Salut!
Je me rappelle, il y a quelques années, avoir lu dans un livre un passage où les mots et les images évoquées pouvaient avoir deux signification très différente. Il s'agit du Livres des choses perdues de John Connolly, un roman que j'avais adoré. L'enfant qui lisait ce livre (techniquement, le livre était destiné autant aux enfants qu'aux adultes) y voyait une scène où un enfant était dans une sale situation, mais sans comprendre ce qui se passait. Un adulte lisant le livre y comprenait que l'auteur y parlait d'une agression sexuelle. Les mots, la manière de les exprimer, tout avait été soigneusement choisi pour produire cette dualité: Même texte, deux niveaux de lecture complètement différents.
Certains textes pouvant être lus autant par les adultes que par les enfants ont souvent ce principe caché, comme des poupées russes. On cache une idée du texte dans un passage dont le sens peut être interprété différemment selon que l'on connaisse ou non la situation auquel on fait allusion. Les enfants ont moins de connaissances générales sur le monde dans lequel il évolue, il va rater des des références, des allusions, des messages. L'adulte, lui, les verra. L'enfant lit le texte qu'il a sous les yeux, sans comprendre les enjeux plus généraux qui l'entourent.
Cela peut valoir pour de petites choses, comme le passage du Livre des choses perdues ou d'ensemble beaucoup plus vaste. La série À la croisée des mondes de Philip Pullman est, si on y est attentif, une critique virulente de la religion et de ses institutions. Pourtant, un enfant qui lit la trilogie ne comprendra pas nécessairement la critique, emporté par l'histoire de Lyra et Will. C'est quand l'on regarde les thèmes, la façon dont l'histoire est traitée, les allusions (royaume des cieux, le fruit rouge, les anges) que l'on comprend tout. À la base, on a une excellente histoire, c'est certain, mais la critique portée par l'intrigue va beaucoup plus loin. Cependant, un enfant n'a pas les connaissances et la compréhension nécessaire pour voir la critique. Même moi, qui était adulte au moment de la lecture, je n'ai pas vu passer tous les éléments, sauf les plus évident. C'est en la faisant trotter dans ma tête par la suite que j'ai vu toutes les allusions.
La même chose m'est arrivée avec les Chroniques de Narnia. C.S. Lewis, au contraire de Pullman, était un croyant convaincu. Cela se ressent à la lecture de ses célèbres Chroniques. Aslan, figure christique s'il en est une, représente bien la vision du monde de l'auteur. D'ailleurs, les Chroniques ne sont qu'une petite partie de son oeuvre comparé aux livres qu'il a écrit sur la religion chrétienne et qui font qu'il est encore très connu et reconnu dans certains cercles.
Les deux séries peuvent se lire de façon totalement indépendante aux idées de leurs auteurs. D'ailleurs, je les aies d'abord et avant tout aimée pour leurs qualités littéraires! Les thèses défendues par leurs auteurs face à la religion sont une forme de sous-texte. Cela parcours l'histoire, la transporte, la fait vivre, la transforme, mais on a pas nécessairement besoin d'être conscient de cette réalité pour suivre l'histoire. Ainsi, on trouve deux niveaux de lecture complètement différents dans le même livre. Et cela pourrait aller plus loin encore, les niveaux de lecture étant comme les poupées russes: ils s'emboîtent les uns dans les autres.
Il n'est cependant souvent pas nécessaire de comprendre tous les niveaux de lecture d'une oeuvre pour l'apprécier à la sa juste valeur. J'ai ici parlé d'oeuvres destinées à la jeunesse, mais cela peut être la même chose avec des oeuvres pour adultes. Et la relecture de certaines oeuvres peut aussi permettre de comprendre certains passages parce qu'entre temps, on a appris de nouvelles choses qui nous permettent de comprendre davantage l'intrigue.
@+ Mariane
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