vendredi 17 juin 2011

La fille qui parle de livres à la télé le dimanche matin...

Salut!

Un truc que vous apprenez rapidement quand vous êtes libraire, même si vous n'écoutez jamais la télé et que le dimanche matin chez vous est consacré à la farniente informatique en bonne et due forme: ya une fille qui parle de livres à la télé le dimanche matin.  Son nom: Christine Michaud.  Son émission: Salut Bonjour! Week-end  Son rôle: Chroniqueuse littéraire.  Son impact: Majeur, ça je peux vous le dire!  Ya aussi un type le soir qui en parle, tard, à TVA.  Son nom: Denis Lévesque.  Son émission: Denis Lévesque (très original!) Son impact: Dépendant des livres et des invités.  Facilité de retrouver les titres et les auteurs dont il parle?  Bonnet d'âne...  Ya aussi Tout le monde en parle, mais ça, ça se passe de présentation et c'est pas toujours de livres qu'on parle.  À la radio, il y a Paul Arcand (des fois), Christiane Charest (avait), René-Homier Roy.  Il y La Presse, Le Devoir.  La revue Le Libraire aussi.  Bref, ce sont des endroits où l'on parle de livre et qui emmène les gens en librairie.  Croyez-le ou non, mais ces médias ne sont pas si nombreux que ça.

Je me demande parfois si ce sont les gens qui boudent vraiment le livre.  À voir les gens se précipiter au Salon du livre et autres événements littéraires, je doute fort que ce soit le goût des gens le problème.  Mon opinion est faite là-dessus depuis longtemps: les médias ne savent pas trop comment parler de livres.  À quelques exceptions près, le message ne passe pas.  Christine Michaud réussit très bien à le faire passer, mais contrairement à beaucoup d'autres chroniqueurs, elle est avant tout une lectrice.  Ce n'est pas une auteure, une diplômée en littérature ou une personnalité artistique: c'est une lectrice d'abord et avant tout!  Et c'est à mon avis sa grande force, elle ne se prend pas pour une autre, elle parle des bouquins qu'elle aime avant tout.  Rien de mieux pour transmettre sa passion du livre que de parler de quelque chose qui nous passionne et qui intéresse vraiment.  Même le plus ardu des livres, présenté par un mordu qui va en parler avec ses trippes va aller chercher son public de lecteur.  Encore faut-il que ce mordu ait une petite place au soleil pour en discuter.

Car soyons honnête, qui parle de livres dans les médias et dont le message passe?  Oui, c'est ça, vous avec compris, il y en a, mais vraiment pas tant que ça.  Je me rappelle avoir vu une rétrospective de l'année artistique à la télévision un 31 décembre où on s'attardait longuement sur les sorties cinématographiques, théâtres, musicales, de danse, même les spectacles mixtes de l'année, les expositions, tout... Et pas un mot sur les livres de l'année.  Comme si ça ne comptait pas, comme si c'était un domaine artistique à part et refermé sur lui-même au lieu d'un domaine majeur et tellement branché sur le monde!  Alors, on en parle pas.  Ou si peu.  Et bien souvent, les nombreuses et défuntes émissions littéraires étaient d'une qualité variable, comme si parler du livre était compliqué.  Tiens, comme si parler du livre était comme parler du vin, il faut des experts, on ne peut pas s'improviser, on ne peut pas non plus en parler comme si c'était quelque chose faisant partie de la vie quotidienne, y compris les chefs-d'oeuvre, on met ça sur un tel piédestal que la majorité regarde les livres et en ont peur.  C'est démocratique la littérature.  Je connais très peu d'auteurs qui ont volontairement essayé d'écrire pour être obscur ou inaccessible.  Il se sont exprimés de la façon qui leur convenait le plus.  Faire le pas pour les comprendre demande parfois un effort, mais rien comparé à monter le Mont Everest ou encore essayé de calculer le chiffre Pi jusqu'à ce qu'on trouve la fin.  Quelques clés bien simples trouvées sur Wikipédia ou une bonne préface suffisent largement la plupart du temps.  Alors pourquoi vouloir faire compliqué quand on peut faire simple?

Les médias et les livres ne s'entendent pas bien on dirait.  Il y a une longue histoire derrière ça.  Je me rappelle avoir lu un excellent essai sur le sujet il y a quelques années: La grande peur de la télévision, le livre de Jacques Keable.  Une lecture marquante où un point ressortait clairement: le meilleure moyen de ne rien censurer est de tout censurer.  En ne parlant pas de livres, on ne parle pas de ceux qui dérangent, tout comme on ne parle pas de ceux qui pourraient être «sans danger»: pas trop controversé, pas trop dérangeant, juste assez correct pour être vendeur, belle présentation, tout.  Est-ce encore comme ça?  Je ne sais pas, mais une chose est sûre, le grand gagnant de ce silence médiatique, ce n'est pas le public ni les livres.  Et je ne pense pas non que ce soit les médias.  Alors, qui?

@+ Prospéryne

2 commentaires:

ClaudeL a dit…

Pourtant, dans la blogosphère, ce n'est pas ça qui manque des blogues sur les livres.
Je pensais à Bernard Pivot, qui pourtant n'était pas un animateur très dynamique. ça faisait sérieux en titi son émission, les invités étaient souvent d'un ennui mortel tellement ils s'écoutaient. Tout de même la longévité de l'émission a dû rendre service à la littérature, à la diffusion des livres, et mener à l'achat de livres. J'ose le croire.
Au Québec, me semble qu'on pourrait trouver un animateur passionné, une formule intéressante. Après tout en sport, on trouve, on invente, on colle aux besoins des auditeurs.
Je me console en me disant que ce n'est pas mieux dans le domaine de la peinture figurative. Non la culture au Québec n'est pas vendeuse. Dommage.
Il faudrait quand même faire l'essai: chaque soir aux nouvelles, enlever trois minutes de reportage des meurtres, procès et affecter un journaliste à trois minutes de plus pour la culture. Je sais il y en a déjà un tout petit peu à Radio-Canada, mais doser le minutage. Je me demande si plus de culture et moins de "faits divers" affecterait le comportement des gens. On tuerait peut-être moins et on lirait plus, ce serait bien, non? À condition bien sûr de ne pas lire que du polar!

Prospéryne a dit…

Je n'ai jamais vu l'émission de Bernard Pivot ClaudeL, je suis trop jeune pour ça :D Mais je suis d'accord, on fait preuve de beaucoup d'imagination pour trouver des concepts intéressants dans tous les domaines et quand vient le temps de parler de culture en général, on revient toujours aux mêmes formules éprouvées. Tellement dommage! Et oui, couper quelques minutes de meurtre pour parler de peintres, de danseurs, de poètes et d'écrivain au bulletin de nouvelle ne ferait pas le moindre tort!