménage, une fille qui s'entrainerait à ma place et une autre pour travailler pour moi, je pourrais passer ma vie à lire et ne rien faire d'autre.  Malheureusement, comme 100% de la population de cette belle planète, je dois faire des choix.  Lire un livre de 1000 pages, ça passe, mais une série de 3 ou 4 livres?  Je me décourage.  Ou je repousse à plus tard.  C'est la même chose pour une série de plus de 5 livres.  À un moment donné, on finit par choisir.  C'est impossible de tout lire, même en s'y consacrant 24h sur 24.  À un moment donné, il faut décrocher et sortir.

J'ai beau tripper lecture, ça n'empêche pas le linge sale de s'accumuler...

@+ Prospéryne

P.S. Un ami vient de me prêter un livre de Star Wars, le premier d'un cycle de 109 livres et on m'a convaincu d'essayer AU MOINS le premier tome du Trône de fer.  À ajouter à mes résolutions de l'an prochain: apprendre à ne plus commencer de séries interminables...

mardi 24 avril 2012

Les treize trésors de Michelle Harrison

Les treize trésors  Michelle Harrison  Collection Millézine  Bayard  432 pages

Résumé:
Tanya a 15 ans et depuis son enfance, elle voit des choses que personne d'autre ne voit: des êtres féériques.  Sauf que ceux-ci ne la laisse guère en paix!  La pauvre Tanya se voit donc accusée de tous leurs méfaits.  Et le pire reste à venir: lasse de ce qu'elle considère comme le comportement répréhensible de sa fille, sa mère l'envoie passer deux semaines complètes chez sa grand-mère qui vit... dans une forêt infestée de féériques!   Un cauchemar apparent, mais qui va bien vite devenir une occasion pour la jeune fille de pouvoir vivre sereinement avec son don.

Mon avis:
Ceci est une lecture qui me laisse dubitative jusqu'à un certain point parce que d'un côté, c'était très bon et j'ai beaucoup apprécié et de l'autre... Ben, certains trucs n'ont pas passé.  Entre autre, plusieurs incohérences dans le texte, mais vraiment des trucs qui n'auraient pas survécu à une bonne révision.  Du genre, la quatrième de couverture mentionne que Tanya a 15 ans et à l'intérieur, on dit qu'elle n'a que quelques mois de plus qu'un autre personnage de... 12 ans.  Ou encore, on dit que Tanya et Fabian (son comparse dans l'histoire) montent un escalier et arrivé en haut, ils se disent quelque chose et dans le paragraphe d'après, on dit qu'ils finissent de monter l'escalier!  Disons que c'est dérangeant à la longue!  J'ai relevé une bonne dizaine de ces incohérences dans le texte.  L'idée des féériques est intéressante, mais le terrain dans le domaine a été plusieurs fois fouillés dans d'autres livres.  On apporte pas beaucoup d'éléments nouveaux.  La scène finale m'a semblé un peu trop facile et la toute fin rattrape un peu le tout.  Pour le reste, une bonne histoire, bien racontée, dans lequel on embarque très bien et qui nous fait passer un excellent moment, mais sans être exceptionnelle sur le plan littéraire.

Ma note: 3.75/5

Je remercie Bayard/Novalis et plus particulièrement Isabelle pour ce service de presse.

lundi 23 avril 2012

Lire local?

Salut!

Récemment, un commentaire sur un blog m'a fait bondir sur ma chaise: un blogueur reprochait à une blogueuse de ne pas lire assez de livres d'ici parce que sa dernière lecture était d'un auteur d'ailleurs.  Et après? me suis-je dit.  Si elle a aimé son livre, quelle importance?  Et encore, ici, on ne parle que d'un livre...

Il y a deux façons de penser et de faire qui s'opposent dans cette propension au lire local.  Il y a la volonté de vouloir soutenir sa littérature et sa culture, ce qui est tout à fait noble, et le fait de lire ce que l'on aime.  Je n'ai rien contre soutenir sa littérature et sa culture, croyez-moi.  Je ne suis peut-être pas un exemple à suivre, je n'ai guère lu d'auteurs québécois en 2012, mais au volume, je dois dire que j'ai toujours privilégié le plaisir de lire aux obligations et aux diktats.  Si le livre m'intéresse, je vais le lire.  S'il est écrit par quelqu'un d'ici, tant mieux, c'est un plus.  Mais pas la raison première qui va me pousser à le lire.

Je suis contre le nombrilisme littéraire.  Pensez-y, je n'ai pas l'intention de devenir états-uniennes dans ma façon de voir la littérature.  Nos voisins du sud de la frontière lisent massivement des auteurs... de chez eux, J.K. Rowling excepté.  Ils ne sortent pas de leurs certitudes, de leurs façons de penser, de leurs repères.  Même chose en France, ils lisent massivement leurs auteurs ou encore des états-uniens... francisé en France (je n'ose dire traduits!)  J'aime beaucoup mieux le milieu littéraire d'ici.  On est au carrefour de tout, on a le meilleur de la France, des États-Unis et du monde, EN PLUS, d'avoir ici une littérature foisonnante, vibrante, pas assez médiatisée hélas, mais tellement vivante!  Se limiter à ne lire que des trucs d'ici?  Autant mettre des lunettes roses et se dire que le monde n'existe pas!  Ce que j'aime dans la littérature, c'est justement sa capacité à nous transporter partout dans le monde pour pouvoir découvrir celui-ci autrement.  L'art de voyager sans quitter le confort de son foyer.  De comprendre comment peut penser une petite fille qui grandit en Afghanistan ou un paysan chinois du XIXe siècle.  De ressentir la terreur qu'ont connut les gens de Pompéi en 79 ou l'émotion qui a serré le coeur des gens qui ont vu s'enflammer la torche olympique à Montréal en 1976.  Pour ça, il ne faut pas se limiter à lire que des trucs écrits ici parce que la pensée qui sous-tend notre littérature, même quand on veut faire différent, est celle d'ici.  Pour comprendre le monde, il faut savoir bousculer ses certitudes et sa compréhension du monde.

Alors lire des livres d'ici?  Celui qui voudra m'en empêcher devra me renverser sa bibliothèque sur le corps!  Mais jamais, jamais, je ne vais me limiter à ne lire que des choses d'ici parce que c'est mieux ce qui se produit ici qu'ailleurs.  Je suis trop têtue de un, trop curieuse du monde de deux pour jamais pouvoir arrêter de dévorer des auteurs venus d'ailleurs qui sont prêts à m'offrir leur plus grande richesse: leurs mots.

@+ Prospéryne

vendredi 20 avril 2012

Le combat ultime: L'horloge et le livre

Salut!

Je le reconnais, je l'ai fait plusieurs fois dans ma vie.  Lire un oeil sur le livre et l'autre en train du fusiller du regard ma montre pour lui faire comprendre de ralentir son rythme.  Ben quoi, JE VEUX FINIR MON LIVRE AVANT D'ALLER ME COUCHER!!!!  Le hic, c'est que dans ces cas-la, ma très peu coopérative montre me rappelle sans cesse que l'heure d'aller dormir se rapproche... est presque arrivée...  est atteinte... est dépassée... est largement dépassée...  Ouin, tu vas arriver au boulot brûlée demain toi!  Mais au moins, je vais avoir fini mon livre!

C'est compulsif. Quand je suis dedans, je suis dedans et j'ai du mal à décrocher.  Alors, je rogne sur mes heures de sommeil pour finir l'histoire.  De toutes façons, je me connais assez pour savoir que même si j'allais me coucher, je mettrais un temps fou à trouver le sommeil, vaut mieux consacrer ce temps à lire plutôt qu'à faire de la pitourne* dans mon lit, parce que je suis trop dans l'intrigue de mon livre et pas assez disposée à dormir.  Autant finir le bouquin dans ces circonstances non?

Je l'ai fait combien de fois cette chose horrible qui consiste à rogner sur mes heures de sommeil pour terminer un livre?  Je ne sais plus trop.  Des fois, c'est parce qu'il ne me reste que quelques dizaines de pages, des fois c'est parce que je suis trop dedans.  Mon record Guiness personnel?  3h du mat pour finir Harry Potter et l'ordre du Phénix.  J'avoue que j'avais un peu hâte que ça finisse au cours des 200 dernières pages parce qu'il commençait vraiment à être tard!   Je ne l'ai jamais refait remarquez, même pas pour le 6e et 7e tome (je m'y suis prise plus tôt!)  Je ne le fais pas tout le temps, si je suis à la moitié du livre, je le repose.  Je suis capable d'être raisonnable, enfin, parfois!, n'empêche, ça fait parti de mes défauts de ne pas savoir m'arrêter.  Mais même aujourd'hui, c'est rare que l'aiguille de ma montre, pardon ses cristaux (désolé, je suis à la mode numérique!) me fasse lâcher un livre quand je suis déterminée à le finir.  Quitte à foutre des baffes à Morphée s'il passe trop tôt!

Je suis une incorrigible accro aux livres...

@+ Prospéryne

*Néologisme familial indiquant l'action de tourner dans son lit parce qu'on arrive pas à dormir.  Pis tourner, pis tourner, pitourner, pitourner.  Bref, vous avez compris le principe.

jeudi 19 avril 2012

Louis Riel de Chester Brown

Louis Riel  Chester Brown  La Pastèque 241 pages


Résumé:
Une biographie de Louis Riel, le célèbre métis qui s'est opposé au gouvernement canadien lors de la prise de possession des terres de la Compagnie de la Baie d'Hudson.

Mon avis:
Une biographie en bande dessinée?  Ah oui, celle-ci est indéniablement une biographie.  Il manque certes des pans de l'histoire personnelle de Louis Riel, son enfance et sa formation entre autre, mais le reste est bien développé: on touche à sa personnalité, aux raisons qui l'ont poussé à faire ce qu'il a fait.  On entre dans la vérité de sa personne.  J'ai l'impression d'avoir plus appris sur Louis Riel en une BD que dans presque tous les cours d'histoire que j'ai suivi.  Et je rends hommage à Chester Brown, d'avoir su traité avec autant de finesse et de respect le personnage de Louis Riel.  Il n'en fait pas un saint, mais il n'en fait pas un fou non plus, c'est un être humain qui a dû agir à un moment difficile de l'histoire.  Par contre, il ne cache pas le moins du monde la fourberie de John A MacDonald.  Bon, ça, c'est connu, mais l'auteur l'a habilement caricaturé pour mieux montrer ce trait de personnage.  On voit clairement le sort réservé aux métis, ils n'avaient aucune chance et le gouvernement ne négociait même pas, encore moins de bonne foi.  Les dessins sont très intéressant, des encrages très simples, mais chacun d'entre eux sert très bien le personnage qu'ils décrivent.  On sent leur personnalité transparaître.  J'ai aussi aimé le fait que l'auteur respecte les langues d'origine dans lesquels les dialogues avaient lieu (ceux en français sont toujours entre crochet pour les distinguer de l'anglais).  Une partie particulièrement intéressante est le procès de Louis Riel.  Était-il fou?  Ou non?  L'avocat de Riel tente de le démontrer pour lui éviter la pendaison, mais si Riel a eu des crises mystiques, c'est moins sûr qu'il était fou.  Dépassé par les événements, écrasé sous le poids des responsabilités que les siens mettaient sur son dos, oui, mais fou?  Dur à dire.  Cette subtile ambiguïté est bien rendue dans le livre.  Autre chose, les notes de fin de livre sont une petite mine d'or qui montre l'étendue des recherches de l'auteur pour cette BD.  Excellentes à lire.  Un ouvrage qui reflète bien la personnalité complexe de Louis Riel, mais au travers d'un art différent de la biographie traditionnelle, sans que cela altère le propos pour autant.

Ma note: 4/5

mercredi 18 avril 2012

Les livres abîmés

Salut!

Il y a quelques mois, une dame a acheté un livre pour donner en cadeau.  Elle part de la caisse et vient échanger sa copie contre une autre du même livre en me disant: il est abimé celui-là!  Je jette un coup d'oeil au livre et me rend compte qu'à l'avant, dans le bas de la couverture, le carton relève d'environ un quart de millimètre, tout simplement parce que le livre a été placé dans un présentoir.  Et récemment encore, une jeune fille a demandé un rabais pour un livre dans la couverture cartonné avait une très légère empreinte d'ongles.  Il était abimé selon elle.  Pas selon moi.

Je dois être insensible à ce genre de microscopique détails avec le temps.  Pour moi, un livre abimé est un livre abimé et j'en vois régulièrement.  Coin froissé à la suite d'un choc, couverture pliée, reliure cabossée, jaquette déchirée, je crois qu'en 4 ans en librairie, j'ai vu toute la gamme des outrages au livre possible excepté ceux qui peuvent leur être imposés par le fond d'un sac d'école d'adolescent, quoique même là, j'en aie vu un rayon.  Un livre parfait n'existe pas, même fraîchement sorti des boîtes, même nouvellement sorti de l'imprimante.  La manie de la perfection coûte cher.

Si c'est abîmé, je n'ai aucun problème à consentir un rabais ou à trouver une solution de rechange, mais la quête de perfection de certain me hérisse.  On cherche la petite bête noire pour trouver des imperfections aux livres et je déteste.  Sur mes tablettes personnelles, j'ai des livres qui ont largement subit les outrages de leurs précédents possesseurs, passage dans une baignoire comprise!  Ça ne me dérange pas.  Je respecte leur chemin de vie.  Leurs mots sont intacts, c'est ça qui compte.  Je ne crache pas sur un livre qui a du vécu.  Il a son histoire, voilà tout.  Personnellement, à moins que ce soit pour un cadeau, je n'ai pas de problème à lire un livre abimé, mais je suis une folle des livres, je ne suis sans doute pas un exemple à suivre.  La perfection, elle n'est pas de ce monde et je l'accepte.  À part si c'est pour un cadeau, je ne comprendrais jamais l'obsession de certains pour la perfection.  Elle coûte très cher en temps, en énergie et en manutention et une fois passé la porte du magasin, elle va durer combien de temps?

@+ Prospéryne

mardi 17 avril 2012

Les Anciens Canadiens de Philippe Aubert de Gaspé

Les Anciens Canadiens  Philippe Aubert de Gaspé  Bibliothèque québécoise  Fides 357 pages


Résumé:
Jules D'Haberville et Archibald Cameron de Locheill sont des amis, même plus, des frères.  Ils ont grandi ensemble au collège des Jésuites de Québec et ont passé tous leurs étés dans la seigneurie du père de Jules, à St-Jean-Port-Joli.  Arrivé au seuil de l'âge adulte, les deux jeunes gens se retrouvent à l'aube de leur carrière militaire également.  Or, en cette année 1757, le sort est sur le point de s'acharner sur leur amitié: car tous deux prennent part à la violente guerre qui va ravager le continent nord-américain, chacun sous des drapeaux différents.

Mon avis:
Je me permets de commencer par citer l'auteur:
J'écris pour m'amuser, au risque de bien ennuyer le lecteur qui aura la patience de lire ce volume; mais je suis d'une nature compatissante, j'ai un excellent conseil à donner à ce cher lecteur: c'est de jeter promptement le malencontreux livre, sans se donner la peine de le critiquer: ce serait lui accorder trop d'importance, et, en outre, ce serait un labeur inutile pour le critique de bonne foi; car, à l'encontre de ce vieil archevêque de Grenade dont parle Gil Blas, si chatouilleux à l'endroit de ses homélies, je suis, moi, de bonne composition et, au lieu de à ce cher critique: «Je vous souhaite toutes sortes de prospérités avec de goût, » j'admettrai franchement qu'il y mille défauts dans ce livre, et que je les connais.
Ça donne tout de suite le ton.  D'ailleurs, ce qu'il y a de particulier avec ce livre, c'est que l'auteur ne se gêne pas pour faire tout un tas de commentaires sur ses personnages.  Il ne se contente pas de raconter une histoire, son narrateur fait littéralement partie du récit.  Et il en raconte des histoires!  Autant d'histoires drôles tirées de sa jeunesse chez les Jésuites (dont on soupçonne facilement qu'il n'a pas été l'élève le plus sage!) que des commentaires sur l'intrigue.  Il a laissé plusieurs pages très riches à la fin du livre pour appuyer tel ou tel point qu'il mentionne ou encore raconter que certaines histoires ou certains faits qu'il raconte sont authentiques.  Un autre point important à souligner est le fait que le récit est tout entier est couturé de surnaturel.  Des histoires, de fantômes, de revenants, de diables et d'autres personnages mi-historique, mi-réaliste.  Bon, il y a  l'énorme anachronisme de La Corriveau (jugée sous le régime anglais et qui est pourtant présentée comme ayant vécu des années avant la Conquête), mais pour le reste, on se laisse entraîner.  On est surpris par l'emprise du surnaturel sur la vie des habitants de l'époque.  Sur ce point, je ne doute pas de l'auteur.  Le quotidien est baigné dans ces histoires et on est très attentif aux signes de la nature.  Cependant, je dois avouer que pour la lectrice du XXIe siècle, le roman est très long à décoller et demande qu'on s'y accroche tellement il perd du temps à raconter des histoires de fantômes et autres.  Le voyage de retour entre le Collège des Jésuites et la Seigneurie du père de Jules demande plusieurs chapitres et malheureusement, on y perd beaucoup de temps.  Et pourtant les batailles les plus importantes de la guerre de Conquête elle-même sont traités en quelques malheureux paragraphes, ce qui est dommage, vu l'érudition dont le reste fait preuve.  L'intrigue est centrée sur les relations entre la famille d'Haberville et Arché et en ce sens, c'est excellent, bien développé, mais bien sûr très représentatif des moeurs de l'époque, c'est à dire que j'aurais volontiers fait une tournée de Valium pour calmer tout ce beau monde à quelques reprises.  Par contre, j'aurais foutu des baffes à Blanche, la soeur de Jules: rater sa chance de bonheur et faire rater celle de l'homme qu'elle aime à cause d'un événement que tout le monde lui a pardonné?  Pas fort, fort, d'autant plus que l'auteur présente ça comme un acte admirable.  Je ne regrette pas du tout cette lecture, mais je dois avouer qu'elle a plus ou moins bien vieilli.

Ma note: 3.75/5

lundi 16 avril 2012

Quand on connaît l'auteur...

Salut!

En bonne groupie d'écrivains, je finis toujours par passer du temps avec des auteurs que ce soit virtuel ou non.  Et j'adore ça.  Non, mais quoi, c'est vrai, les auteurs sont des gens hyper-sympas et en parlant avec eux, on tombe dans leurs univers, on découvre des choses, on apprend les dessous du métier.  C'est super!  Cependant, il y a un hic: on connaît la personne, alors forcément, on a doublement le goût de lire leur livre.  Mais quand vient le temps de le critiquer...

Hum, il faut le dire en partant, je ne suis pas une critique professionnelle.  Pas du tout.  J'ai lu beaucoup de livres, je m'y connais en bouquin, mais je n'ai jamais suivi de cours de littérature et encore moins sur l'art de la critique.  Ce qui ne veut pas dire que je ne sache pas reconnaître un bon bouquin d'un mauvais, loin s'en faut.  Non, mais je n'ai pas le titre, ni les connaissances, alors quand je dis mon opinion sur un livre, c'est profondément personnel.  C'est ce que j'en pense moi.  Et je peux en penser du bien ou du mal, c'est selon.  Je ne suis pas méchante, mais je me suis promise de dire que si un livre d'un auteur que je connais était mauvais, ben, je n'allais pas dire qu'il était bon pour faire plaisir à qui que ce soit.  Quand un auteur publie, il court toujours le risque de se planter, tout comme je cours toujours le risque de me planter en ouvrant un livre.  La différence?  Je peux toujours le refermer et passer à autre chose si ça ne me plaît pas.  L'auteur, lui, vivra avec les conséquences de la publication de son oeuvre.

Croyez-moi, ça me cause parfois des petits soucis de conscience.  Comment dire à un auteur que l'on connaît qu'on a pas aimé son livre?  Certains personnes le prennent bien, d'autres moins bien.  Ça dépend des personnalités, des susceptibilités.  J'essaie de ne pas être vache (comme je peux l'être envers quelqu'un que je ne connais ni d'Adam, ni d'Ève et qui, avantage supplémentaire est un auteur traduit!), mais je ne veux pas non plus nuancer mon propos au point de ne plus faire passer mon idée de base.  Si c'est pas bon, c'est pas bon, voilà tout.  Et attention, ça part de mon point de vue à moi, pas de celui de quelqu'un d'autre.  Ce qui peut, à mes yeux, être royalement pourri, peut être aux yeux de quelqu'un d'autre comme une réussite magistrale.  Les goûts et les couleurs!  Une seule chose peut être sûre et certaine pour tous: je dis ce que je pense.  Alors si je vous dit que certains trucs auraient pu être meilleurs, c'est que je le pense.  Je suis peut-être un peu utopique, mais je crois sincèrement qu'une bonne critique bien faite peut tout autant être une aide qu'un frein.  Pointer un défaut peut aider à le corriger.  Alors si c'est important, je le dis.  Mais quand je vous dis que certains trucs étaient géniaux, extraordinaire et magistraux, je le pense aussi.  C'est une chose que je me suis promise à moi-même en ouvrant ce blog: dire toujours ce que je pense vraiment dans mes critiques.  La seule différence entre un auteur que je connais et un auteur que je ne connais pas, c'est que je vais prendre deux fois plus de soins à rédiger ma critique, pour être certaine qu'elle représente fidèlement ma pensée.

Amis, auteurs, vous voyez, vous me faites écrire!

@+ Prospéryne

samedi 14 avril 2012

Terre et cendres d'Atiq Rahimi

Terre et cendres Atiq Rahimi  Folio Gallimard  90 pages

Résumé:
Dastanguir est sur le chemin de la mine pour aller annoncer à son fils Mourad que toute sa famille, sauf lui et Yassin, son petit-fils, sont morts dans le bombardements de leur village par les Soviétiques. 

Mon avis:
On peut résumer ce livre en deux lignes, mais pas parce qu'il est court, mais bien parce qu'en 90 pages, on ne nous raconte que ça, la douleur du vieil homme qui a vu mourir femme, enfants et bru et qui s'accroche à son dernier devoir: aller annoncer à son fils la mort de sa famille.  Tout le livre est pris dans cette douleur infinie du deuil.  Il n'y a pas de colère, pas de désir de vengeance juste la douleur pure.  L'écriture est superbe, on se dirait littéralement happée dans la langue afghane, sa sécheresse, ses mots.  Même si le texte est traduit en français, on retrouve la beauté du rythme de la langue d'origine.  En ce sens, la traductrice a fait un boulot génial de traduction.  Et ce n'est pas perclus de religion. Dastanguir ne parle pas de Dieu aux deux mots, mais on sent sa profonde foi.  C'est un récit épuré sur la douleur du deuil, le déchirement de l'Afghanistan entre ses traditions et la modernité.  Le récit a lieu à l'époque de l'invasion soviétique et on est surpris en lisant cela de voir les mêmes réalités que lors de l'invasion du pays par l'OTAN.  L'occupation étrangère est lourde de conséquences sur les esprits.  Quel que soit l'occupant.

Ma note: 4/5

Je remercie Socadis et plus particulièrement Michel pour ce service de presse.

vendredi 13 avril 2012

Drôle de clients! Prise 5

Une cliente se présente en magasin et me pose des questions sur la série L'épée de vérité de Terry Goodkind et surtout sur son adaptation télé.

Cliente: La série couvre combien de tomes?

Moi: (Après avoir vérifié) les deux saisons couvrent les deux premiers tomes.

Cliente: C'est parce que ce n'est pas certain qu'ils vont tourner la saison trois et que ma fille voudrait savoir la suite.

Moi: C'est indiqué sur Internet que c'est librement adapté, alors c'est sûr qu'il va y avoir des différences entre les deux.

Cliente: C'est pas grave, elle va être rendue au tome 5-6?

Moi: Euh non, les deux premières saisons couvrent les deux premiers tomes.

Cliente (qui visiblement ne m'a pas écoutée!): Ah, c'est bien, mais je voudrais savoir à quelle tome elle est rendue pour lui acheter la suite.

Moi: Madame, le tome 1, c'est la saison 1 et le tome 2, c'est la saison 2.

Cliente: Hein, mais c'est pas vrai, il peut pas se passer tant de choses dans un seul livre!

(Intérieurement: BEN OUI! %)?%&*?&*)%)&*%)

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Un homme d'une cinquantaine d'année avec une canne se présente à mon comptoir:

Client (avec la voix éteinte d'un croque-mort) Je voudrais le cahier d'exercice de première année, j'ai appelé.

Moi: Est-ce que c'est pour une école en particulier? (On remets des cahier d'exercices à certaines écoles primaires)

Client: (Toujours avec une voix de croque-mort) Non, c'est pour moi, je voudrais celui de première année, j'ai appelé.

Moi: Est-ce qu'on vous l'a mis de côté?

Client: Non, quand j'ai appelé, on m'a dit qu'il n'existait plus.

Moi: ???

Client: On m'a dit qu'il avait été remplacé par le cahier Mission Réussite.

Moi (après vérification dans l'ordinateur) On ne l'a pas en magasin, est-ce que vous voudriez le commander?

Client: D'après vous mademoiselle, pourquoi je suis ici?

Moi: (Intérieurement ) d'accord, je vous le mets en commande.

Client: Je donne des cours d'alphabétisation auprès d'un adulte, le cahier est pour lui.

(Tant mieux monsieur, mais j'espère juste que vous êtes un peu plus dynamique quand vous enseignez parce que pour ma part, je vous trouverai plus à votre place dans un salon funéraire!!!!!!)

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Une dame se présente au comptoir et me demande le livre Comment gérer un employé difficile. Je lui explique que nous n'avons pas ce titre en stock, mais que nous pouvons le lui commander, en lui précisant que le livre arriverait la semaine suivante. Elle lève les yeux au ciel quelques instants et se murmure à elle-même: «Est-ce qu'ils vont être capable de toffer aussi longtemps?»

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Une cliente arrive et me demande un livre sur la mythologie grecque:

- Quel genre de livres?
- Ben un livre sur ça pour une ado de 15 ans.
- D'accord, mais que voulez-vous exactement?
- Ben je sais pas, un livre là-dessus, ma fille est très intéressée par ça et je veux lui en donner un pour son anniversaire.
- Un dictionnaire de mythologie, un livre qui explique les mythes, un recueil de récits de la mythologie?
- Hein, ben là je sais pas!
- C'est un sujet très vaste vous savez.
- Vaste comment?
- Ben, si je fais une recherche avec le terme mythologie grecque dans ma banque de données, j'ai 738 livres qui m'apparaissent à l'écran. (Bouche bée de la cliente) C'est un peu comme si me demandiez de trouver un livre sur les chats, il y en a beaucoup.
- Ah d'accord, je crois que je vais demander quelques précisions à ma fille...

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Une dame arrive en magasin et me demande de lui trouver un livre.

- C'est un livre qui parle d'où viennent les maladies, vous savez, quand on a tel ou tel émotions, ça provoque si ou ça.

- Ah, vous parlez du Grand dictionnaire des malaises et maladies?

- Non, c'est pas ça, c'est fait comme un index, on cherche la maladie et on sait ça vient d'où.

- Le Grand dictionnaire des malaises et maladies est fait comme ça vous savez.

- Non, mais c'est pas lui que je cherche, ils ont fait une nouvelle version ya pas longtemps.

- Ah bon, ce n'est peut-être pas lui dans ce cas...

- Le livre est bleu.

En ayant un peu marre et persuadée que je parlais du bon livre depuis le début, je me lève et je vais le chercher le livre dont je parlais depuis le début.

Celui-ci:


- Ah, s'exclame la cliente, c'est exactement ça, je savais que tu allais le trouver!

(Moi, intérieurement )

@+ Prospéryne

jeudi 12 avril 2012

La liseuse de Paul Fournel

La liseuse  Paul Fournel  P.O.L.  216 pages

Résumé:
Vendredi soir, heure de partir.  Une stagiaire entre dans le bureau de Robert Dubois et lui remet les manuscrits qu'il a à lire pour la fin de semaine à venir... sur une liseuse.  Pour l'éditeur de trente ans de métier, c'est le point de départ d'une petite révolution dans sa vie.

Mon avis:
Bonne idée, mais absence d'idées?  Je ne sais pas trop quoi dire.  L'écriture de ce livre est vraiment très très bien sans être un régal.  On s'amuse beaucoup avec Robert Dubois en tout cas!  Et les multiples descriptions de bouffe (cuisine française!) m'ont beaucoup amusée.. et fait salivé!  Par contre, quel est l'idée de ce livre?  Les mots?  La façon dont ils circulent?  Le choc d'un éditeur face à de nouvelles façons de faire?  Les nouvelles formes d'écriture?  Les possibilité du numérique?  C'est à la fois tout ça et rien du tout.  C'est trop éparpillé pour que ça tienne.  On est d'un côté certes dans la découverte de la lecture numérique par un éditeur de la vieille école, mais en même temps, on touche à tellement de sujet qu'on finit par ne pas bien en traiter un seul.  Lecture numérique, nouvelle possibilité de lectures, monde de l'édition, relations éditeurs-auteurs, bref, trop de chose pour bien les traiter dans un roman de 216 pages.  D'autant plus que la fin m'a paru artificiellement cousue au reste tellement je ne voyais pas de liens autre que le personnage principal avec le reste du livre.  On y fait un saut dans le temps et on aborde une nouvelle facette du personnage, mais sans sentir que ça prolonge le reste du récit.  Je me suis vraiment demandée ce que ça avait affaire avec le reste.  Une bonne lecture, mais sans plus, ce qui est dommage, parce que le sujet avait énormément de potentiel.

Ma note: 3.25/5

Je remercie Gallimard Diffusion et plus particulièrement Michel pour ce service de presse.

mercredi 11 avril 2012

La libraire féline

Salut!

Ceux qui me connaissent bien savent que j'ai deux passions dans la vie: la littérature... et les chats.  Bon, le nombre de livres sur les chats que je lis à longueur d'année doit sûrement donner un indice sur la profondeur de ma passion, mais quiconque a déjà passé le seuil de ma porte sait aussi que je cohabite avec un duo de quadrupède poilu assez gâté merci!  Alors, je me suis un jour demandée: qu'est-ce que ça me ferait si un jour on me demandait des conseils pour des livres sur les chats?

Honnêtement, mes passions finissent toujours par transparaître dans mon boulot, c'est évident, mais le fait de me faire demander des livres sur les chats, c'est plus rare.  Ça m'est tout de même arrivée quelque fois.  La première fois, j'ai levé au plafond et j'ai montré à ma cliente tout ce que j'avais en magasin.  Je commençais dans le métier à l'époque...  J'en aie fait beaucoup plus que ce que le client en demandait!  Depuis, je me suis un peu calmé le pompon, mais à chaque fois, mon coeur bondit de joie et un large sourire s'étale sur mon visage.  Je suis dans mon élément, dans ma branche, dans ma chasse gardée.  N'imaginez pas que quiconque en magasin ose conseiller des livres sur les chats à part moi!  Dès qu'il y en a un qui demande ça en magasin, la réponse est automatique de la part de mes collègues: Prospé, par ici!

Les livres sur les chats, j'adore ça et j'adore en recommander.  J'ai beaucoup d'autres passions dans la vie, c'est évident.  Mais quand on tombe sur celle-là, je réponds toujours présente.  Dans le métier de libraire, il n'y a rien de mieux que de pouvoir partager doublement ses passions.  Et c'est encore mieux si on tombe sur des doubles passionnés comme nous.  Et croyez-moi, ça existe!

@+ Prospéryne

mardi 10 avril 2012

Averia: 1- Seki de Patrice Cazeault

Averai  tome 1  Seki  Patrice Cazeault  Ada  375 pages

Résumé:
Sur Averia, colonie humaine conquise par les Tharisiens vingt ans auparavant, vivent deux soeurs, Seki et Myr.  L'aînée est une pacifiste convaincue, avant tout désireuse de poursuivre ses études et qui tolère relativement bien l'occupation tharisienne.  Sa soeur Myr par contre, est en colère et avec toute la force de sa rébellion adolescente, ne souhaite que la révolution violente pour chasser les Tharisiens d'Averia.  Et pourtant, alors que c'est sa soeur qui souhaite prendre les armes, Seki se retrouve bien malgré elle mêlée à un attentat contre le gouverneur tharisien et devient ainsi le symbole de la révolution imminente.

Mon avis.
Wow!  Honnêtement, je ne savais pas trop à quoi m'attendre en ouvrant le livre, c'est un nouvel auteur dans le paysage et je n'avais aucune idée de ce que ça allait donner.  Le résultat?  À mettre entre toutes les mains!  C'est vraiment super bon!  Mais vraiment!  Le côté science-fiction de l'histoire est juste assez présent pour être dans le genre, mais absolument rien pour rebuter qui que ce soit qui ne serait pas fan.  Les deux personnages principaux, Seki et Myr, sont magnifiquement bien décrits.  Leurs choix face à l'occupation sont aux opposés, mais au fur et à mesure que le récit avance, ils s'éclairent et leurs motivations sont loin d'être aussi simples qu'il ne peut y paraître de prime abord.  Et toutes les deux feront face, chacune à leur façon, à des défis éthiques, qui les pousseront aux limites de ce en quoi elles croient, particulièrement Seki.  On a aussi droit à une démonstration magistrale du conflit que les gens ont face à l'oppression: ne rien faire?  Privilégier la paix à tout prix?  Prendre les armes?  On explore largement la question, mais pas de façon didactique, plutôt à travers les personnages et les choix qu'ils font.  Les personnages et leur portrait psychologique sont extrêmement bien maîtrisé.  Le reste?  Les scènes d'action?  La création d'un univers?  Hum, moins, mais sans que ça soit un défaut ou une tare: c'est un premier roman, voilà tout.  Le fond est là, et il est vraiment là, c'est juste que comme le bon vin, le développement d'un style et d'un écriture demande du temps... et de la pratique!  J'avais un peu l'impression de pouvoir transporter l'univers d'Averia dans n'importe quelle ville terrienne et les Tharisien n'était pas assez différents pour que je vois une césure marquée entre eux et les humains, même pas au niveau culturel.  Ils sont différents physiquement, mais c'est tout.  On aurait tout aussi bien pu voir un conflit inter-ethnique qu'un conflit entre deux espèces distinctes.  Les scènes d'actions étaient bonnes, mais il manquait cette petite étincelle d'électricité qui fait que l'on est littéralement emporté dans le texte et que l'on oublie l'heure, le lieu et la date où on est pour être totalement plongé dans un autre univers.  Imparfait donc pour ces petits détails, mais ça ne nuisait pas vraiment à l'histoire et pas à l'intrigue non plus.  En fait, je ne suis pas inquiète pour l'avenir de cette série, parce que l'os, la psychologie des personnages est hyper-solide.  Reste à l'habiller d'un peu plus de chair musclée et le tour sera joué!

Ma note: 4.5/5

Je remercie les éditions Ada et plus particulièrement Martin pour ce service de presse. (Gros bec sur les deux joues sur ce coup-là Martin!)

lundi 9 avril 2012

Ouais, j'aurais pas parlé de ce livre-là comme ça moi...

Salut!

Je me rappelle très clairement la scène.  En bonne groupie d'écrivain, je fais mon petit tour dans un salon du livre et croise une auteure de ma connaissance en dédicace.  Je m'arrête pour piquer un brin de jasette, question de profiter de l'occasion.  Se pointe un client.  J'entends l'auteure commencer à raconter son boniment de vente et dans ma tête de libraire, c'est comme un flash, ah non, pas comme ça!  Incapable de résister (et malgré le fait que j'étais en congé!), je ne peux m'empêcher de plonger dans la mêlée.  Et mon boniment mêlée à celui de l'auteure un peu surprise fait en sorte que le client passe à la caisse et revient faire dédicacer son livre, partie durant lequel je me suis bien évidemment tenue coite comme une carpe!

Sur le chemin du retour, j'ai eu largement le temps de repenser à la scène et surtout, de constater une chose très importante: un auteur et un libraire n'ont absolument pas la même façon de parler d'un livre.  Aucun rapport.  Un auteur va mettre l'accent sur l'histoire, les personnages, le contexte de l'intrigue, ce genre de choses.  Il ne peut pas dire que le livre est bon, c'est lui qui l'a écrit!  Pour vendre son livre, il doit utiliser des arguments très différents de ceux que moi je peux utiliser.  Moi, je suis avant tout une lectrice.  Une lectrice spécialisée dans les livres, mais une lectrice avant tout.  Alors si je dis à un acheteur potentiel que le livre est bon, il va me croire.  Si l'auteur lui disait la même chose, euh, ben il le prendrait pour un type qui se regarde beaucoup le nombril!  J'ai cette liberté.  Je peux dire qu'un livre est bon.  Et je ne me suis jamais gênée pour dire qu'un livre était pourri, alors les clients me font confiance. 

Autre différente: les adjectifs qualificatifs.  Je passe ma vie à les utiliser en prenant soin de les tourner à bon escient.  Je peux dire qu'un livre est stupéfiant, qu'une scène de combat est enlevante, qu'une écriture est superbe.  Un auteur ne peut pas faire ça.  Il doit se rabattre sur l'histoire, sur les personnages.  Personnellement, je ne sais pas si je serais capable de travailler avec ça.  Je suis habituée de travailler avec le texte que je n'ai pas produit et de pouvoir en parler librement.  Si c'était le mien...  Ben, je sais pas.  J'aurais sûrement du mal.  La marge de manoeuvre est beaucoup plus mince.  On ne dit pas pour rien que les auteurs ne sont pas les mieux placé pour parler de leur oeuvre.  C'est très vrai.  Ils sont limités par le fait que c'est leur oeuvre.  Ils ne peuvent pas la vanter aussi facilement que moi, je peux le faire.

Dans un tout autre Salon du livre, j'arrive à la table d'un auteur et quand je lui dit que je suis libraire, il me lance: «Tiens, ma nouvelle meilleure amie!».  Tant mieux si c'est le cas, du moins professionnellement.  Parce que mon boulot, c'est de vendre des livres, pas de les écrire.

@+ Prospéryne

dimanche 8 avril 2012

Joyeuse Pâques!

Et n'oubliez pas de lire un peu en mangeant votre lapin au chocolat!

@+ Prospéryne

vendredi 6 avril 2012

Une bande-annonce pour Clair-Obscur!

Salut!

Trouvé sur le net: La bande-annonce de la série Clair-Obscur de Kelley Armstrong.  Pour ceux qui ne connaissent pas, c'est lié à la série Pouvoirs obscurs sur lequel j'avais tant trippé l'été dernier.  Même univers, mais personnages différents et à ce qu'il paraît, les deux vont se rejoindre à la fin de cette trilogie.  Bien hâte de voir ça.  Annoncé au Québec pour mai, je vous offre la bande-annonce!

 @+ Prospéryne

P.S.  C'est moi, ou on a déjà vu ce gars dans plein de bande-annonce de livres?

jeudi 5 avril 2012

Les truites à mains nues de Charles Bolduc

Les truites à mains nues  Charles Bolduc  Leméac  138 pages

Résumé:
Trente textes courts, drôles, fantastiques, glauques ou ordinaires pour raconter le temps qui passe, la vie qui avance et qui nous use, un peu à chaque jour.

Mon avis:
Méfiez-vous de ce recueil!  Tous les textes (des nouvelles?  J'en sais fichtre rien!) commencent d'une façon et soudain, tout part de travers, on tombe dans la folie, dans le fantastique, l'humanisme ou encore l'irréaliste.  C'est très bien écrit, chaque mot est soigneusement choisi et l'ensemble, malgré son effet disparate tient parfaitement bien la route.  Le premier et le dernier texte m'ont particulièrement plus, leur réflexion sur la vie montrait une belle profondeur, pourtant sur des choses du simple quotidien. L'auteur donne le nom de texticules à ses micro-oeuvres, mais bon, j'ai du mal avec le terme, surtout que prononcé vite, on pourrait avoir tendance à prendre le mot comme s'il avait un s à la place du x (lapsus que j'ai fait à ma première lecture...)  C'est plein de profondeur, ça parle du couple, du sexe, de la création, de l'ordinaire.  Rien de neuf dans les sujets, mais c'est bien traité.  Et très bien écrit.

Ma note: 4/5

Je remercie Leméac/Actes sud et plus particulièrement Josée pour ce service de presse.

mercredi 4 avril 2012

Les jours de pluie...

Salut!

Je suis à l'inverse de bien des gens pour beaucoup de chose, mais autant j'aime bien une journée ensoleillée (pas trop chaude on s'entend), autant j'aime les jours de pluie.  La pluie a cette capacité de faire glisser sur les choses un aura de brouillard.  On ne voit pas les choses de la même façon.  On s'en protège souvent, mais on la regarde avec étonnement même si on l'a vu cent fois.  Le miracle de la pluie, c'est le miracle de gommer l'ordinaire pour faire jaillir l'extraordinaire.  Parce que la pluie efface les angles, adoucit les contours et en même temps, nous enferme à l'intérieur pour contempler le dehors.  Ya rien de mieux que les jours de pluie pour lire.

Pensez-y!  Les sons sont étouffés, les gens à l'intérieur, on est tournée vers soi, plus que les jours de soleil où tout est prétexte à sortir dehors et avec raison.  Les jours de pluie, on prend souvent le temps de faire plein de choses qu'on a pas le temps de faire d'ordinaire parce qu'on est tournée vers l'intérieur, vers soi.  La lecture correspond à un de ses états.  Le lendemain des jours de pluie, qui ne dit pas qu'étant donné qu'il n'avait rien à faire, il a lu?  N'est-ce pas?  Pensez-y bien, on a souvent tendance à se mettre un bon livre sous la dent les jours de pluie, disant que c'est trop ennuyant pour faire autre chose.  Merdouille, la pluie ne vous empêche pas de récurer votre bain ou de faire la vaisselle, de peinturer, de refaire des murs ou même de déménager des meubles d'une pièce à l'autre.  Tant que vous ne mettez pas un orteil dehors, tout baigne.  Mais c'est justement dans cet évitement de l'extérieur que l'on retrouve tous les avantages de la pluie.  On reste en dedans, on peut y faire plein de choses.

En fait, c'est l'absence de lumière vive et la monotonie des gouttes de pluie qui tombent qui transforme les jours de pluie en des moments de réflexion.  Mais de la lumière, il en reste assez pour lire non?  Alors, laissez votre moral aux chaussettes dans un coin humide la pièce, emmitouflez-vous dans une couverture moelleuse et prenez un bon livre dans vos mains.  Et oublier la pluie pour aller fouler le sol de Mars, chevaucher auprès des grands rois de France ou encore vous régaler des aventures d'une fashionatas dont vous ne possédez pas la limite de crédit!

@+ Prospéryne

mardi 3 avril 2012

La joueuse de go de Shan Sa

La joueuse de go  Shan Sa  Folio  Gallimard  325 pages

Résumé:
Une ville de la Mandchourie, les années 1930, pendant l'occupation japonaise.  Une jeune fille, sur la place de la ville joue au go.  Elle y bât tous ses prétendants.  Elle ignore que son prochain adversaire est un Japonais, tout entier dévoué à l'impérialisme japonais, dur comme le fer et aussi douée qu'elle sur le damier.

Critique:
À l'origine, Shan Sa était une poétesse, ça transparaît dans le livre.  Même les passages en prose sont soigneusement travaillés et si on lit attentivement, on y trouve le rythme de la poésie: des quatrains d'alexandrins bien souvent.  Seulement, ils sont placés selon une mise en page normale, donc, on ne voit pas ce fait et qu'on se laisse porter par l'écriture absolument sublime de Shan Sa.  On en oublie que sa langue maternelle est le mandarin, et non le français, tellement c'est bien écrit.  Ce roman est un plaisir de lecture au niveau de l'écriture.  Chose rarissime pour moi, j'ai même aimé les passages en poésie pure, sans doute que l'ambiance générale du roman a aidé, je les lisais en me régalant de leurs mots!  Pour ce qui est du récit, l'alternance entre les points de vues de l'étudiante et du soldat japonais (on ignore leurs noms), donne un ton étrange au livre.  Ils jouent une partie de go l'un contre l'autre, mais ne se connaissent pas.  Ils apprennent à s'aimer sans un mot, sans un son, grâce au go.  Un jeu subtil, encore plus stratégique que notre jeu d'échec.  On sent bien la tension, la stratégie, la mise en oeuvre de celle-ci sur le damier entre les deux personnages qui entament un chassé-croisé.  Ils ne se rencontrent qu'à la moitié du livre, mais pour autant, on sent déjà leur rencontre au départ.  Ils sont aux antipodes l'un de l'autre et pourtant, ils ont en commun le go et la façon de penser qu'il crée.  Les événements se succéderont entre eux, mais entre leurs parties, ils ont tous les deux leurs vies.  Elle sera trahit par son amour, qui ne voulait d'elle que le sexe et se fera avorter clandestinement.  Lui, tout entier dévoué à l'idéologie impérialiste, en constatera les applications réelles et ce que cela cause.  On ne cache rien des exactions des japonais en Mandchourie, mais on montre que la vie presque normale était quand même possible.  La révolution, la même qui balaiera la Chine au grand complet quelque années plus tard à peine, montre déjà ses revers horribles.  J'ai adoré ce livre, mais la fin est d'une telle tristesse que j'ai posé le livre avec le coeur lourd, mais pas d'avoir fini une bonne histoire, non, j'aurais aimé une autre fin.  Comme si la vie ne pouvait que finir d'une façon tragique, ce avec quoi je suis en désaccord.

Ma note: 4.25/5

lundi 2 avril 2012

L'auteur et son imaginaire

Salut!

Souvent, quand je mets un livre de Patrick Senécal dans les mains de mes clients, ils me jettent un petit coup d'oeil par en-dessous et me lancent: «Il doit vraiment être bizarre ce type non?».  Euh non.  À chaque fois que j'ai eu le plaisir de le rencontrer, il m'a fait l'effet d'un type parfaitement normal, amateur de trucs sombres certes, mais pour le reste, tout ce qu'il y a de plus ordinaire.  À moins que comme beaucoup de ses personnages, il ne cache sa vraie nature sous les apparences de la normalité.  Mais là... Va savoir!  En tout cas, j'ai jamais entendu parler de tueur en série sanguinaire dans le bout de Drummondville...

N'empêche, on dirait que ça fascine les gens les écrivains d'horreur.  On pense que ce qu'ils écrivent est leur vie, ou du moins, leurs fantasmes de vie.  Euh...  À mon sens, c'est négliger la part absolument fondamentale qu'occupe l'imaginaire dans la création artistique.  De la même façon dont les auteurs d'horreur écrivent des trucs qu'ils ne feraient absolument jamais dans leur vie quotidienne, les auteurs de romans d'amour se servent de leur imagination pour créer des histoires romantiques.  Cependant, je ne pense pas que Nora Roberts ou Barbara Cartland, pour ne citer que celles-là soient tombées des milliers de fois en amour.  C'est pourtant le nombre approximatif de romans qu'elles ont respectivement écrit.  On ne se pose pas la question à savoir si elles ont eu ce genre de vie amoureuse.  Elles ont pourtant utilisé le même outil que les auteurs d'horreur: leur imaginaire.  La différence?  Ce qui les fascine, ce n'est pas l'amour, mais l'horreur, ce petit frisson de terreur qui courre le long de la colonne vertébrale et qui met tous nos sens en éveil tandis que la terreur se répand dans nos veines.

La plupart des auteurs que je connais qui écrivent de l'horreur (peu nombreux, je dois l'avouer), sont des gens débordants d'humour, bien souvent en couple, plein de vie, adorant la bonne bière, les discussions à bâtons rompues et personne ne jurerait en les voyant dans la rue qu'ils ont en train d'imaginer la scène de dépeçage de leur prochain roman.  Parce que c'est leur imaginaire qui est en activité, pas la réalité.  Par contre, ce qui les fascine, c'est justement ça, le petit frisson de l'horreur et la peur.  Les fascine, les fait vibrer, leur fait peur.  C'est le même principe pour les auteurs de romans érotiques, la sexualité les fascine, alors ils écrivent dessus, laissant le soin à leur imaginaire de créer des trucs qu'ils ne vivraient sans doute pas dans leur vie quotidienne.  L'art, c'est utiliser la fiction pour poser des questions, atteindre un idéal, comprendre d'une autre façon la réalité.  Et à travers leurs oeuvres, nombreux sont les lecteurs qui exorcisent leurs peurs.

Bon, maintenant que cela est dit... je n'ai pratiquement jamais lu de Patrick Senécal.  Il ne me fiche pas la trouille, mais ses livres, si!

@+ Prospéryne

dimanche 1 avril 2012

1er avril: Poisson-Livre!

Pour les amateurs de lectures aquatiques!

Source: flepi.net
Bon Poisson d'avril!

@+ Prospéryne