lundi 30 avril 2012

L'essai vs le roman

Salut!

Lire des essais, j'aime beaucoup ça.  Je n'en lis pas beaucoup hélas parce que je trouve que l'investissement en temps que cela demande est beaucoup trop important.  Ça demande du temps et de la concentration de lire un essai, même s'il est bien écrit et bien vulgarisé.  Pourtant n'aller pas croire que la lectrice de romans que je suis ne fasse pas preuve d'exigences.  Ni que le fait de lire des romans n'est pas aussi instructif.  Tout dépend comment on le prend.

Un essai, c'est présenter un sujet en profondeur, à l'aide d'arguments, d'exemple, mais de manière structurée, professorale même dans certaines cas.  Un essai est là pour nous convaincre de quelque chose.  Pour nous démontrer la justesse d'une idée.  Pour nous instruire, mais surtout pour nous démontrer le système de pensée construit par quelqu'un sur un sujet quelconque.  C'est plus exigeant à la lecture parce que le fait que l'auteur ne cherche pas à enrober sa pensée pour la faire passer demande plus d'attention du lecteur, parfois plus d'érudition, mais surtout plus de concentration.  Je suis incapable de lire un essai de façon légère, non, pour bien comprendre l'auteur, il faut se concentrer dessus, laisser ses autres livres de côté pour quelques temps et plonger dans ce bouquin-là en particulier.

Un roman par contre, c'est tout le contraire.  La forme artistique laisse beaucoup de place, même si les sujets abordés peuvent être tout à fait les mêmes.  Un essai sur l'utilisation de l'énergie nucléaire et ses dérives?  Utiliser un bon roman de science-fiction pour démontrer ses effets et le sujet passera aussi bien, sinon mieux.  Un essai qui défend le droit à l'avortement?  Mettez en scène une femme et le déchirement qu'elle vit face à ce choix.  Un essai historique pour démontrer les abus des conquistadors espagnols?  Vous avez deviné, le roman utilisera la fiction, des personnages, des mises en situation pour montrer la réalité d'une autre façon.  Et le message passera, que la personne assise ou train de lire en soi consciente ou non.

Parce que parfois, le message est subtil dans les romans, il faut savoir lire entre les lignes pour le comprendre.  Mais il est bien là.  Combien de personnes ont vu la critique anti-xénophobe dans Harry Potter?  Car les enfants de moldus, c'est cet autre qui vient d'ailleurs et avec lequel on doit vivre chez soi.  Les 7 tomes sont un plaidoyer pour l'acceptation des autres dans leurs différences et les Mangemorts, l'incarnation de ce refus.  Les Hunger Games, c'est un plaidoyer contre la toute-puissance de l'image sur la réalité et de la déréalisation du monde.  Dans certains romans, la critique est claire, nette et précise, dans d'autres non, mais en filigrane, il y a toujours l'intention de défendre une idée, une façon de voir le monde et les péripéties des personnages correspondent aux arguments de l'essayiste.  C'est ainsi que Stephenie Meyer défend la vision mormone de l'amour et du mariage dans Fascination en utilisant un contexte différent, mais qui revient exactement au même: on baise pas avant d'être mariés et Monsieur doit défendre la faible Madame.  À travers son imaginaire, elle a défendu sa vision du monde en la rendant accessible à des jeunes qui n'auraient certes pas accroché au discours moralisateur que d'autres personnes utilisent.

Je me rappelle avoir été bouleversée par la lecture de La virevolte de Nancy Huston parce qu'elle y questionnait les limites de l'amour maternel, du sacrifice de soi pour ses enfants quand on est une femme.  Et pourtant, nulle part dans le livre, on ne donnait d'arguments pour ou contre ce fait.  On suivant simplement le personnage de Lin dans ses questionnements, ses choix, ses doutes et ses craintes.  Plus tard la même année, j'avais lu l'excellent essai, Le conflit, la femme et la mère d'Elisabeth Badinter sur exactement le même thème.  Dans les deux cas, on explorait la maternité et ses répercussions sur la vie d'une femme, mais les deux approches étaient complètement différentes.  Néanmoins, dans les deux cas, le message passait et était parfaitement compréhensible.  C'est seulement la manière de l'exprimer qui était différente.  Pour convaincre un gouvernement de changer ses politiques, l'essai s'applique mieux.  Pour faire passer un message au niveau des émotions, le roman convient davantage.  Chacun a ses forces et ses faiblesses.  C'est pourquoi ils se complètent si bien.

@+ Prospéryne

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