lundi 7 janvier 2013

La violence en littérature est-elle pire qu'au cinéma?

Salut!

Lors d'une discussion à bâtons rompus avec un gars que je connais, il me déclare avoir très hâte d'emmener son fils de 6 ans voir les Avengers.  Surprise, je lui fais la remarque que celui-ci est peut-être un peu jeune pour ce film.  Ça ne semblait pas lui causer de problèmes.  À l'inverse, j'ai vu plusieurs parents d'ados littéralement fuir Hunger Games parce que c'était beaucoup trop violent.  Pourtant, les deux sont violents, pourquoi la violence dans un livre serait-elle pire qu'au cinéma?

Quand on parle de violence, il y a différentes façons de la voir et de l'aborder.  Avengers fait dans la violence cool, on la tourne au rire, on en fait une occasion de voir un film d'action et de s'amuser de ça.  Hunger Games dénonçait la même violence.  Cette fois, on en riait pas, bien au contraire.  Un peu à la manière dont les jeux du cirque romain étaient un divertissement pour les gens dans les gradins et une terrible réalité pour ceux qui étaient dans l'arène.  Et puis, il y a une différence entre montrer la violence et la décrire.  Si on voit un personnage se prendre une balle au grand écran, on sait qu'il a mal, mais si on décrit la même scène, la douleur prendra plus de place dans la description.  On peut beaucoup moins facilement la fuir.  Peut-être est-ce pour ça qu'on trouve la violence pire dans les livres.  Il est plus difficile de la tourner à la blague, d'en montrer le ridicule, d'en faire quelques chose de drôle.  De nous mettre sur le bout de notre chaise, oui.  De la dénoncer, oui.  De nous faire entrer dans la tête de la personne qui la fait ou qui la subit, oui, mais en même temps, on sera plus profondément dans l'être de la personne, parce que l'écrit nous permet d'être entièrement dans sa tête, dans son corps, dans ses émotions.  D'une certaine façon, c'est peut-être ce qui rend la violence pire.

Autre détail, on ne peut pas tout montrer dans un film.  Il y a une limite à ce que le cinéma, l'image peut montrer.  En littérature, non, il n'y a pas de limites.  Aucune.  On peut tout montrer, tout dire.  Il n'y a pas la pudeur d'un acteur ou d'un actrice à protéger, les limites de la décence à surveiller ou encore la capacité de supporter de tels images à prendre en compte.  Il n'y a aucune limite.  Et on est plus proche des personnages que l'on ne le sera jamais au cinéma parce qu'on est dans leur tête.  Cela rend-t-il la violence en littérature pire?  Non, mais plus réaliste, plus proche, plus puissante.  Et je peux comprendre que cela rende certaines personnages plus chatouilleuse à son sujet.

@+ Mariane


6 commentaires:

Liceal a dit…

Très intéressant comme réflexion.
La violence dans un livre m'atteint différemment que celle des films. Un livre me reste plus dans la peau qu'un film, j'y repense plus souvent. J'ai l'impression que l'image a un aspect plus fugace que l'écrit.

Prospéryne a dit…

@Liceal, l'image est peut-être plus forte sur le coup, moins peut-être moins à long terme. Mais ça reste une question de perception...

Gen a dit…

Je pense surtout que les parents ont peur de l'aspect "sans censure" des livres. Et du réalisme, oui.

Parce que quand on montre une bataille à grand déploiement, on oublie qu'elle est composée d'individus qui souffrent. Dans un livre, s'il est bien fait, pas moyen d'éviter cet aspect.

Et de nos jours, les parents semblent avoir bien plus peur de montrer la réalité à leurs enfants que de quoi que ce soit d'autre!

Gabrielle Syreeni a dit…

Excellent billet.

Je suis d'accord avec toi. Il m'est plus facile de voir un film bourrer de scènes de violence que de lire un livre où la violence et les éclats de gore* sont en quantité.

Toutefois, il y a des films qui m'étourdissent, me forcent à fermer les yeux. Des films sur des réalité (comme la guerre, des emprisonnements, des martyrs) et de films de fictions (Misery, Décadence). Y'en a qui jouent vraiment fort sur le côté émotionnel.

*Ici, je pense particulièrement à un ouvrage que j'ai lu récemment... :-/

Gabrielle Syreeni a dit…

Par ailleurs, je trouve fautif de croire qu'Hunger Games est un film ou un livre à éviter. Tous deux sont des oeuvres remarquables. (Bon, peut-être un peu moins pour le film) Dans tous les cas, ce sont des racontars qui ont été entendu et cru. Bon, il est vrai que certaines scènes sont... disons... prenantes. Mais guère plus odieuses que d'autres films bien plus monstratif.

Prospéryne a dit…

@Gen, peur de montrer la réalité aux enfants? J'ai bien peur que ce soit vrai! Et concernant ton commentaire sur les batailles à grands déploiements, c'est très juste! Moi, quand je vois ça au cinéma, je pense aux gens qui ont perdu une jambe ou une main dans la bataille. Le genre de choses qui bouleverse une vie.

@Gabrielle, souvent, la violence au cinéma est tournée en humour. Y'a qu'à voir le cinéma de Quentin Tarantino pour le comprendre! Voilà pourquoi on la supporte mieux, mais certains films sont là pour la dénoncer et c'est tant mieux. Pour les livres, je ne sais pas comment un auteur pourrait tourner en humour une scène de violence aussi facilement. À mes copains auteurs de répondre là-dessus!