Anima Wajdi Mouawad Leméac/Actes Sud 388 pages
Résumé:
De retour du travail, Wahhch Debch trouve sa femme Léonie morte. Assassinée. Comme une termite, son meurtrier lui a ouvert le ventre et a violé la plaie, tuant au passage leur enfant. Rapidement, la police découvre qui est l'assassin, mais ne peut l'arrêter, car l'homme a trouvé refuge dans une réserve amérindienne. Wahhch part à sa recherche. Non pas pour se venger, mais pour voir le visage de l'homme qui a tué sa femme et aussi parce que le meurtre de Léonie a fait ressurgir en lui des souvenirs, de lointains souvenirs de sa petite enfance où on l'avait enterré vivant avec des bêtes...
Mon avis:
Ce roman est un animal à apprivoiser. Difficile, sauvage, mais puissant dans sa force d'évocation. Le destin de Wahhch est lié aux bêtes. D'ailleurs, Wahhch n'est jamais un homme agressif, jamais il ne lèvera la main sur une bête quelle quelle soit. Celles-ci le respectent et le considèrent comme l'un des leurs. À travers ce récit, toujours raconté du point de vue d'un animal qui est à ce moment-là près de Wahhch, peu importe qui il est (mouche, araignée, chien, chat, rat, abeille, singe, renard), on suit Wahhch dans ses errances. Il cherche à voir le visage de l'assassin de sa femme, mais aussi à faire taire ces images qui ressurgissent du fin fond de sa mémoire, des images où enfant, on l'a enterré vivant, entouré de bêtes. Plus sa quête continue, plus ces souvenirs enfouis ressurgissent. Et c'est là que réside la clé du roman. Le meurtre de sa femme provoquera une réaction en chaîne en Wahhch qui le ramènera vers son passé. L'écriture est étonnamment adaptée à ses nombreux narrateurs. Quand le narrateur est un chat, on sent sa félinité, une araignée, on voit le monde à travers ses perceptions des vibrations sonores et quand c'est un singe, on voit le monde à travers ses yeux presque humains. Tous l'accompagnent d'une façon ou d'une autre. Ils lui nuisent, l'aident, ne font que le regarder. Tous les chapitres sont annoncés par des noms d'animaux en latin, indiquant l'espère précise de chacun d'entre eux. Parfois, le texte suffit à savoir de quel animal il s'agit, à d'autres moments, il m'a fallu faire appel à mon cher Wikipédia. Dans tous les cas, on sentait l'animalité dans le récit, même dans la dernière, pourtant racontée par Homo Sapiens Sapiens. Fait surprenant, la quête de Wahhch à travers les États-Unis suivra le cours de sa quête intérieure par le nom des villes qu'il traverse. Hasard? Sûrement pas. Mais disons que les coïncidences donnent une autre saveur au récit. Et permettent de mieux le sentir. À ne pas lire dans un moment de découragement, c'est très sombre comme récit, mais en même temps, très lumineux, car à travers la folie et la cruauté des hommes règne la bonté des animaux qui ne sont ni bons ni méchants, seulement eux-mêmes en toutes circonstances.
Ma note: 4.5/5
Je remercie Leméac et plus particulièrement Josée pour ce service de presse.
4 commentaires:
Celui-là était dans ma pile à lire depuis un bon moment... avec cette critique, il vient de remonter... il était au 19e rang, il passe au 3e... et tant pis pour Charles Dickens, David Brin, Kim S. Robinson et quelques autres... :P
Ce genre de critique ne peut faire autrement que donner le goût de lire ! Merci, Prospéryne !
Rien a voir avec Anima, que je n'ai malheureusement pas encore lu mais 21e dans ma PAL...
Dans ta chronique "Aujourd'hui" j'ai ADORÉ Regarde-moi, j'ai hate de lire ta critique!
Coïncidence, le doux-précieux est revenu à ma table de dédicace, dimanche, avec ce roman sous le bras. M'étonne de lui. Mais, à te lire, je crois qu'Anima va m'intéresser.
@Sébas, Charles Dickens est mort, alors il s'en fout, David Brin et Kim Stanley Robinson parlent uniquement en anglais alors quand bien même que tu dirais que tu vas retarder la lecture de leurs oeuvre, ils le sauront pas, alors zéro problème pour Anima! ;)
@Jean-François, chose qui ne devrait pas tarder j'ai lu d'une traite presque le tiers du livre hier!
@Sylvie, je l'espère, mais je répète, pas à lire dans un moment de déprime!
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