Salut!
J'écoutais l'autre jour une entrevue de Serge Bouchard. Il y parlait du cinéma québécois et soulignait à un moment deux grands absents de notre cinéma (selon lui): les camions, liés au transport, à la distance et les Amérindiens. Bon, de la part, de Serge Bouchard, ce genre de réflexion n'est pas insolite, surtout quand on sait à quel point il travaille pour réhabiliter la place des Premières Nations dans notre imaginaire national et collectif. N'empêche, si sa réflexion s'adressait au cinéma, le même constat peut être fait dans la littérature. Quand parle-t-on des Amérindiens, des Premières Nations dans notre littérature?
Je crois que mon souvenir le plus lointain qui y est attaché est une phrase dans Les filles de Caleb, que j'ai lu jeune adolescente. Émilie disait à ses deux filles de prendre leurs catins (poupées) et d'aller chez leur grand-mère, en leur disant de passer le message que les Sauvages s'en venaient. C'était à l'époque la formule consacrée pour parler d'un accouchement. Petite formule, mais qui en dit long sur la vision des gens des Amérindiens, parce qu'on laissait croire aux enfants que leur mère était couchée parce que les Sauvages l'avaient battue! Par la suite, je les aies croisés dans de nombreux romans: souvent alcooliques, presque toujours pauvres, ayant rarement un emploi, vivant dans les réserves. Ah si, un des personnages du Grand Blanc de Francine Ouelette était un Amérindien, qui travaillait, avait une femme, une famille... Et n'était pas un alcoolique, bien qu'il raffolait du fast-food. Un portait un peu plus juste déjà. S'il est certain que la pauvreté et l'alcoolisme font des ravages dans les réserves amérindiennes, il est extrêmement réducteur de ne considérer que cet aspect de leur réalité.
Depuis quelques années, on assiste à un changement dans le domaine. De plus en plus de livres et de romans, abordent la question des Amérindiens, de leurs droits, de leur culture et de leur place au sein de notre société. De leur histoire et de leur importance sur notre culture également. Pourtant, il me semble que la prochaine étape est qu'ils envahissent eux-même les livres. Il y a peu de livres écrits par des auteurs amérindiens. La seule notable que je peux citer est L'amant du lac de Virginia Pesemapeo-Bordeleau. La première fois que je vois un nom amérindien sur une couverture de livre, un nom à consonance amérindienne. Sans doute y en a-t-il eu d'autres, du moins, je l'espère de tout coeur, mais reste que c'était le premier que je voyais.
Je me rappelle le duo Kashtin qui a fait sa marque il y a déjà une vingtaine d'années. Ils chantaient dans leur langue maternelle et pourtant, cela ne les a pas empêché de connaître le succès dans le domaine musical. Certes avec la littérature, la barrière de la langue doit être franchie, mais reste que l'imaginaire, l'univers dans lequel baignent les Amérindiens peut être traversée et peut venir nous toucher, nous rejoindre, nous parler. Même si parfois, malgré la proximité géographique, leur univers peut sembler si loin de nous.
Ah si, j'oubliais: Yves Thériault. Son Agaguk a fait connaître l'univers des Inuits à des milliers d'élèves du secondaire. Il n'était pas Amérindien, mais il a su écrire sur eux. Personnellement, j'ai lu Le ru d'Ikoué, un magnifique petit livre, bref, mais intense, qui sait donner sa parole à la sagesse amérindienne et à sa façon de voir le monde. Un livre qui date de 1963, preuve que des liens existent depuis longtemps entre notre littérature et leur univers. Le récent Mort-Terrain de Biz donnait également la parole aux Algonquins. On ne peut qu'espérer que cela n'aille qu'en s'élargissant. Car il n'est pas de meilleure portée d'entrée sur un peuple que son imaginaire.
@+ Mariane
2 commentaires:
Les minorités de toute sorte sont les grandes absentes de notre littérature. Grâce à Dany Laferrière, on a quelques haïtiens (ah tiens et Joël nous en a mis dans La peau blanche aussi), mais sinon, la littérature québécoise c'est blanc de blanc d'une couverture à l'autre.
Hélas!
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