lundi 9 septembre 2019

Du pain et des séries télés

Salut!

Depuis un certain temps, j'observe le web et je constate un phénomène intéressant, quoique inquiétant: les fans.  De séries télés, de films, de mangas et de bien d'autres choses.  Les gens se regroupent sur Internet, à l'affût du moindre spoilers sur le film ou la série télé qui va bientôt sortir.  Ils se perdent en conjonctures, en supputations, en folles théories sur ce qui va advenir de leurs héros et héroïnes favoris.  Et quand un nouveau film/épisode/livre sort qui ne correspond pas à leurs désirs sort, c'est la déferlante: Twitter et Facebook se gorgent de message de haine et les créateurs passent à la version réseaux sociaux du tabassage en règle.  Que d'énergie les fans mettent-ils dans ces fictions!

Pendant ce temps, nos écosystèmes meurent à cause de nos habitudes de vies, nos gouvernements prennent des décisions qui ne sont pas toujours dans l'intérêt commun, des entreprises font des affaires pas super catholique/anglicane/musulmane/hindouiste/ou/ce/que/vous/voulez/d'autre, des milliers d'êtres humains meurent dans l'indifférence à cause de guerres sans fin...  mais on voudra absolument comprendre comment les scénaristes ont pu rater à ce point la fin de Games of thrones.

Panem et circenses.  Dans la Rome antique, c'est ainsi que l'on dénonçait la politique de certains empereurs de nourrir le peuple et de le divertir pour le détourner des questions importantes, mais aussi plus exigeantes.  On fournissait au peuple du pain et des jeux du cirque et il se tenait tranquille.  Marvel et le cirque romain, même combat?  C'est très réducteur que de dire ça, mais...

Mais, c'est justement ça, il y a des liens.  Ce n'est plus le pouvoir qui organise le divertissement des masses, mais avouez qu'il doit y avoir quelques politiciens qui apprécient vraiment le fait que les gens soient plus préoccupés de la sortie du nouveau Star Wars que de leur projet de loi!  Ce n'est peut-être pas le fait d'une volonté de détourner les gens de la politique, mais l'effet reste quand même présent.

On dirait que c'est devenu plus important de se divertir que de s'informer.  Personne ne sourcille devant le prix d'un billet de cinéma, mais on renâcle devant le prix d'un journal.  Pourtant, le journal, c'est souvent le lien qui nous relie au monde, à l'information nécessaire pour le comprendre, en suivre les dossiers, les enjeux, tout ce qui a un impact sur notre vie réelle.  Beaucoup qu'un film auquel on consacrera deux heures et qu'ensuite, qu'on oubliera parfois en sortant.  Même si on l'a attendu impatiemment durant des mois.

Il faut le dire, les experts en marketing font des pieds et des mains pour entretenir cette passion des fans.  On nous distille de petits bouts de films parfois même chaque jour pendant des semaines, on multiplie les bandes-annonces, les conférences de presse où tout le monde fait semblant de se retenir de parler pour mieux laisser un petit morceau d'information tomber, presque par inadvertance...  Toute cette énergie, toute cette passion, est alors centrée vers le divertissement plutôt que vers le reste de la vie.

Et il faut le dire, le reste de la vie, si on le compare, c'est plutôt fade à comparer.  Il n'y a pas de grand méchant à vaincre à la fin, il n'est même pas sûr qu'on va vaincre.  Le combat sera rude dans certains dossiers et il demandera un très grand engagement.  Parlez-en aux militants, peu importe la cause!  Faire bouger les choses peu demander des années, des décennies parfois, avant de voir un changement.  La satisfaction du divertissement est à comparer immédiate, facile, hyper-accessible... et surtout, elle ne demande aucun engagement sur le long terme.  On aime pas ce film?  On ferme la télé, c'est tout.

Évidemment, tout n'est pas si noir, une grande quantité d'individus sont engagés dans une grande variété de causes et ce quelque soit le nombre de séries télés fascinantes qui puissent exister.  N'empêche, je ne peux m'empêcher de penser que Netflix et Disney sont peut-être les formes modernes des fameux jeux du cirque romain..

@+ Mariane

4 commentaires:

Alain a dit…

Je ne pense pas que ce phénomène soit particulièrement nouveau. L'intensité d'un fan pour ses séries préférées est-elle bien différente de celui du partisan des Canadiens qui écoute les lignes ouvertes sportives même en plein mois de juillet? Ou de ces gens pieux qui organisaient leur vie autour des activités de leur paroisse?

Je pense que l'on peut aussi prendre la question à l'envers: est-ce qu'on se désintéresse de la politique car les sources de divertissement sont trop attrayantes, ou est-ce plutôt que la situation politique actuelle suscite en elle-même peu d'engagement (sans égard aux causes importantes qui méritent notre attention!)

Peut-être la politique contemporaine apparaît comme trop lointaine pour beaucoup de gens? Quand il y a un enjeu très local, c'est souvent là qu'on voit les gens se réveiller - et même agir de manière excessive!

Gen a dit…

Ah ah ah! Mais c'est clair que Netflix et Disney sont les formes modernes du cirque romain. Et dire que c'est pas organisé par le pouvoir, c'est encore généreux. C'est à cause de qui que les cours de politique et de droit ont disparu des écoles secondaires? Et les cours d'économie? Et les cours d'écologie? Et que l'histoire est désinfectée au possible, pis sous-valorisée? La meilleure façon de s'assurer que le peuple veuille du divertissement, c'est de faire en sorte qu'il n'ait plus les outils pour réfléchir à autre chose.

Ou qu'il soit tellement découragé du réel qu'il préfère aller s'anesthésier devant la télé.

Oui, c'est décourageant. Cependant, en même temps, quand on écoute Game of Thrones avec un oeil critique et qu'on remarque qu'aucun dirigeant ne semble croire que "Winter is Coming", ça peut aussi faire réfléchir. ;)

Prospéryne a dit…

En effet, on a pas beaucoup de rêves ou de projets de société porteurs comme dans les années 1970. Faudrait y revenir, ça ferait changement des théories de la conspiration sur comment Capitaine America a fait pour revenir sur le banc de parc à la fin du film.

Prospéryne a dit…

C'est pas l'hiver qui vient pour nous par contre, c'est l'été avec les réchauffements climatiques... :(