jeudi 31 décembre 2020

Bilan culturel 2020

 Salut!

2020 arrive (enfin!) à son terme et ce n'est pas parce que cette année aura été hors-norme que je ne vais pas AU MOINS avoir fait une chose normale cette année, soit faire mon traditionnel bilan culturel 2020.

Livres:

J'ai lu 37 livres en 2020.  Moins que je ne m'y attendais avec la pandémie, mais bon, elle m'a enlevé de la capacité de concentration à certains moments.

Donc, j'ai lu durant l'année:

57% d'hommes et 43% de femmes (la seule auteur non-binaire que j'ai lu faisait partie d'un collectif)

83% d'auteur.e.s blancs et 17% d'auteur.e.s racisés (et ce malgré mes efforts pour lire plus d'auteur.e.s de la diversité!)

32% d'auteur.e.s québécois, 62% d'auteur.e.s étrangers et 6% d'auteur.e.s autochtones (encore une fois malgré mes efforts pour la diversité!)

Et sans surprise, une grande majorité d'auteur.e.s hétéro, soit 94%, le 6% représentant ceux qui s'identifiait autrement. 

Fait à noter, 18 des auteur.e.s que j'ai lu cette année était des découvertes pour moi, soit près de la moitié.  Les belles découvertes de l'année sont Edith Wharton, Lori SAint-Mrtin et Mary Shelley.

Les coups de coeur officiels de 2020 Toronto 2033 (Collectif) et le superbe Pour qui je me prends de Lori Saint-Martin (à lire, vraiment!)

Dans les autres marquants, je note le bouleversant Le consentement de Vanessa Springora, le tout aussi bouleversant Cheval Indien de Richard Wagamese, le bref, mais ciselé Les lettres d'Edith Wharton et le fascinant Sapiens de Yuval Noah Harrari.  

Ah oui et nouveautés de 2020, je me suis mise à l'anglais.  Je m'étais donnée comme défi de lire un livre par mois dans la langue de Shakespeare, mais j'en aie lu 7 au final.  On continuera à lire en 2021, mon bon vieux Robert & Collins 1995 bilingue n'a pas finit de me livrer ses secrets!

Théâtre et spectacles:

Évidemment, cette année a été plus que maigre de ce côté...  Le théâtre me manque, j'avoue.

Zoé d'Andréane Roy au Denise-Pelletier: Pièce centrée sur le débat entre un professeur de philosophie et son unique étudiante qui force le cégep à lui donner ses cours malgré un mandat de grève des autres étudiants.  Un peu verbeux, mais qui pose d'excellentes questions.

Les trois autres pièces que je devais aller voir au printemps ont bien entendu été annulée :(

Au bout de ta langue de David Goudreault, théatre Outremont: Vu en virtuel, mais quand même été soufflée par ce spectacle.  Je le recommande à tout le monde!

Musées:

Paris au temps du post-impressionnisme: Signac et les indépendants au MBAM: Ma seule exposition de 2020, masquée et à deux mètres de tout le monde.  Mais elle en a valu la peine, entre autre pour la découverte de Maximilien Luce, un peintre dont j'ignorais l'existence, malgré mon amour pour les impressionnistes!

Cinéma:

Année quand même relativement faste, pour la pas si cinéphile que je suis.  J'ai mis entre parenthèse la plateforme de diffusion.

Kuessipan de Myriam Verreault (vu en salle): Ma seule sortie de 2020 au cinéma!  Et je suis heureuse d'avoir vu ce film au grand écran.  L'histoire d'amitié entre deux meilleures amies, issues du peuple innu, l'une voulant s'envoler et donc quitter la réserve, l'autre incapable de quitter sa propre situation présente.  Un véritable bijoux que je recommande chaudement à tout le monde!

Portrait de la jeune fille en feu de Célia Sciamma (Cineplex): Un film français, donc au rythme lent, mais qui questionne le regard porté sur le corps de la femme et qui force à regarder autrement, parce qu'ici... l'artiste qui regarde est une femme et elle aussi, est regardée.

Une colonie de Geneviève Dulude-De Celles (Viméo): Un film qui raconte l'amitié entre une jeune québécoise timide et celui qui deviendra son meilleur ami, un jeune abénaquis de la réserve toute proche, dont elle ignore tout.  Un film qui questionne avec intelligence les rapports entre les québécois et les Premières Nations.

Enola Holmes de Harry Bradbeer (Netflix): Sherlock Holmes a une petite soeur... et une mère suffragette.  Voilà de quoi troubler bien des fans du fameux détective, d'autant plus que le gène de la résolution d'intrigue semble commun à tous les Holmes!  Un film à regarder avec un pop corn ceci dit, ce n'est pas un grand film.

Mary Shelley d'Haïfaa al-Mansour (Crave): L'auteure de Frankenstein a elle-même une histoire passionnante.  Cela reste un biopic assez classique, mais l'histoire elle-même vaut le détour!

Spiderman: Far from home de Jon Watts (Crave): Je suis maintenant à jour dans l'univers de Marvel, mais je n'ai pas été impressionnée par cet opus.  Ceci dit, Tom Holland fait un très bon Spiderman.

The favorite de Yorgos Lanthimos (Crave): Triangle amoureux à la cours de la reine Anne.  Triangle entre trois femmes...  La monarchie britannique est ici représentée dans une époque qui a été peu transposée à l'écran et d'une façon presque totalement inédite.  Avec trois actrices au sommet de leur art!

Mulan de Nikki Carro (Disney+): Hum... Je vais rester une fidèle de la version de 1998.  Y'a pas grand chose qui sauve ce film, qui est presque un ratage complet.  Joli ratage, mais c'est tout.

Télévision:

Ok, 2020 marque l'année de l'arrivée du streaming dans ma vie...  Je sais, je suis en retard de dix ans sur pas mal de monde, mais tant pis, j'apprécie d'autant plus l'immensité de l'univers qui vient de s'ouvrir devant moi!

Doctor Who (Crave) saison 8 à 12

Passé au travers de Peter Capaldi (que j'ai moins aimé) et arrivée à Jodie Whittaker.  Un peu trop dans ta face sur les questions sociales dans sa première saison, ça s'améliore dans la deuxième, mais j'aime bien Whittaker qui fait un très bon Docteur.  Ceci dit, je m'ennuie de la qualité des scénarios de Tennant et de Smith.

The Witcher (Netflix) Saison 1:

On va résumé par: il y avait trop d'eau dans le bain à l'épisode 5...  Pour le reste, correct, sans être épique.  Les costumes et les décors ne font pas tout.  Et grmfff ne doit pas être considéré comme une ligne de dialogue digne de ce nom.

Star Trek: Picard: (Crave) Saison 1: Capitaine Picard est de retour!  Mais le monde a changé, lui et Picard devra affronter de jeunes ennemis...  Beaucoup de caméo de TNG, pour les nostalgiques, c'est bien.

The floor is lava: (Netflix):  Il y a des moments dans la vie où on a vraiment besoin de stimulation intellectuelle...

How I met your mother: (Netflix) Saison 1:  Ok, je suis 15 ans en retard, mais que c'est drôle cette série!

Altered Carbon: (Netflix) Saison 2: Beaucoup moins aimé que la saison 1, les enjeux de la décorporation sont beaucoup moins abordés et ça a nuit à l'intrigue.

The Crown: (Netflix) Saison 4:  Je me suis bien évidemment pitchée dessus.  Absence de fil rouge, comme pour la saison 3, mais une performances remarquable de la part de l'actrice qui interprète Diana.

His dark materials: (Crave) Saison 2: Suivre cette série a représenté autant de pics de sérotonine!

Bridgerton: (Netflix) Saison 1: Jane Austen version diversité.  Ok, on le sait à l'épisode un qu'ils vont finir ensemble, mais on est quand même scotchée!

Lovecraft Country: (Crave): Saison 1:  Bizarre, surprenant, dérangeant, déroutant.  Attention, les deux premiers épisodes nous mettent sur une piste qui n'est pas entièrement suivie ensuite et il faut l'accepter.  Rarement vue des dénonciations aussi directes du racisme, du sexisme et de la masculinité toxique sans l'effet dans ta face qui en efface souvent la puissance.

Balados:

Parce que je suis une consommatrice compulsive de ce médias et que mine de rien, la quantité de balados que j'écoute fini par représenter une partie importante de ma consommation culturelle, je fais ici une petite liste de tout ce que j'ai écouté en 2020.  Oui, j'ai écouté beaucoup, beaucoup, beaucoup de balados durant le confinement...

Dans la catégorie, y'a des saisons dans cette balado:

Slow Burn (A) (Slate) Saison 1, Watergate et Saison 2, l'Impeachment de Bill Clinton et Saison 4, David Duke:  Des saisons qui explorent à fond un sujet.  Super intéressant, qui fait réfléchir et qui donne la parole à des acteurs méconnus de ces histoires archi-connues.  Si bien que ça? Non, les détails font réfléchir...

Magic Lessons d'Elizabeth Gilbert Saison 1 et 2:  Grosso modo Elizabeth Gilbert (Mange, Prie, Aime), rencontre des personnes ayant des blocages créatifs, demande conseil à un «expert», souvent un artiste établi et fait un retour avec la personne.  C'est bien, y'a un côté un peu ésotéro-matante, mais c'est intéressant quand même.

The secret life of Canada (A) (CBC):  J'ai décroché à la saison 3, mais c'est intéressant.  L'histoire des Premières Nations, des innombrables communautés immigrantes au Canada, souvent des histoires méconnues et beaucoup trop souvent, de discrimination.  Raison du décrochage? Si vous êtes québécois, bien des moments vont vous faire grincer des dents.

Ma version des faits (F) (Radio-Canada) Saison 3, Agostino Ferreira, Saison 4, Le méga-procès des Hells  Cette balado à saveur judiciaire est juste trop addictive.  Isabelle Richer nous amène dans l'histoire de procès qui ont marqué le Québec, mais dans sa version des faits à elle, car elle les a couvert comme journaliste judiciaire.  Et c'est vraiment intéressant.

Francophiles dans la ville: (F) (Culture Montréal) Saison 1 et 2: Faire voir Montréal par les yeux de gens qui n'ont pas le français comme langue première et leur relation avec la ville par des lieux qui les ont marqués.  Super intéressant.

Procrastination: (F) (Elbakin.net): Saison 1 à 3: Trois auteurs français qui discutent d'écriture, d'édition, de la vie d'auteur et de publication.  À coup de 15 minutes.  C'est très intéressant, mais ça s'essouffle un brin sur le long terme.

Les pires moments de l'histoire: (F) (Urbania): Saison 3: Charles Beauchêne raconte les pires moments de l'humanité, mais nous fait tellement rigoler au travers qu'on en oublie que ce sont avant tout des histoires d'horreur.

L'histoire ne s'arrête pas là: (F) Saison 3: Des moments moins connus de l'histoire du Québec.  Raconté avec brio par André Martineau qui mêle petits et grandes histoires et nous rend le tout accessible.

David Tennant does a podcast: (A) Saison 1: Écouté en grande partie parce que l'acteur a déjà été le Docteur, mais j'avoue qu'il a le don de faire parler les gens et comme il est lui-même acteur, il arrive à faire parler ses invités (acteurs et actrices, politiciens, etc) et à créer un vrai lien avec eux le temps de l'entrevue.

Dans la catégorie, c'est une série unique:

Rabbit Hole (A) (The New York Times): Pourquoi et comment YouTube est devenu ce trou du lapin où sombrent tant de personnes et où les théories de la conspiration sont reines.  Terrifiant.

1619 (A) (The New York Times): 1619 est la date de l'arrivée des premiers esclaves noirs sur le territoire de ce qui deviendra les États-Unis.  Cette balado retrace l'histoire de la présence des Noirs sur leur territoire, des relations raciales et leur place (ou absence de place) dans le grand récit de la nation.

The catch and kill (A) (Pineapple production):   Une balado tirée du livre (sans être un audio-livre) qui raconte l'enquête de Ronan Farrow ayant mené à la chute d'Harvey Weinstein et croyez-moi, cette histoire a bien failli ne pas sortir.  Les réseaux de pouvoir de cet ex-producteur étaient déments.  Je ne sais pas si c'est un true crime, mais c'est aussi addictif. 

3.7 planètes (F) (Radio-Canada):  L'humoriste François Bellefeuille veut développer un numéro d'humour sur l'environnement et en profite au passage pour explorer un peu son empreinte écologique.  Drôle et fait réfléchir.

Trafic (F) (Pic-Bois productions):  Le trafic sexuel des adolescentes, ici, aujourd'hui, au Québec.  Combien les clients sont dans le déni et combien cette industrie est juste sous notre nez, fait des ravages et pourtant passent inaperçue.  Ça donne des frissons d'horreur.  

Briser le code (F) (Télé-Québec): Le témoignage de personnes immigrantes.  Ça parle de racisme, mais aussi d'intégration et de transmission.  De très beaux témoignages que l'on a pas assez la chance d'entendre, trop souvent. 

The Queen: (A) (Slate): Sur l'histoire personnelle de la femme à l'origine du mythe de la Welfare Queen.  Une femme noire, bien sûre.  C'était une criminelle, mais à entendre son histoire complète, on ne la juge pas si sévèrement.  Aurais-tu vraiment pris de meilleures décisions à sa place?  Et son histoire n'a-t-elle pas avant tout été instrumentalisée?

Recall: How to start a revolution: (A) (CBC): L'histoire du FLQ, racontée par les journalistes de la CBC.  J'avais beaucoup de craintes en commençant cette série, mais non, le travail journalistique de la CBC a été très bien fait, pas de Québec bashing et beaucoup de pédagogie.  Sincèrement, j'ai appris des choses et j'ai adoré cette série.

Dans la catégorie, il en sort en continu: (et je ne les mets pas toutes!)

The Daily (A) (The New York Times):  Balado quotidienne sur l'actualité par le New York Times.  Intéressant de connaître le point de vue des USA de l'intérieur sur certains enjeux.

Myths & legends: (A): Les mythes et légendes racontées dans leur version d'origine.  Le hic, c'est que le poditeur, en plus de très bien raconter, se permet des commentaires sur les incohérences des histoires et sur le sexisme de certaines.  Ça s'écoute super bien!

Cabinet of curiosities: (A): De courtes balados sur des histoires insolites.  Des fois, j'ai des doutes sur la véracité, mais autrement, le poditeur a le don de trouver des anecdotes sur une grand variété de sujets, dévoilant parfois des facettes moins connues de certaines personnalités.

Thrilling Tales of modern capitalism: (A) (Slate): L'histoire de grandes entreprises avec leurs hauts et souvent aussi, leurs bas.  De quoi défaire quelques mythes!

Washington DC: (F) (Radio-Canada et al): Balado qui couvre l'actualité des États-Unis par les journalistes des réseaux publics francophones.

L'histoire nous le dira: (F) (Laurent Turcot): Courtes capsules historiques issues de YouTube qui couvrent un grand nombre de sujets.  

On s'appelle et on déjeune: (F) (Radio-Canada): Deux nutritionnistes, Bertrand Lavallée et Catherine Lefebvre, qui jasent d'alimentation à bâtons rompus, sans chichi, sans flafla.  Rafraichissant et instructif!

Ideas: (A) (CBC): Émission par thématique qui réfléchit sur de grands enjeux.  Ça va de l'histoire de la chaise à l'impact d'Einstein sur la vision du monde des humains.  Et c'est toujours intéressant.

Et y'a plusieurs émissions de radio, mais je vais arrêter ça là.

Inclassables:

Je mets ici les trucs inclassables dans les autres catégories, mais ils ne sont pas si bizarres que ça, ils ne rentraient juste pas dans les moules du reste.

MasterClass:

Neil Gaiman: J'ai eu la chance de l'écouter avec une amie et on arrêtait la vidéo pour prendre des notes et faire wow.  Le gars est pertinent, articulé et vraiment intéressant à écouter.

Margaret Atwood: Tout aussi intéressant, mais dans un tout autre registre.  J'ai enfin compris pourquoi elle dit qu'elle n'écrit pas de la SF (même si elle écrit de la SF)

Joyce Carol Oates: Variation sur le même thème, mais elle est vraiment différente dans son approche.  Aussi intéressante, mais moins prenante.

Gordon Ramsay: Ne cherchez pas le lien avec les trois autres MasterClass, y'en a pas.  Classe très intéressante, Gordon Ramsay est très bon pédagogue, mais je comprends que son style puisse rebuter certaines personnes.

YouTube:

DirtyBiology:

Je suis assidûment ce youtubeur depuis des années et en 2020, il est resté aussi intéressant et pertinent, même s'il a dû faire des pieds et des mains avec le confinement.

Bon et bien, maintenant, Bye, Bye 2020 sans le moindre regret et bienvenue 2021!|

@+ Mariane

lundi 28 décembre 2020

De la géographie: La ville

 Salut,

Nous voici donc rendu au dernier billet de cette série qui aura animé la plus grande partie de l'année 2020.  Je me suis rendue plus loin que ce que j'avais pensé au départ et je remercie tous ceux qui m'en ont parlé, tant ici qu'ailleurs.  Pour conclure, je vais m'intéresser à un dernier sujet, qui est aussi le territoire humain ultime: la ville.

Une ville, peu importe l'endroit où elle est située, est un territoire lui-même constitué de territoires, mais la grande différence avec les territoires naturels est que tout est constitué de volontés directes et indirectes issues d'êtres humains.  La nature s'accommode fort bien des imperfections et des obstacles.  Elle en fait des opportunités et s'adapte.  L'eau ne coule pas ici?  La rivière creusera son lit, au travers de la roche s'il le faut.  Et si elle ne peut pas passer là, elle passera ailleurs.  Si quelque chose change dans son environnement immédiat, elle s'adapte.  La rivière ne coule plus ici?  Des arbres y poussent, tout simplement et l'ensemble tend à s'équilibrer de lui-même.  De plus, la nature n'a pas de but comme tel, elle fait avec ce qui est et s'adapte.  Certes, rivières et fleuves transforment le paysage, mais c'est plus les lois de la physique qu'autre chose qui les animent.  Certains animaux, comme les castors, vont transformer leur environnement, mais leur impact est limité à un espace restreint.

La ville est totalement l'inverse.  En ville, pratiquement chaque centimètre de surface a été pensé, voulu, et est soigneusement entretenu.  Les routes, les parcs, les belles années gazonnées, les réseaux de distribution d'électricité, d'eau, d'égouts, les pistes cyclables, les bâtiments, mais aussi, sur un plan plus subtil, les tracés dans la ville, les services publics, les résidences privées et les immeubles commerciaux encerclent des zones qui deviennent ainsi artificiellement exclues de l'ensemble et le principe de propriété privée crée une série de sous-territoires techniquement liés, mais mus par des volontés séparées.  Et surtout, le territoire, au niveau écologique est totalement chamboulé.

La ville est voulue, conçue et pensée par et pour les êtres humains.  La rage que l'on met à arracher les pissenlits sur les pelouses se retrouve ailleurs: on ne tolère pas certaines espèces d'arbres, certaines espèces de plantes, on en favorise d'autres à outrance, même si elles sont mésadaptées.  Pas étonnant que les villes soient si peu résilientes face aux catastrophes naturelles: là où des milliers d'années d'évolutions avaient prévu des milieux humides et des marais face aux inondations et aux ouragans, la ville a imposé des surfaces bétonnées et de magnifiques boulevards dépourvus d'arbres permettant aux vents de prendre de la vitesse.  Mais on adore les pelouses vertes...  Obsession humaine de tout contrôler.

Même dans les villes plus anarchiques, où l'urbanisme sauvage règne, l'humain continue de faire primer ses besoins sur ceux du territoire environnant, quitte à sacrifier espèces et terrains, s'exposant à des catastrophes si le climat varie un peu plus que la moyenne.  Les glissements de terrain ne sont qu'un modeste exemple: sol gorgé d'eau ou construit en hauteur + vibrations (que ce soit une route très passante ou un tremblement de terre) = catastrophe.  Mais les humains ne voient souvent que leurs besoins à court terme et rarement ceux à long terme.  La nature s'adapte sur le long terme, l'humanité peut faire surgir de terre des villes en quelques mois.  Dans certaines parties du monde, les contraintes du climat ont forcés les villes à s'adapter à des climats très différents, avec plus ou moins de succès: qui n'a jamais pesté comme le déneigement dans sa ville au Québec?  Surtout que l'on découvre souvent après coup des contraintes inattendues après que le béton soit sec.  Ainsi les villes sont chroniquement en retard dans l'organisation du développement de leur territoire par rapport au développement réel de celle-ci.

Je vais conclure par un exemple relevant de la fiction qui me semble des plus faciles, mais qui reste parlant: Coruscant, la capitale, ville-planète de l'univers de Star Wars.  Évidemment, les films ne nous rendent pas entièrement compte de cette ville, mais on peut déjà en détacher quelques grandes tendances: la ville-planète est entièrement contrôlée, domptée, planifiée.  Pas de traces d'espaces verts ou simplement de zones où une main (humaine ou non) n'aurait pas imposé sa volonté.  L'espace est entièrement contrôlé et les cycles naturels, absents.  L'omniprésence des embouteillages en arrière-plan (et dont Anakin semble se foutre comme de l'an quarante) montre toutefois que les problématiques urbaines restent les mêmes: on a beau être sur une ville-planète, la volonté de contrôle de l'environnement reste la même, mais les problématiques qui peuvent en émerger restent semblables étant donné que le problème à la base est que l'humain cherche à transformer son environnement pour correspondre à ses besoins et non de s'adapter à ce qui existe.  L'échelle est différente, mais l'effet est le même: les cycles naturels sont détournés au mieux et détraqués au pire afin de permettre le contrôle du territoire par les humains.  Avec toutes les conséquences que cela suppose.

Voilà donc ce qui permet de compléter ma série de billets sur la géographie.  Merci d'avoir été à l'écouter et au plaisir de bloguer sur autre chose en 2021!

@+ Mariane

lundi 21 décembre 2020

Éjecter l'auteur(e) de l'oeuvre

 Salut,

À la lumière de quelques controverses qui ont secoué les fandoms en 2020 (vous avez entendu parler des tweets d'une certaine J.K. Rowling?), quelques phrases sont revenus souvent: «L'oeuvre appartient au fandom», «On a plus besoin de l'auteur(e)» et autres phrases types du même acabit.  Ces petites phrases m'ont toujours fait sourciller.  Bon, pas besoin de me le dire, je le sais, l'oeuvre, n'est pas la personne qui l'a écrite et la personne qui l'a écrite n'est pas l'oeuvre.

C'est cette notion que l'on peut éjecter un créateur de son oeuvre qui me chicote bien plus.  La formulation en tout cas.  C'est une question qui a tourné un bout de temps dans la roue de mon hamster.  Comment expliquer mon malaise?  Comment mettre des mots dessus?  J'ai abordé le sujet avec quelques amis, mais sans réussir à vraiment comprendre ce qui me dérangeait tant.

Et puis, j'ai repensé à un livre, que j'ai lu il y a quelques années, Comme par magie d'Élisabeth Gilbert, l'auteure de Mange, Prie, Aime.  Elle racontait au début comment elle avait vécu le succès de son désormais célèbre livre.  Elle faisait une comparaison avec une baleine qu'elle avait vue dans un musée alors qu'elle était enfant.  La baleine était au-dessus d'elle, elle la regardait et...  c'était quelque chose qu'elle regardait sans pouvoir y prendre part.  C'était juste là, bien trop gros pour elle.  Elle comparait avec son oeuvre, en disant que le phénomène avait lentement augmenté qu'il était devenu une baleine au-dessus d'elle, sans grand rapport avec elle, que c'était juste là, et qu'il n'y pouvait plus grand-chose.  Bien sûr la partie promotion lui appartenait, la partie publique, le visage de tout cela était le sien, mais le lien intime entre les lecteurs et lectrices et le livre, l'énergie que cela leur donnait de se mettre à en parler avec leurs ami.e.s, de voyager partout,  de se bourrer la fraise de mets italiens et de prendre des cours de yoga... ne lui appartenait pas.

C'est un peu la même chose quand on pense à tous ces fandoms qui ont fleuris avec l'arrivée d'internet.  L'énergie que les fans mettent à lire avec frénésie, à se costumer comme les personnages, à guetter la moindre information issue de leur univers, à écrire des fanfictions est issue de l'oeuvre.   C'est là que je tique.  Oui, une partie des fans vont tripper sur ça et n'iront pas plus loin.  Je suis dans cette catégorie.  D'autres iront plus ou moins loin, du mordu expert fan des moindres détails de l'univers à celui qui animera des forums de discussions, en passant par celui qui se fera tatouer les personnages ou des citations...  Est-ce l'oeuvre comme tel?  Je crois que rendu à ce point, l'auteur.e est déjà rendu loin.  Il ou elle est la personne qui peut apporter de l'eau à un moulin qui tourne déjà à vive allure, mais les fans ont déjà créé leur propre univers à partir de celui déjà créé.  Ils se le sont approprié.

Dans ce genre de fandom, l'auteur.e est comme une figure tutélaire, dont la parole est écoutée à des degrés divers, qui vont du respect poli à l'adulation pure et simple, ce dernier statut était encore plus facilement accessible si l'auteur.e est mort.e.  Sauf que comme toute construction humaine, le moteur qui fait rouler est fait de la foule en marche, pas d'un individu.  Et que si un individu peut mener la marche, quand la foule décide de ne plus suivre ses instructions et ben, il est rendu à son statut de quidam. C'est un peu ça quand on parle d'éjecter un.e auteur.e d'une oeuvre: la foule décide de suivre son chemin ailleurs, emportant avec elle un univers qu'il s'est complètement approprié et dont l'auteur.e était une des sources, la plus importante, la plus ancienne, mais qui n'était déjà plus nécessaire pour que le moulin continue à tourner.

C'est un peu comme bien de grandes institutions humaines, il arrive un point où la roue tourne d'elle-même.  C'est un phénomène qui s'est avéré autant avec de vieux principes, comme les religions ou les démocraties.  Dans ces cas-là aussi, la communauté a pris le pas sur l'impulsion d'individus qui l'on porté au départ.  La nouveauté, c'est que les oeuvres artistiques sont touchées par la même ferveur et se constituent, se renouvellent et s'alimentent par elles-mêmes.  

Dans un sens, quand on dit qu'un fandom n'a plus besoin d'un.e auteur.e, on ne fait que dire que le fandom refuse désormais d'écouter la source de son univers.  La séparation entre les deux avait de facto eu lieu longtemps avant.

@+ Mariane

lundi 14 décembre 2020

Trop, c'est comme pas assez

 Salut,

L'autre jour, je me suis assise dans l'idée de regarder la télé.  J'ai plongé dans l'univers de la télé en ligne, sautant d'une option à l'autre, ravie d'avoir accès à tant de choix... et incapable justement de faire un choix.  Cette série dont j'avais tant entendu parler?  Telle autre que je me promets de voir depuis longtemps?  Celle-ci que les algorithmes me suggèrent?  J'ai zappé un moment avant de choisir.  

C'est un peu comme ça quand vient le temps de choisir ma prochaine lecture.  J'ai plus de 300 livres que je n'ai pas encore lu à la maison.  C'est beaucoup.  Moins que de choix sur l'empire au N rouge, mais tout de même pas mal.  Et souvent, je zieute, soupesant les possibilités.  Lui? Ah non, je viens de finir un roman de SF, je ne veux pas en lire un deuxième d'affilée.  Lui?  Hum, sans doute trop sombre, j'ai pas envie de ça en ce moment.  Lui?  Pff, trop épais, ça va me prendre une éternité à le lire.  Lui? Ah oui, peut-être...  mais non, je devrais lire cet autre livre avant.  Je peux passer plusieurs minutes à sillonner des yeux mes tablettes, évaluant les bouquins les uns après les autres, les rejetant pour les raisons les plus diverses, avant de prendre l'heureux élu, qui parfois, est moins le fruit d'un goût immodéré pour le lire qu'un choix fait par l'élimination des autres possibilités.

Je me rappelle pourtant, qu'enfant, je lisais tout ce qui me tombait sous la main.  Oh, ce n'est pas tant que je n'avais pas de goût, mais les choix étaient plus limités.  Mes parents avaient tous les deux de petites bibliothèques et je pigeais dedans allègrement.  Aurais-je lu Pearl Buck si ma mère n'avait pas eu plusieurs de ses ouvrages dans la sienne?  Je me rappelle de ces romans à la couverture vieillotte, fleurant le papier dont on faisait les romans poches dans les années 50 et 60, craquant quand on l'ouvrait.  Je les lisais par intérêt certes, mais aussi parce que je n'avais pas tant d'autres choses à me mettre sous les yeux.  Le fait d'avoir peu de choix m'a poussé à lire des ouvrages que je n'aurais autrement pas lu, mais est-ce que je m'en portais plus mal?  Non et j'ai fait de très belles découvertes grâce à cette absence de choix.

Aujourd'hui, le problème est inverse et le rythme des publications étant ce qu'il est, on est inondé de livres, les parutions s'enchaînent et on est constamment bombardés de suggestions les plus alléchantes les unes que les autres.  On prend des notes, on achète, on entasse, mais on peine à garder vivante l'étincelle qui nous a allumé vers un titre en particulier.  Parce que justement, on est inondé.  Vais-je lire ce livre?  Bien sûr que je me le promets.  Mais la vie est ce qu'elle est et la seule chose qui n'est pas élastique, c'est le temps qu'on peut consacrer à la lecture.  En comparaison, les tablettes de nos bibliothèques sont bien plus souples.  

Trop, c'est comme pas assez dit le dicton.  On peut se perdre dans trop d'options, tout comme ne pas en avoir assez peut être une plaie.  Or, le problème du surplus, c'est qu'il peut paralyser, parce qu'il oblige à faire un choix et ainsi de renoncer à une option  Mais est-on vraiment sûr que l'on a fait le bon choix?  Va-t-on le regretter?  C'est ça le hic avec les surplus.  On en a tellement qu'un choix peut être regretté, parce que justement, pourquoi juste ce bouquin en particulier quand il y en a tant d'autres?

C'est une chose que je me dis souvent, en regardant les tablettes pleines de livres que j'ai achetés il y a des années et que je n'ai pas encore lus.

@+ Mariane

lundi 7 décembre 2020

De la géographie: Des liens entre les territoires et les humains

Salut!

La joke me fait encore rire même si ça fait des années que je l'ai entendu pour la première fois.  Un des vaillants premier colon français à venir s'installer ici, un brave originaire de Normandie, a construit sa maison selon la bonne vieille méthode ancestrale de par chez-lui.  Un modèle comme celui-ci:


À la première tempête, notre brave colon sort de chez lui et constate qu'une bonne couche de neige est tombée.  Il s'habille convenablement, franchit le seuil de sa demeure et à la mode de l'époque, tire la poignée en donnant un bon coup pour bien fermer la porte.  Résultat?  Toute la neige accumulée sur sa toiture lui est tombé sur la tête!  Voilà donc la raison pour laquelle les toits des maisons canadiennes ont cette forme si particulière, la pente du toit finissant en douceur vers la fin et s'arrêtant plus loin que la porte d'entrée.  Comme ceci.



Bon l'anecdote est peut-être fausse, mais n'empêche, la fameuse pente adoucie des toits canadiens est très présente sur notre territoire et oui, elle s'explique par une adaptation du modèle normand aux rigueurs de notre climat, particulièrement à la neige.

Ceci est bien évidemment tirée de notre territoire, mais ce genre d'anecdotes va se retrouver à travers l'ensemble des territoires habités par les humains.  Telle toiture sera plus solide pour supporter la neige ou plus étanche pour supporter la pluie.  Tel immeuble sera construit de façon à résister aux tremblements de terre et tel autre aux froids intenses.  Les routes seront larges et pavés ou étroites pour avoir le plus possible d'ombres et éviter que le soleil ne les réchauffent trop.  La densité de la population et les besoins de celles-ci expliquent aussi beaucoup de choses.

Parce que voilà, les humains ont besoin de se protéger du froid, du soleil, de la pluie et du vent, de manger et de boire de façon à peu près égale partout sur la planète.  Mais les ressources et les contraintes des territoires varient énormément.  D'où l'extraordinaire créativité des humains pour tirer le maximum de leur territoire.  Et comme les ressources sur un territoire sont communes, les connaissances et les compétences finissent par se transférer entre les individus, puis dans les communautés.  Un comportement s'ancre et devient culture, parfois très éloigné des raisons originales pour lesquels il a été adopté.  C'est pourquoi, même à des milliers de kilomètre, les individus préféreront manger certains aliments (comme les premiers immigrés français en Amérique, qui se sont empressés de planter du blé, au lieu d'adopter le maïs), plutôt que de vivre sur les ressources naturelles du territoire.  Je parle d'aliments, mais je pourrais parler de tellement de choses différentes.  

Par exemple, je pourrais parler d'architecture, comme en ouverture de ce billet.  Je pourrais parler de la façon dont on cultive la terre (régime seigneurial versus canton devrait sonner une cloche à quelques personnes qui ont fait leur cours d'histoire dans les années 1990...).  Je pourrais parler de la façon de diviser les pièces d'une maison, de la façon dont les peuples de cultures arabes, tout comme les romains, avaient leur cours au centre de la maison et que les occidentaux l'ont en-dehors.  Je pourrais parler de l'art des jardins, de la façon de voyager, bref, de tas d'autres choses.  

Pris isolément, chacun de ses éléments prennent racine dans un territoire, dans un peuple.  Sauf que les humains voyagent, se parlent, échangent, s'admirent, se conquièrent parfois les uns les autres.  Cela donne un joyeux mélange.  Une invention peut avoir été faite ici, mais être devenue populaire là, pour des raisons pratiques, économiques, politiques, religieuses ou tout simplement de mode.  Et souvent, le plus fort impose ses innovations aux autres.  Pourquoi croyez-vous donc que l'image d'un berger résonne si fort dans tout le monde occidental, alors qu'il n'y a pas grand monde qui aie jamais vu un mouton dans la majorité de ces pays?  Parce que c'était une image forte pour un peuple en particulier, le peuple hébreux, qui vivait dans un territoire où le mouton était un animal d'élevage parfaitement adapté au territoire, qui en a fait une image forte de son imaginaire, qui s'est transmis à son imaginaire religieux, qu'il a transmis à d'autres.  Par un jeu de bascule, qui s'est joué sur des siècles, la situation de départ qui était régionale, voir locale d'une territoire, s'est transmis à d'autres et a fini par devenir un trait culturel d'une civilisation.  Évidement, dans notre monde globalisé, on peut avoir l'impression que les particularités régionales parfaitement adaptées à leur environnement s'effacent au profit de technologies et de ressources provenant de loin.  Mais comme l'a prouvé l'Histoire, rien n'est jamais statique dans ce domaine.

Voyons maintenant les liens avec la fiction.  Je dois avouer que c'est le thème avec lequel j'ai passé le plus de temps à réfléchir étant donné que cette notion de liens entre les territoires et les peuples qui les habitent n'est pas nécessairement évident ou dominant dans la fiction.  Je prends donc un petit détour en poussant une petite pointe vers l'univers d'À la croisée des mondes de Philip Pullman (je recommande fortement de voir la série télé!).  Ici, les territoires sont les mêmes puisqu'il est établi dans la série que plusieurs mondes partagent les mêmes lieux, mais dans des univers séparés.  Donc, l'Oxford de Lyra et l'Oxford de Will sont sur le même territoire, mais sont issus de cultures différentes.  Cela se voit à différents niveaux.  L'emprise du religieux est beaucoup plus puissant dans le monde de Lyra et des technologies ont été davantage poussées (l'utilisation des dirigeables et des montgolfières entre autres), contrairement à d'autres qui le sont bien plus dans le monde de Will (comme l'électronique), qui dépendent du développement des connaissances scientifiques, libres donc de remettre en question les dogmes religieux.  Les possibilités sont à la base les mêmes, mais la culture du territoire dont est issu le pouvoir dominant dans le monde de Lyra a structuré le monde d'une façon différente.  Ce qui fait que  l'organisation du territoire, les sources d'énergie exploitées et les façons dont elles le sont sont différentes.  Ce qui fait que dans deux territoires parfaitement semblable, on puisse donc retrouver des différences aussi importantes dans l'organisation du territoire.

Bon, 2020 achève, une année que j'aurais passé à vous parler de géographie humaine.  On va terminer ça en beauté avec la fin de l'année et le dernier thème que j'aborderai dans cette série de billets et que je gardais comme dessert: la ville.

@+ Mariane

lundi 30 novembre 2020

Je m'y attendais pas, vraiment!

 Ok.

Si hier, aux alentours de 11h30, vous avez entendu crier...

Ben c'était moi.

Ok, j'avoue, j'avais espéré.

Beaucoup.

À me tordre les doigts à force de les croiser.

Mais je l'avais déjà fait.

En 2014 et en 2019.

Sans résultat.

Et là...

Ben, j'ai gagné le prix Boréal fandédition de 2020!!!!!!!!!!!!!

Fort heureusement, j'étais pas seule quand on l'a annoncé (je vous rassure, j'ai droit à un visiteur, je suis célibataire, enfin, si on fait exception de deux colocataires à quatre pattes).

Mais ça fait quand même drôle...

J'ai gagné lors d'une année exceptionnelle.

De façon un peu exceptionnelle.

J'aurais aimé gagné au milieu de mes pairs.

Pouvoir féliciter les autres gagnants en personne.

J'ai pas eu droit à tout ça, même si j'ai eu le prix.

Saveur douce-amère.

Partie remise?

Peut-être.

Ne comptez pas sur le fait que j'arrête de bloguer!

Ce prix me fait réellement plaisir au fait!

Ça me donne une petite tape sur l'épaule pour continuer.

En espérant rester toujours aussi pertinente dans mon boulot!

Maintenant, pause de l'autopromotion et on retourne au blogue demain matin.

Oui, vous aurez droit à un billet cette semaine!

Rendez-vous demain matin!

@+ Mariane

lundi 23 novembre 2020

Que ce soit la première ou pas, ça continue de faire plaisir!

 Salut!

Les nominations sont sorties pour le prix Boréal la semaine dernière et devinez quoi, j'ai réussi à me faufiler dans la catégorie fanédition avec ce blogue!  Ce n'est pas la première fois, j'ai déjà quelques nominations au compteur, mais je n'ai pas encore remporté le prix.  Peut-être cette année?  J'en sais rien, mais j'avoue que ça serait vraiment cool! Il y aurait une chose positive à mettre dans la liste des souvenirs de 2020!  Et ce serait un très beau cadeau pour mes dix ans de blogue!

Mais avant tout, ce qui fait  plaisir avec cette nomination, c'est le fait que ça me montre que je suis lue.  Blogueuse, je l'ai déjà dit, est un métier solitaire.  On pense nos billets de blogue dans notre coin, on les peaufine et on les lance dans l'univers.  À part les statistiques du blogue et les commentaires, on a que peu d'idées de la résonnance de nos idées.  Est-ce un peu, beaucoup, passionnément?  Dur à dire.  Par contre, une nomination veut dire que parmi les choix proposés, suffisamment de gens ont pensé à mon blogue comparé aux autres propositions pour que cela fasse la différence.  Et que je me retrouve avec quatre autres nominés, dont deux dont je respecte énormément le travail, soit ma chère amie Gen et le blogue d'Imagineatlas des étudiants du Collège Marianopolis.  Je connais peu les deux autres blogues en nomination, mais je vais leur jeter un petit coup d'oeil, surtout que les Filles de joual avaient gagné l'an dernier.

Bref, ceci est un billet à saveur d'autopromotion où je vous encourage, si vous aimez le contenu que vous retrouvez ici, à voter pour mon blogue!  Les votes sont ouverts jusqu'au 27 novembre 2020 à 23h59.  Pour voter, c'est ici.

Bonne chance aux autres nominés!  

Mariane

lundi 16 novembre 2020

Les plus dures sont les pires

Salut!

Je critique des livres sur mon blogue depuis les tous débuts.  Avant ça, je le faisais sur une autre plate-forme.  J'ai aussi déjà fait de la critique à titre plus professionnel.  Disons grosso modo que je critique des livres depuis une bonne quinzaine d'années.  Et que même après tout ce temps, je continue à trouver que les critiques les plus difficiles à faire sont celles des pires livres.

On dit souvent que les critiques sont des artistes ratés et aigris qui se vengent sur les livres des autres.  Euh, non.  Il y en a, c'est sûr.  Il y a aussi des artistes ratés qui tapent sur ceux qui réussissent et des artistes qui sont capables de reconnaître les réussites des autres et sont discrets face à leurs échecs.  Le portrait n'est pas ni noir ni blanc.  Et je me range plutôt du côté des critiques qui justement, ont un regard critique plutôt que de ceux qui rentrent dans le tas et tapent.  De un, parce que ça ne me ressemble pas et de deux, parce que je ne vois strictement aucun intérêt à ça.

Sauf que voilà, comme tous les critiques, ils m'arrivent de lire un mauvais livre, un très mauvais livre... Et quand ça arrive, ben, tout simplement question d'étique personnelle, il faut que ça sorte.

Le hic, c'est que par expérience, c'est loin d'être facile.

T'as juste à te défouler et à tout sortir sur la page?  Nope!  Jamais de la vie!  Ce serait beaucoup trop facile.  De toute façon, le défoulement est facile à percevoir.  Quelqu'un qui tape sans discernement écrit des critiques ennuyeuses et hargneuses qui n'apportent pas grande chose à personne.  Je le sais, je lis autant de critiques que j'en écris.  Les  plus intéressantes, même celles des pires navets sont celles qui sont argumentées.

Et bon.  Dire qu'un livre est bon, c'est relativement facile.  Si on lit un bon livre, c'est facile de se laisser porter par les émotions positives et écrire.  Les mauvais livres sont bien plus une épreuve.  En commençant, il faut avoir passé au travers dudit livre, ce qui n'est pas toujours facile.  

(Confession: ça m'est déjà arrivé de passer au travers d'un livre juste pour avoir le plaisir de le critiquer.  Parce que oui, critiquer un mauvais livre représente un certain plaisir, pervers certes, mais ça reste un certain plaisir.  Remarquez que je ne souhaite nullement lire un mauvais livre pour avoir le plaisir pervers d'en faire la critique.  C'est plutôt que certains mauvais livres valent la peine d'être critiqué.  Les autres, je ne les finis pas.  Point barre.)

Mais alors, pourquoi c'est si difficile?  Et bien, disons qu'une mauvaise critique demande d'avoir compris pourquoi c'est mauvais.  Bon, c'est facile à savoir, mais mauvais?  Un regard critique demande d'être justifié.  Et il faut savoir l'expliquer.  

C'est ça qui est compliqué.  Je me creuse souvent la tête à trouver le bon exemple, à comprendre pourquoi ça ne marche pas, à l'expliquer, à penser la structure d'un livre que j'ai détesté...  Parce que pour moi, c'est ça l'essence du métier de critique.  Comprendre pourquoi ça marche et pourquoi ça ne marche pas.  Et essayer du mieux possible, de l'expliquer.  Ce qui n'est en règle générale jamais facile.  Sauf que quand tu as aimé quelque chose, dire simplement, j'ai adoré va convaincre pas mal de gens.  Dire, j'ai détesté et tout le monde va vouloir savoir pourquoi au juste...

Faut être convaincant, pertinent et cohérent.  C'est sans doute pour ça que pour une bonne critique, je vais réviser mon texte deux ou trois fois (oui, je fais tout le temps ça).  Pour une mauvaise critique... Je peux le relire dix ou même quinze fois et la peaufiner, retravailler et retravailler, encore et encore.  

C'est beaucoup plus de boulot une mauvaise critique.  Ne soyez donc pas surprise d'en lire si peu sur ce blogue.  Ça et le fait que les mauvaises critiques viennent de mauvais livres et que j'en finis très peu.

@+ Mariane

jeudi 12 novembre 2020

The Colleguim Chronicles: Intrigues de Mercedes Lackey

 The Collegium Chronicles  tome 2  Intrigues  Mercedes Lackey  Daw Books  Collection Fantasy  391 pages


Résumé:
Désormais bien installé au Collegium, Mags est très occupé: en plus des tâches que lui confie discrètement le héraut Nikolas, de ses études où il doit travailler très dur pour rattraper son retard, on lui demande de faire partie de l'équipe de kirball.  Il accepte, un peu étonné, mais trouve du temps entre les entraînements pour finir ses recherches dans les archives.  Il y fait une découverte surprenante sur son passé: ses parents étaient des étrangers et non des Valdémarans.  Le seul problème, c'est que les précognitifs, tous les précognitifs ont eu une vision: le Roi, couvert de sang et devant lui, un étranger...

Mon avis:
Au risque de me répéter, je continue cette série parce que je suis très mordue de l'auteure, mais je suis tout aussi certaine de ses innombrables faiblesses.  Série à garder pour les fans finis seulement.

Mags continue donc son cheminement en tant qu'apprenti Héraut.  Il est toujours au Collegium et ma foi, si le premier tome était centré sur l'impact de la transformation majeure qu'implique sa création dans l'entraînement des hérauts, celui-ci ignore presque complètement cette donnée.  Mags a désormais des amis et beaucoup des aventures de ce tome tournent autour d'eux.  Bear le soigneur-sans-le-don qui soigne avec des herbes et que sa famille de soigneurs-avec-le-don veut marier à une fille pour qu'il ponde de nouveaux héritiers qu'on espère avec le Don.  Lena, la barde, fille de célèbre barde qui n'existe pas aux yeux de son père et qui ne vit que pour avoir un regard de lui.  S'ajoute à cela Amylie, la fille du héraut Nikolas, mentor de Mags, qui fera comprendre à Dallen que les préférences de son élu ne vont pas vers les garçons.  Attention par contre, les retournements tombent souvent de nulle part et font souvent sourciller.  Comme si l'auteure décidait que ça allait arriver là et ne se préoccupait pas que l'effet lapin sorti d'un chapeau s'enchaîne sans fin dans son livre.

La clé de ce tome-ci est la relation entre Mags et son Compagnon, Dallen.  Mags n'est jamais vraiment seul, Dallen est toujours à ses côtés.  Leur relation, déjà bien étoffée se développe encore plus.  On découvre d'ailleurs dans ce tome-ci le côté cabotin et même taquin du Compagnon.  Et ce sera d'autant plus nécessaire dans cet opus.

Déjà que Mags souffre d'un manque de confiance chronique en lui-même et en les autres, voilà que des précognitifs laissent entendre qu'un étranger pourrait attenter à la vie du roi, faisant de la vie de Mags un enfer.  Ses amitiés, encore récentes, seront mises à rude épreuve.   L'essentiel du roman se passe d'ailleurs entre les allers-retours de ces jeunes-là et les effets des prédictions sur Mags.  Ajouter à cela quelques matches de kirball, un sport à mi-chemin entre le drapeau que l'on jouait dans la cours d'école primaire et le trollball des GN.  Si vous ne connaissez pas les deux références précédentes pas grave!  Sachez juste que les descriptions sont excitantes, même si je ne suis pas sûre d'avoir entièrement compris le jeu.

Les situations sont simples, voir simplistes, on peut déplorer que l'intrigue principale soit à plusieurs moments complètement éclipsée par des détours sur des enjeux plus secondaires, mais reste que ça se lit bien et que j'ai passé un bon moment.  Si vous cherchez quelque chose de transcendant par contre, passez votre chemin.

Ma note: 3.25/5

lundi 9 novembre 2020

En fiction, les coups de tête n'existe pas

 Salut,

Lors d'un récent atelier d'écriture, nous discutions du texte d'une participante et je lui aie demandé à un moment quels étaient les motivations de son personnage.  Juste en disant le mot, je me suis fait la réflexion mentale que ce n'était pas exactement ce que je voulais dire, mais c'est sorti comme ça.  Plus tard, notre sempaï préférée a fait la remarquer que comme le personnage était une adolescente, on n'avait pas vraiment de raisons à donner pour son comportement.  Et ça a fait tilt dans ma tête.  J'ai sans doute eu la bouche ouverte sur Zoom pendant quelques instants, puis, l'atelier a suivi son cours.  Et moi je suis restée avec mon idée qui tournait dans ma tête comme un poisson dans son aquarium.

Parce que non, aucun ado, même au sommet de ses hormones n'agit sans raison.

Avez-vous déjà lu un livre et eu l'impression soudaine que le personnage dont vous suivez les aventures faisait quelque chose de vraiment bizarre, tellement que vous yeux s'ouvraient tout grands en vous disant, mais voyons, ça sort d'où ça?  C'est une impression qui est parfois très puissante, d'autres fois fugitive, mais à chaque fois, ça a le potentiel de nous faire décrocher d'une histoire.  Et ça n'a pas besoin d'être des détails très importants.  Si un personnage prend toujours l'escalier et qu'il prend l'ascenseur un jour, sans la moindre raison, ça ne marche pas.  Il aura TOUJOURS une raison pour prendre cette décision si on veut que l'histoire soit cohérente avec ce que ce personnage est.

Attention, je ne veux pas dire qu'il faut faire une justification en trois exemplaires demandant chacun six signatures pour chaque décision.  Les justifications peuvent être subtiles.  Si un personnage décide de prendre l'ascenseur, ça peut être parce qu'il ne veut pas croiser une personne qu'il a vu dans les escaliers, qu'il arrive avec trois immenses sacs d'épicerie ou juge avoir assez soufflé sur une machine d'exercice ce jour-là.  Tout, du plus simple au plus complexe a une raison.  Ça lui tente en est une!  Vouloir essayer quelque chose de nouveau en est une autre.  Sauf qu'il y a toujours une raison à nos actes.

Oui, mais les coups de tête!  Si vous relisez le titre de mon billet de blogue, vous avez compris que j'ai déjà choisi mon camp là-dessus.  Oui, même les coups de tête ont une justification.  Le principe est que les coups de tête sont des actions rapides, mais le chemin qui mènent à ces prises de décision peut l'être pas mal moins.  Si vous détestez la paire de jeans que vous portez tout le temps, la décision de leur faire prendre la direction de la sortie peut être rapide, mais par contre, chaque fois que vous aurez pesté contre la fermeture éclair qui vous fait des misères, chaque fois que vous aurez regardé l'usure des rebords, chaque fois que vous vous vous serez fait la réflexion que vous devriez en changer, vous avez fait un petit pas vers cette décision.  Et un jour, pouf, la décision se prend en un éclair.

Le talent d'un.e auteur.e tient justement au fait de nous montrer le cheminement d'un personnage entre les questionnements, les hésitations, les tâtonnements et la décision.  Ça peut aller de mimiques du visage à des paroles, à des actes concrets.  Je me rappelle une touchante scène d'une série télé où un personnage confiait son chien à son mentor, geste qui concluait sa prise de décision.  Sauf que la prise de décision avait été préparée en amont et pourtant, rien, avant ce moment ne nous disait celle qu'elle allait prendre.  Peut-être même pas le personnage lui-même.  

Les coups de têtes prennent aussi racine dans le comportement d'un personnage.  D'où les yeux de merlans frits si un auteur leur fait prendre une décision qui n'a aucun rapport avec leur personnalité.  Un personnage sage et obéissant peut faire de folles actions, les plus folles du monde même, mais ne peut pas le faire si quelque chose dans l'histoire ne vient pas nous expliquer pourquoi au juste.  Un raz le bol, une personne en danger, une menace de mort, toutes les options ont été explorées par la fiction, mais il y en a toujours une.  Même pour la plus étrange des décisions.  D'ailleurs, essayer de trouver la raison d'un comportement étrange d'un personnage est un ressort d'intrigue fréquent.  Pourquoi personne X agissait comme ceci et maintenant comme cela?  Tordez-vous le cerveau pour trouver!  Parce que vous le savez hein, que cette personne a une raison d'agir comme ça?  Et bien, c'est la même chose avec tous les personnages, y compris le principal!

Et au fait, croyez-vous que j'ai écrit ce billet sur un coup de tête?  Non, j'avais un billet à écrire pour ce matin! ;)

@+ Mariane

jeudi 5 novembre 2020

Les New Yorkaises d'Edith Wharton

 Les New Yorkaises  Edith Wharton  

Résumé:

Pauline Manford est une femme du monde et une femme du monde très occupée.  Du matin au soir, tout son horaire est minuté: manucure, coiffeuse, rencontre avec une cheffe d'association, rencontre spirituelle, exercices, dîner, essayage de robes...  Autour d'elle, sa fille Nona regarde les agitations de sa mère avec détachement et cache son amour pour un homme marié, son mari Manford l'avocat, avec lequel se creuse de plus en plus une distance qu'elle ne comprend pas, son fils Jim, amoureux d'une femme-enfant qui se verrait bien faire carrière à Hollywood, sont autant de météores qui ne semblent pas pouvoir la distraire de sa trajectoire.  Sauf que peut-être bien, finalement...

Mon avis:

L'écriture de ce roman est absolument délectable.  C'est un régal de lire les descriptions ciselées et imagées qui font ressortir toute la saveur de chaque situation.  Je me suis surprise à maintes reprises à lire des phrases deux ou trois fois et même à voix haute.  Chaque chapitre nous surprend par une tournure de phrase, une description, une métaphore qui tombent pile en plein milieu de la situation, laissant voir les émotions, les pensées, la face intime de chacun des personnages.  Les femmes sont ici à l'honneur, mais les personnages masculins ne sont pas en reste, excepté ce pauvre Jim qui fait malheureusement un peu trop figure de plante verte.

Le personnage principal est Pauline Manford, une femme que l'on devine cinquantenaire sans que cela soit jamais nommé.  Le genre de femme ultra-occupée et hyper-efficace, mais étant donné son statut social et l'époque où elle vit, Pauline se consacre aux réceptions, aux associations de charité et de promotion d'idées, aux gourous qui s'avèrent être autant de charlatans, mais dont elle change comme elle change de chemise.  Pauline a de l'argent et elle en use, autant pour son confort que pour installer chez elle les technologies dernier cri.  Le roman se passe dans les années 20, donc, téléphone et système d'alarme sont les technologies qu'elle parade comme nous le ferions aujourd'hui de nos dernières bébelles technos.  L'époque est différente, mais l'attitude est la même.

Ce qui ressort quand même de ce personnage est une incapacité à une vie intérieure.  Pauline s'étourdi, se passionne pour les sujets les plus divers, change d'idées, essaie des nouveautés, se contredit dans ses propres discours (elle appuie avec une égale force la Société de contrôle des naissances et l'Association pour la fête de la maternité...) et ne se rend pas compte le moins du monde du grand écart entre les idées promues par ses divers engagements.  Tout simplement parce qu'elle ne réfléchit pas.  C'est dans ce portrait, derrière cette façade de réussite et d'occupation, d'une femme incapable de gérer ses propres sentiments et qui bien malgré elle, se retrouve à négliger sa famille que l'auteure réussit le plus grand tour de force de son roman.  Réglant à coup de chèques les situations émotionnellement trop tendues, autant avec les siens qu'avec les autres membres de son cercle élargi, Pauline montre autant sa capacité d'action que son incapacité en terme d'émotion.  Pour elle, il y a une solution à tout, qu'elle soit technologique, spirituelle ou mondaine.  L'argent est un langage qu'elle comprend, celui de l'émotion lui est inconnu.

Les autres personnages tournent autour d'elle et sont autant de portrait réussis des chemins possibles dans ce milieu social: Lita, la femme-enfant, qui n'a à aucun moment la narration de l'histoire (qui est racontée du point de vue de Pauline, de Nona sa fille et de Dexter son mari) qui songe à une carrière à Hollywood, lassée de sa vie de mère et d'épouse.  Nona, qui, à dix-neuf ans, cherche son chemin dans la vie, mais ne veut pas faire comme sa mère et vit une histoire d'amour impossible avec un homme marié auquel sa femme refuse le divorce.  Dexter, qui arrivé à l'aube de la cinquantaine, remet maintenant en question ses choix de vie et traverse une crise existentielle.  Pauline ne voit rien, entre deux conférences et une séance de  manucure, elle est aveugle à ce qu'elle a sous les yeux et c'est cela, ce trou béant qui traverse le roman et que l'auteure réussit à nous transmettre avec autant de talent.

Ce n'est pas un roman d'action, l'intrigue tient à peu de choses, mais on reste quand même accrochée à cause de la prose magnifique de l'auteure et à ces personnages, tous imparfaits, perdus dans un tourbillon propulsé par Pauline, mais oh combien attachants.  Le seul défaut que j'ai trouvé à ce roman, comme un petit quelque chose de dérangeant en arrière-plan est sa longueur.  Ayant déjà lu l'auteure en nouvelle, le roman émousse un peu la puissance de son écriture et de son évocation, mais ne gâche en rien le plaisir de la lecture.  

À savourer avec un Manhattan à portée de main.

Ma note: 4.5/5

lundi 2 novembre 2020

L'auto-promotion peut-il être un art subtil?

 Salut!

Je l'ai connu au moins mille fois.  L'auteur.e qui annonce qu'il a un livre qui vient de sortir et BANG, BANG, BANG, voilà les gros sabots qui s'amène.  Je viens de publier un LIVRE. (ou une nouvelle, c'est plus subtil, mais c'est quand même réel).  ACHETEZ MON LIVRE!!!  dit grosso modo l'ensemble des messages qu'il ou elle publie sur les réseaux sociaux.  Toute occasion devient bonne pour «ploguer» leur oeuvre.  Certains réussissent avec plus de talents à le faire que d'autres (et sont donc moins pénibles).  Sauf que dans l'ensemble, l'autopromotion est quelque chose de rarement subtil.

Sauf que...

Me voici dans la peau de la personne aux gros sabots.

Parce que, parce que...  PARCE QUE J'AI UNE NOUVELLE DANS SOLARIS 216!

Ok Mariane, tu te calmes, tu te calmes...

BANG! BANG ! BANG!

Me voici donc avec mes gros sabots pour vous parler de ma nouvelle.  Même pas un livre, juste une petite nouvelle, mais je suis tellement fière et bon, c'est mon premier texte ok?  J'ai l'douâ!

Pour ceux qui voudrait en savoir un peu plus, c'est l'histoire d'une femme qui vit dans un monde post-apocalyptique et qui doit volontairement garder loin d'elle les souvenirs de son passé pour préserver son présent, aussi difficile soit-il.  

(J'espère vous avoir intrigué un peu!)

Mais reste que c'est une question que je me pose et que je continue de me poser: comment en tant qu'auteur.e peut-on faire notre autopromotion sans être chiant pour les personnes qui nous entourent?

Je regarde les messes de promotion des films de Marvel (ouais, on peut pratiquement parler de messe dans leur cas) et les artisans qui les font n'ont semble-t-il aucun problème à parler de leur bébé.  Ils sont fiers, ils sont enthousiastes.  Mais moi, petite auteure débutante, j'hésite.

Bon, on en parle pas de la même échelle et il faut dire que pour une personne qui publie, de un, elle est souvent la seule responsable de sa promotion et de deux, on a pas tous des dizaines d'expert en marketing et en relation publique pour nous appuyer...  On fait comme on peut.  Et chacun a son seuil de tolérance à parler de soi-même.  Parce que, si on est bien fier.ère de ce qu'on a fait, au fond, on ne sait pas vraiment si c'est bon...  Et ça rend d'autant plus la tâche délicate!  Il faut y croire, mais ne pas avoir l'air trop sûr de soi.  Il faut parler de notre oeuvre, mais parler d'elle, pas trop de soi.  Il faut avoir un juste équilibre qui n'est pas toujours facile à trouver.

Bref, je creuse le sujet dans ma tête.  Je crois qu'une première publication est un bon moment pour se poser la question!

@+ Mariane

jeudi 29 octobre 2020

Comprendre les élections américaines Édition 2020 d'Élisabeth Vallet

 Comprendre les élections américaines  Élisabeth Vallet  Septentrion  222 pages


Résumé:

Qu'est-ce qu'est la présidence des États-Unis?  Quels sont les pouvoirs du président?  Quelle est l'histoire de cette institution, mais surtout, comme le président est-il élu?  C'est à toutes ces questions et bien d'autres que s'attaque ce livre.

Mon avis:

Première des choses, jamais auparavant je n'avais eu autant envie de chanter le Ô Canada en lisant un livre...

Ce livre est divisé en trois partie: qu'est-ce que la présidence des États-Unis?  Comment a-t-elle été conçue au départ, pensée, comment elle a évolué au fil des années.  Ensuite, comment fonctionne le système électoral américain (mettez ici une série d'émoticônes montrant la consternation, l'envie de vomir et plusieurs facepalm) et comment se joue la course à la Maison-Blanche proprement dite.  Cette édition étant celle de 2020, on y couvre certains pans de l'impact de la présidence de Trump sur le processus.  Cependant, la préface date du 1er juillet et ne couvre pas les événements les plus récents (mort de la juge Ruth Bader Ginsburg, maladie de Trump et le fameux premier débat entre Joe Biden et lui).

La première partie montre bien qu'avant d'être un instrument de pouvoir, la présidence est une institution, qui a ses codes, ses origines et sa place dans la démocratie américaine, autant symbolique que pragmatique.  L'auteure montre aussi combien la fiction a contribué à faire de cette institution une partie fondamentale de la vision que les États-Unis ont d'eux-mêmes.  En lisant la liste des films, séries télés et livres mettant en vedette la présidence, on ne peut s'empêcher de penser qu'une bonne partie de notre vision du boulot d'un président vient de là.

La seconde partie parle du système électoral des États-Unis d'Amérique et comment dire... Après avoir lu cela, je ne peux même plus penser aux États-Unis comme à une démocratie.  Parce qu'au-delà de l'histoire de la démocratie américaine et de l'élargissement du vote à tous les habitants du pays, elle montre une guerre incessante, surtout menée par les républicains, pour empêcher le vote de larges pans de la population, surtout les clientèles naturelles des démocrates.  Les populations noires, latinx et pauvres sont fortement défavorisées par ces méthodes.  Néanmoins, c'est l'accumulation des preuves, la décortition méthodique des obstacles petits et grands qui, sous le couvert de maintenir la probité du vote, sont dressés, parfois de manière tellement spécifique qu'il est presque impossible de ne pas crier au scandale.  Mais tout ceci a lieu dans la plus grande démocratie au monde...

La troisième partie décrit de façon plus spécifique le processus électoral de l'élection présidentielle.  Même si je suis une lectrice assidue des informations sur les États-Unis, j'ai appris de nombreuses détails qui me manquaient, entre autre la fonction des super PACs et les changements apportés par de récentes décisions de la Cours suprême sur le processus électoral.  Une petite partie est réservée à la fin au processus de «déménagement» d'un président, comment même avec tous les changements de président, le personnel de la Maison-Blanche, lui reste le même et la dynamique à l'intérieur reste avant tout celle d'une institution... peu importe qui est le Président.

Fascinant, enrageant, mais éclairant et instructif.  J'ai pas hâte au 3 novembre par contre...

Ma note: 4.25/5

Je remercie les éditions Septentrion pour ce service de presse.

lundi 26 octobre 2020

J'ai pas eu le temps de lire le livre et v'la-tu pas l'adaptation?

 Salut!

L'autre jour, gracieuseté des algorithmes du grand catalogue de visage, je tombe sur la bande-annonce d'Enola Holmes.  Je connaissais, évidemment.  Les premiers tomes de ses aventures sont parues alors que j'étais en librairie.  Ouf, finalement, ça fait peut-être plus longtemps que je ne le pensais...  Bref, j'avais noté de lire le livre, mais bien d'autres lectures sont passées avant et j'ai finalement rayé le titre de ma très longue liste à lire.

Et voilà que l'adaptation débarque sur nos écrans!

Sans blague!  Tout ceci me rappelle que j'ai quitté la librairie il y a déjà sept ans... malheureusement.  Mais ça m'a aussi fait penser à autre chose.  

L'adaptation au cinéma est rendue une norme pour les romans, autant pour les petits que pour les grands.  Un livre a du succès?  On l'adapte, au petit ou au grand écran, ça dépend de qui fait la plus haute offre pour les droits d'adaptations, de l'histoire elle-même (j'aurais pas vu Le trône de fer raccourci en trois heures au cinéma), ou de l'équipe qui est en charge de l'adaptation, selon qu'ils travaillent davantage au cinéma ou la télévision.  Cependant, il faut le savoir, seule une poignée d'oeuvre sont adaptées.  La vaste majorité des histoires qui sont parues sous forme de roman finissent leur carrière sous forme de romans.  Point barre.  L'adaptation est une exception.

Sauf que de regarder ce qui est adapté, mais aussi le rythme où les romans font la traverser à l'écran donne une bonne idée de deux tendances: de un, le cinéma adaptent plus vite des histoires qui ont déjà une résonnance auprès du public.  De deux, les frontières entre les oeuvres sont de plus en plus poreuses.

Au 19e siècle, les oeuvres littéraires qui avaient du succès étaient adaptées au théâtre (Frankenstein entre autre), en plus des pièces écrites pour le théâtre elle-même.  Il y a eu la belle époque des radios romans également.  Le Hollywood naissant a largement pigé dans tout le répertoire classique pour ses films, avec plus ou moins de succès selon les cas (ce qui n'a guère changé!).  Tout ça pour dire que l'adaptation n'est ni nouvelle, ni beaucoup plus importante en nombre qu'à une autre époque.  Ce qui a changé, c'est le rythme: un livre a du succès?  On parle presque aussitôt de l'adaptation.  Ce n'est même plus une question de oui ou non, peut-on, peut-on le faire, doit-on le faire?  Niet, on saute cette case.  Même les oeuvres réputées inadaptables le sont aujourd'hui.  Ce qui était autrefois une possibilité devient presque une suite automatique.  Succès littéraire = adaptation, du moins, dans le monde anglo-saxon.  Les Français n'en sont pas encore là, mais...

Maintenant, l'autre question est: quel auteur.e écrit aujourd'hui sans avoir une arrière pensée pour une possible adaptation?  Soyons honnête quand même!  Oui, il y a encore des littéraires pour la littérature et oui, tout le monde écrit d'abord pour publier un bon livre, mais tout de même, cette petite pensée peut influencer la plume des auteur.e.s.  Ce que ça donne?  Et bien, certaines scènes disparaîtront, d'autres apparaîtront.  La façon de raconter sera aussi influencée.  Le format à l'écran impose un certain nombre de case à cocher et les romancier.ère.s habiles feront même des romans près pour le passage en prise de vue réelles (de mémoire, John Grisham est connu pour ça).  Écrire une histoire devient un exercice qui se préoccupe moins du support et de ses codes pour se concentrer sur ce que l'on veut raconter au public.  Le fond reste, mais la forme est déclinable.

Ça donne aussi que le temps entre l'arrivée du livre sur les tablettes des librairies et la sortie au cinéma (oups, ça c'était pré-2020) raccourci de plus en plus et que le livre fait vendre des billets de cinéma et le cinéma fait vendre des livres.  Bref, les livres d'aujourd'hui sont les films de demain.

Et je sais pas si c'est une si bonne chose...

@+ Mariane

lundi 19 octobre 2020

La question pas si simple à répondre

Salut!

Michael Jackson, Arthur C. Clarke, Marion Zimmer Bradley, J.K. Rowling...  Toutes des personnes qui ont été pointées du doigt pour leurs comportements ou opinions récemment, ceux-ci n'étant pas disons, exemplaires.  Je ne mentionne ici que quelques exemples et que des exemples qui sont relativement connus.  Je pourrais ajouter tous les films d'Harvey Weinstein à la liste.  Possiblement ceux de Woody Allen.  Et combien d'autres oeuvres d'art, qui sont plus ou moins anciennes?  Je peux savoir que Léonard de Vinci a probablement eu un amant qui n'avait que dix ans lors de leur rencontre et continuer à regarder la Joconde.  Je peux savoir qu'Alexandre Dumas a eu un paquet d'enfant hors-mariage et qu'il courrait allègrement la galipote sans pour autant bouder mon plaisir à lire Les trois Mousquetaires.  Et pourtant...

La question de où commence l'oeuvre et où finit le créateur est une question qui reste d'actualité même si des générations de critiques et de penseurs avant nous se sont cassés les dents dessus.  Parce que ce n'est pas une question si simple.  «On ne parle que de soi, commentez», est une question qui est souvent posées aux auteurs dans une émission de radio que j'écoute régulièrement, Plus on est de fous, plus on lit.  La plupart des auteur.e.s auquel on pose la question répondent que oui.  Alors, dans ce cas, les oeuvres des artistes que l'on ne peut moralement endosser, on en fait quoi?

Le hic, c'est que l'on peut avoir envie de passer un.e auteur.e dans le tordeur... sans que rien ne transparaisse dans son/ses oeuvres.  Avant ses commentaires transphobes, on connaissait avant tout les Harry Potter pour leur ouverture à la différence.  Et même avec ses commentaires transphobes, l'oeuvre n'a pas changé, elle porte toujours le même discours.  On n'avait juste pas remarqué l'angle mort de J.K. Rolwing dans ses livres, parce que ça n'y était pas.  Si on relit à la lumière de ses récents commentaires, ça nous sautera peut-être aux yeux, mais justement... l'aurait-on vu sans ça?

Puis-je continuer à me trémousser sur Thriller?  Parce que Michael Jackson a régulièrement été accusé de pédophilie.  Or, quelle pédophilie y-a-t-il dans ses oeuvres?  Ok, rien de contentieux dans Thriller, mais dans Billie Jean ou dans P.Y.T?  Là, il y a un flirt qui justement, hors-contexte ne transparaît pas.  On est loin des oeuvres de Gabriel Matzneff...  Mais ça reste là et une fois qu'on a ouvert les yeux, l'ignorer devient plus difficile.

On peut savoir que l'artiste est loin d'être au-dessus de tous reproches, mais quand même apprécier ses oeuvres.  On peut refuser de côtoyer des oeuvres quand ceux et celles qui les ont produites choque notre conception du monde.  J'ai cessé d'écouter les pièces des Piano Guys après leur performance à l'inauguration de Donald Trump... même s'ils ne l'avaient pas endossé, ni rien.  Parce que je ne pouvais juste pas.  J'ai mis longtemps à regarder leurs vidéoclips après ça.  Ils n'ont pourtant pas changé.  Mais ma perception d'eux oui.  Je ne peux pas entièrement l'oublier.  Ça reste comme une petit note discordante à toutes les oeuvres d'eux que j'écoute.

C'est sans doute pour ça que la question n'est pas si simple à répondre.  Parce qu'elle dépasse de loin l'oeuvre, la création et l'artiste.  L'oeuvre peut exister sans l'artiste, mais ne peut avoir été créée sans lui.  Et à partir de quoi créé l'artiste?  Sa propre vie.  Et c'est là tout le problème.

Je ne pense pas que la question sera jamais tranchée complètement, ni dans un sens, ni dans l'autre.  Parce que justement, ce n'est pas une question simple; elle mêle plusieurs couches de sens et de création, de ce que fait l'artiste quand il crée et de ce que reçoit la personne qui entre en contact avec son art.  Tout ça est beaucoup trop protéiforme pour être réduit à une question de oui ou de non on doit envoyer une oeuvre, quelle qu'elle soit, dans les limbes de l'oubli.

@+ Mariane

lundi 12 octobre 2020

Ça fait dix ans...

Salut!

Il y a dix ans, une idée n'arrêtait pas de me trotter dans la tête.  En fait, il y a dix ans, elle me tournait dans la tête depuis un moment.  Depuis que j'avais lu un article dans La Presse.  C'était une chronique de Chantal Guy, la chroniqueuse littéraire.  Le titre? Salutations d'une moldue.  Vous dire si ce texte m'a marquée est un euphémisme, même si je ne l'ai lu qu'une seule fois.

Parce que la chroniqueuse y parlait de livres et de littérature... différemment.  Ce n'était pas une critique ou une chronique sur un livre, mais ça parlait de littérature.  Ce n'était pas un texte savant, mais ça parlait d'un bouquin.  C'était joyeux, aérien, mais en même temps littéraire et bien tourné.  Ça parlait de Harry Potter, dont le dernier tome venait de sortir, de la part d'une non-lectrice de cette saga.  J'ai adoré cette chronique.  J'en aie lu d'autres de la même auteure.  Ça parlait de livres, de littératures, d'auteur.e.s, mais c'était moderne, accessible, ça allait jouer dans les plates-bandes de la culture au sens large, qu'elle reliait aux livres avec doigté, ça abordait des choses profondes et ça faisait rire.

C'était inspirant en un mot.

J'avais envie de faire quelque chose de semblable, envie de parler de livres, mais d'en parler en l'intégrant à autre chose de plus grand.  À l'époque, je participais à un forum littéraire de manière assez active.  J'aimais ça, mais je ressentais le besoin de plus, besoin que je n'arrivais pas à combler par le biais de ce média.  J'ai beaucoup hésité, vraiment beaucoup.  C'était à une époque où les blogues connaissaient une espèce d'âge d'or.  Pas mal tout le monde avait le sien.  Et je me suis dit: pourquoi pas moi?

C'est donc armée de cette envie que le samedi 9 octobre 2010, je me suis assise à mon ordi et j'ai commencé à pitonner sur mon clavier.  La preuve? J'ai déposé trois messages sur mon blogue ce jour-là...  Je ne l'ai jamais refait depuis!  Le blogue est devenu en dix ans un espace de création, de liberté, mais aussi d'apprentissage.  Écrire un blogue m'a permis de me rendre compte de mes manies d'écriture (ouais, j'essaie encore de les corriger!), d'apprendre à apprendre à être constante, à trouver de la suite dans mes idées et aussi à voir toutes les possibilités en toutes circonstances.  Et il s'en aie passé des choses dans ma vie en dix ans!  Le blogue n'a pas toujours été constant (le trou noir de 2017 en a été un exemple), mais il a toujours été dans mes pensées.  Il m'a parfois aidé, parfois été un fardeau, souvent une source de joie.  Et source aussi de beaucoup, beaucoup de belles rencontres.

J'ai toujours essayé d'être fidèle à l'esprit que m'avait insufflé ce texte sur les moldus au départ: parler de livres, parler de littérature, mais se détacher des carcans, des méthodes connues, des chemins déjà parcourus.  Partir d'un livre et en arriver à la société ou partir de la société pour en arriver à un livre.  En parler par la bande, parfois faire des liens avec l'actualité ou avec des mouvements plus profond.  Même si mon inspiration première est là, je dois avouer que le reste a beaucoup varié avec le temps.  J'ai appris mon art de blogueuse en bloguant.  J'ai aussi mis des critiques parce que j'ai toujours aimé parlé des livres que j'aime, même de ceux que j'aime moins.

Durant le confinement, j'ai écrit à Chantal Guy.  Elle avait dit qu'elle répondrait à toutes les personnes qui lui écrirait.  Je lui aie parlé de mon blogue, dit qu'il avait presque dix ans et que son inspiration me venait de cette fameuse chronique.  Elle m'a répondu!  J'étais très heureuse.  Malgré tout, en dix ans, j'ai pas mal gagné en confiance et en indépendance.  C'est ici mon blogue et c'est chez moi et je m'amuse maintenant à y mettre bien plus de choses que je n'avais pensé y mettre au départ!

Bref, à ce cher blogue: bon dixième anniversaire!

@+ Mariane

lundi 5 octobre 2020

Plaisir à calories vides

 Salut!

Plaisir coupable.  J'ai toujours détesté cette expression.  Tout simplement parce que rien ne me semble plus éloigné du plaisir que la culpabilité.  Si on se fait plaisir, on se fait plaisir, voilà tout!  Mais bon, l'expression existe.  Voyons, voyons.

Un plaisir coupable, ça se dit d'un plaisir qu'on s'offre en sachant très bien qu'il ne répond pas à tous les critères d'un «bon» plaisir.  Une poutine est un plaisir coupable parce qu'on sait très bien qu'on bouffe à ce moment-là beaucoup trop de gras, de sel et de calories.  Par contre, on le fait tout simplement parce que c'est un plaisir.  Gustatif dans ce cas.  Il peut aussi être moral: qui n'a jamais, un soir de déprime, dévoré une bonne poutine?  La poutine est un plat réconfortant.  Enfin, pour moi.  Pour une autre personne, ça peut être une énorme portion de gâteau au chocolat ou un sac de chips.  L'idée principale du plaisir coupable est de manger quelque chose que vous ne mangeriez pas dans d'autres circonstances, faisant de la dévoration de ce plat une exception, mais aussi une occasion spéciale, parce qu'il s'agit d'un plaisir dont ils ne faut pas abuser.  Personne ne parlera de plaisir coupable si vous dévorez un plat de céleri en bâtonnets...

Appliqué à la lecture, plaisir coupable ou lecture coupable pourrait se dire de livres que l'on lit pour se faire du bien en se disant bien qu'il vaudrait mieux ne pas les lire.  Mais pourquoi donc?  On peut très bien savoir qu'un produit est de qualité moindre au niveau littéraire, mais simplement apprécié le voyage dans ses pages.  Pourquoi faudrait-il au juste que toutes nos lectures soient aussi nourrissantes et saines qu'une soupe de légumineuses?  C'est bon une soupe de légumineuses, mais ne manger que ça finit par... user, fatiguer.  C'est très bon (vous ne connaissez pas ma minestrone!), mais en même temps, tout le monde approuve que vous mangiez une bonne soupe de légumineuse, on vous pousse à ça partout, c'est un plat approuvé, on vous félicitera bien plus d'avoir fait ce choix au restaurant que de prendre ces rouleaux de printemps si appétissants, mais oh combien frits.  Sauf qu'il y a un petit côté rebelle aux rouleaux de printemps que n'a pas la minestrone qui fait du bien.  On a besoin de variété dans nos assiettes autant que dans nos lectures.  Et d'être un tantinet réfractaire aux suggestions ambiantes fait autant de bien que de les suivre.

C'est sans doute pour ça que je suis fortement opposée à l'idée de plaisir coupable.  Ceci dit, je suis consciente que certaines de mes lectures ou certains des plats que je dévore pourraient être mieux.  Plus nourrissants, contenant plus de fibres et moins de sucre, plus de vitamines et moins de sel, plus de protéines et moins de gras.  Peut-être.  Mais quand même, ça fait du bien, une fois de temps en temps de tricher, de dévorer un truc hors-norme, pour le simple plaisir de le faire.  Faut pas se sentir coupable, faut juste être conscient: oui, c'est un plat ou un livre qui ne m'apportera pas le summum de l'alimentation, mais en même temps, sa dégustation m'apportera un véritable plaisir et une détente.  Ce plaisir me donnera le courage de me plonger dans un ouvrage plus complexe par la suite ou de cuisiner un plat plus nourrissant.  Une motivation aussi: comme on s'est accordé un plaisir, on peut se sentir mieux et plus apte à quelque chose de plus ardu.

Mais plaisir coupable, non.  J'aime mieux parler de plaisir à calories vides.  Ça n'apporte peut-être rien de concret autre que du plaisir, mais c'est aussi nécessaire que des vitamines pour continuer à grandir.

@+ Mariane

lundi 28 septembre 2020

Le rite sacrificiel

 Salut!

Quand on fréquente des écrivain.e.s, on apprend vite un terme qui est entouré à la fois de glamour, de sueur, de mystère et de souffrance: la direction littéraire ou si vous préférez, la dirlitt.  Tout ceux qui sont passé par là vous le dirons: c'est un passage obligé, souvent difficile, parfois une épreuve, mais quand on est passé par là, on est un vrai, on a fait ses classes, on a passé le test, réussi l'épreuve, on entre dans la cours des grands!

Quand j'ai commencé à écrire, il y avait une petite partie de moi qui avait hâte à l'épreuve, hâte d'avoir mon certificat, de réussir l'examen de passage.  Je savais que ce ne serait pas si facile.  Je me rappelle des commentaires: Ah mon dirlit m'a fait réécrire tout un passage, il m'a fait changé mon narrateur, elle m'a fait coupé deux personnages secondaires!  Moi, j'écoutais, un brin envieuse, un brin inquiète.  Mais intérieurement, j'avais l'enthousiasme d'une condamnée au sacrifice maya qui courait en haut de la pyramide se faire arracher le coeur sous le regard ébahi du grand prêtre.  Bref, j'étais plein de bonne volonté et un brin naïve.

Et puis sont venus les ateliers d'écriture.  Je suis allée au premier un brin timide, encore mal assurée dans les premiers pas que je faisais.  Naïve, surtout et avant tout.  On va retravailler un texte.  Ah, très bien que je me suis dit.  Dans ma tête, mon texte était une jolie maison.  J'avais longuement réfléchi à tout, choisi la couleur de la salle de bain, installé les rideaux dans la chambre du deuxième et réaligné le sofa selon l'angle le plus propice pour regarder le soleil couchant.  Je m'attendais à ce qu'on me demande de faire des changements.  Je savais que ça ne resterait pas ainsi.  J'étais prête à faire des rénovations, à changer bien des choses.  Mais l'animatrice de mon premier atelier a regardé mon texte et a déclaré d'un ton léger: «Ouin, faudrait élargir les fondations, mettre la salle de bain à la place du salon et enlever le deuxième étage.»  Dans mon coin de la salle, je suis restée complètement hébétée pendant quelques secondes, mon esprit pensant avant tout aux rideaux que j'avais installé dans la chambre du deuxième...  Ma jolie maison s'effondrait sous mes yeux et je regardais, trop secouée pour réagir, les ruines fumantes desquels mes partenaires d'atelier m'assuraient que je pourrais sortir un texte fort intéressant.  

La future sacrifiée est partie en courant dans la direction inverse...

Je pense que j'ai mis un sacré bout de temps à m'en remettre.  Cet atelier m'a vraiment sonné, très profondément.  J'ai complété le texte, tout le monde m'a fait des compliments, mais j'ai eu du mal pendant un bout de temps à le considérer comme mon texte.  Je repensais parfois à mon ancienne maison, si jolie.  Et puis, à force de rebâtir la nouvelle, en reprenant les mêmes matériaux, j'ai fini par réapprendre à l'aimer.  Oh, pas du jour au lendemain.  J'ai pesté contre le fait que je ne pouvais plus aligner le sofa pour voir le soleil couchant et je me suis parfois trompée de direction entre le salon et la salle de bain.  Mais petit à petit, à force de réécriture, j'ai réussi à retrouver ce qui était peut-être le plus important: l'ambiance du texte, l'atmosphère de ma maison, était encore là.  J'avais beau avoir tout réaménagé, il y avait toujours cette douleur que j'avais voulu inhérente à mon personnage principal qui restait là, tapie dans les ombres et les recoins de ma maison reconstruite.  Les jolis rideaux sont restés quelque part dans les décombres de l'ancienne par contre.

Ensuite est venu le processus de soumission, interminable attente où on lance une bouteille à la mer et où a le temps d'oublier qu'elle contenait une adresse de retour tellement ça fait longtemps qu'on l'a envoyé.  Est arrivé dans ma boîte courriel un petit message en août dernier qui m'a fait sauter au plafond.  Ma maison, retapée entièrement, avait effectivement plu à quelqu'un!  Dans mon petit coeur est cependant parti le compteur: tu vas devoir affronter la dirlitt cette fois...  Et déjà que l'atelier avait fait tellement mal!

Je me suis donc trémoussée sur ma chaise dans l'attente de la fameuse épreuve qu'il me manquait à mon tableau de chasse.  Ok, j'ai déjà publié un texte, il y a déjà mon nom sur une couverture de Solaris (sans faute dans mon nom, yé!), mais il me manquait le certificat.  J'attendais donc ma copie rougie de commentaires, de voir encore une fois ma maison réduite à un petit tas fumant et de devoir la reconstruire.  Sauf que... c'est pas arrivé.  

Mon directeur littéraire m'a rendu ma copie avec plein de commentaires sur la peinture et la décoration.  Il m'a aussi suggéré de changer l'orientation par rapport au soleil.  Tout s'est fait en douceur, sans douleur.  Bon, un petit peu de misère à ajuster les tableaux et les cadres de portes à certains endroits et je me suis un peu battue avec le papier peint dans certaines pièces, mais mon directeur littéraire est grimpé sur un escabeau pour m'aider à l'installer.  Les ombres n'ont pas changé, les recoins diffusent toujours ce que je voulais quand pour la première fois, j'ai sorti mon personnage de ma tête pour le mettre sur le papier.

C'est fini depuis la semaine dernière.

À lire dans Solaris en novembre 2020.

Et mon diplôme est enfin sur mon mur!

@+ Mariane

jeudi 24 septembre 2020

The Collegium Chronicles: Foundation de Mercedes Lackey

 The Collegium Chronicles  tome 1 Foundation  Mercedes Lackey  Daw Books  collection Fantasy  418 pages


Résumé:

Mags vit en esclavage, mais l'ignore.  Toute sa vie, il n'a connu que la mine, la faim et la brutalité de Maître Cole, le cruel propriétaire des lieux, qui malmène autant ses enfants que ses «ouvriers».  Le jour où un soldat vêtu de blanc l'arrache aux lieux pour le faire monter sur un cheval tout aussi blanc, Mags n'a aucune idée de combien son univers étroit va être bouleversé et combien lui-même aura bientôt un impact sur celui-ci.

Mon avis:

Pour moi, lire du Mercedes Lackey est comme lire un délicieux bonbon, mais je sais que là-dessus, mes goûts sont particuliers.  Ceci dit, ayant lu la majorité de son oeuvre, ses manies et ses retournements de situation me surprennent de moins en moins.  Ceci est l'une des dernières série situées dans son univers de Valdémar que je n'ai pas lu et ce n'est pas la meilleure.  Par contre, le plaisir reste là, ce qui va me pousser à continuer.

Je savais depuis longtemps que sa plume n'était pas exceptionnelle, mais n'ayant jamais lu l'oeuvre en version originale jusqu'ici, ça restait une question qui trottait dans mon esprit à savoir si c'était seulement la traduction qui empirait le tout ou non.  Réponse: non, ce n'est pas la traduction.  La plume de l'auteure est verbeuse et abuse des adverbes.  Par contre, son style simple et direct m'a plu pour sa facilité d'accès.  

Pour moi qui a lu plusieurs de ses oeuvres, je pouvais hocher la tête à certains moments du texte en me disant: ah oui, on est rendu là.  La trame de base est extrêmement semblable.  Ceci dit, Mags n'est ni Talia, ni Vanyel et encore moins Elspeth.  Propulsé dans un monde qu'il ne comprend pas, parlant avec un accent taillé au couteau dans un monde de raffinement (le texte original rend bien ses intonations rugueuse et son élocution traînante où il avale la moitié des syllabes), Mags comprendra qu'il peut enfin compter sur quelques personnes, malgré sa méfiance naturelle.  Sa relation avec Dallen, son Compagnon, est magnifique.  Tous les deux étant doué de Parler-par-l'Esprit (grosso modo, une forme de télépathie), leurs communications mentales sont à la base du récit, mais c'est surtout une forme d'union très particulière, une forme d'intimité qu'ils développent. Les autres personnages qui les entourent sont moins bien développés, mais restent crédibles.  Et le Héraut Jakyr pourrait bien revenir dans d'autres tomes.  Je l'ai bien aimé celui-là!

L'auteure ajoute une pierre à l'édifice de son oeuvre en posant cette opus dans une période charnière de l'histoire de Valdémar, à une époque où le Collégium des hérauts subit de profondes transformations, passant d'un système de mentorat à un système plus classique d'enseignement en classe.  Pour la fan de l'univers que je suis, ceci est un jalon manquant et je suis contente que l'auteure me raconte cette partie.  Mais reste qu'il faut être fan pour l'apprécier.

Ma note:3.75/5

mardi 22 septembre 2020

AAAAAAAAAAAAAAAAAAAHHHHHHHHHHHHHHHHHHHHHHH!!!!!!!!!!!!!!!!!!!!!!!!

 Voici un peu mon état mental de ce matin.  

Voyez-vous, il y a plusieurs années, lors de l'époque dorée où j'étais libraire, j'avais collaboré à une émission de télé communautaire (ne riez pas, ils faisaient de très belles choses!).  Quelque part, ça m'avait toujours manqué.  Oui, je blablate de livres ici, mais écrire sur des livres et parler de livres sont deux choses très différentes.  Ça m'a manqué de faire de la télévision.  C'était amateur, c'était fait assez rapidement, mais j'adorais ça.  Les archives de mes chroniques ont disparu de l'internet (si vous les retrouver, faites-moi signe!).  J'avais mis les liens sur ce blogue, mais bon, étant donné que ça avait disparu...

Mais voilà que début une émission littéraire radiophonique auquel plusieurs personnes que je connais bien participent...  J'ai écouté quelques épisodes et je me disais, ah oui, si moi je ferais des chroniques, je dirais ça ou ça ou ça. Ou ça.  Ou... Mariane, pourquoi tu ne t'essaierais pas?  J'ai demandé à un de mes amis comment contacter l'animatrice (merci à lui pour ses tuyaux!) et proposer mes services, offre qui a été, à ma plus grande joie, acceptée!

Alors voilà, j'aurais donc dorénavant une chronique à l'émission Bouquins & Confidences, diffusées sur les ondes de CKRL, les lundis de 18h30 à 20h.  J'ai moi-même choisi le sujet de ma chronique, soit les classiques.  Dans le cadre de cette chronique, je vais donc parler de livres publiés avant 1950, ce qui me donnent de vastes contrées à explorer, devant lesquelles je me sens comme un enfant devant un plat de bonbon se me demandant lequel choisir!  Ça permettra aussi de partager ma passion des vieux trucs, étant donné que mon penchant naturel à fouiller les racoins de la littérature.

Pour ma première chronique, c'est ici.  J'y parle des Contes des Frères Grimm.


Longue vie à cette émission!  Je suis toute excitée et je suis déjà en train de préparer la seconde chronique!

@+ Mariane

jeudi 17 septembre 2020

Tyranaël: 3- Mon frère l'ombre d'Élisabeth Vonarburg

 Tyranaël  tome 3  Élisabeth Vonarburg  Alire  353 pages


Résumé:

Mathieu est prisonnier d'un labyrinthe.  Une occasion se présente et il décide de s'échapper.  Pourquoi, y est-il enfermé?  Que découvrira-t-il au dehors?  Les réponses ne lui amènent que d'autres questions.

Mon avis:

C'est le troisième tome de Tyranaël et personnellement, pour moi, c'est le plus réussi.  Certes, on reste toujours dans le noir sur bien des sujets concernant la Mer, mais comme on suit le parcours d'un personnage qui est lui-même dans le noir, on s'attache à son point de vue.  On ne sait presque rien de plus que lui et on apprend tout à son rythme.

Mathieu est un personnage qui est à la fois naïf, touchant et en colère.  Une colère noire, une rage qui le consume de l'intérieur.  Il ne fait pas confiance, il a été trahi beaucoup trop de fois auparavant, mais il doit quand même continuer d'avancer.  Il fera des rencontres qui chaque fois, l'aideront un peu à comprendre, puis, petit à petit, lui permettront de faire jaillir un peu de lumière sur ce qu'il cherche à comprendre.  Le problème est qu'autant les autres que lui-même ne savent pas exactement ce qu'ils doivent chercher et progressent à tâtons.  On se retrouve dans une espèce de double-quête autant de l'intérieur (Mathieu et son cheminement) que de l'extérieur (le groupe qui l'aidera) qui permettra à Mathieu de commencer à comprendre, un peu.  

Bien des éléments nous sont compréhensibles si on a lu les deux premiers tomes, entre autre un personnage dont on devine bien qui il est réellement.  Par contre, on pourrait pratiquement lire ce tome de manière indépendante, tellement il se tient bien en lui-même.  L'auteure continue à nous ravir de sa plume et de ses descriptions précises et sensibles, mais aussi de nous maintenir quelque peu dans la «brume» de la mer, même si on est déjà au troisième tome de la série.  La finale surprend par un retournement qui ouvre beaucoup de possibilités.  Je ne l'avais pas vu venir et c'était très agréable.  À suivre dans le quatrième tome.

Ma note: 4.25/5