Salut!
Vous savez, quand on veut présenter des gens snobs, on les montre souvent prenant le thé, lèvres pincés et toujours, toujours, le célèbre petit doigt bien en l'air. Ce geste, archi-caricaturé, montre que certaines personnes aiment se distinguer, montrer qu'ils ne font pas parti du bas-peuple, qu'ils sont mieux que la plèbe. Leur petit doigt en l'air est un symbole fort: celui de l'Élite dont ils font partie. Certains lecteurs sont également comme ça.
Ils lisent la crème de la crème, pas la plèbe. Les essais pointus, les livres bardés de prix littéraires, les oeuvres dites inaccessibles, ils en font leur pain et leur beurre. Rien à redire là-dessus au départ. Après tout, chacun ses goûts! Non, là, où ça se corse, c'est quand leur auriculaire se dresse au-dessus de la page. Parce que aimer lire des trucs pointus et lire des trucs pointus parce qu'on veut être mieux que les autres n'est pas la même chose. Entre la recherche dans le goût et le dédain des ouvrages populaires, il y a un pas.
Il faut les voir, ces partisans de la ligne dure en lecture. La ligne est clairement tracée entre eux et le reste du monde qui se contente de miettes littéraires, de plaisirs populaires que les gens consomment sans, soit disant, se rendre compte qu'ils se contentent de sous-produits. Eux, l'Élite, ils sont différents, ils exigent de la qualité, ils savent se distinguer. Ils sont au dessus du commun des mortels qui vont se délecter du dernier roman à la mode. Du moins de leur point de vue.
Il y a là une large question de perception. Et les ouvrages lus ne sont pour rien en cause. La question est externe à la lecture, externe à la littérature. Elle touche un certain pédantisme, un certain snobisme dur à ignorer. Que l'on vise le meilleur, le mieux, c'est sain, c'est normal. Mais que l'on utilise cela pour regarder de haut les autres... Mettons qu'il y a une différence. Tout simplement parce qu'il n'y a pas de lectures pour l'Élite. Il n'y a que des gens ayant des goûts différents. Ok, certains ouvrages sont plus difficiles d'accès, plus complexes mais la personne qui tient le bouquin n'est pas meilleure pour autant. Ni en tant que personne, ni en temps que lecteur. Le simple gros bon sens a toujours existé parmi toutes les couches de la population et ce n'est pas la lecture des grands philosophes qui ont empêchés les hommes en situation de pouvoir de faire des gaffes monstrueuses.
Autant en lecture que dans tous les autres aspects de notre vie, nous faisons tous partis de la masse, du populaire, de la plèbe. Vouloir se dire que l'on est mieux que les autres, que ce soit par nos lectures, notre habillement, notre façon de vivre relève d'une volonté de se couper du monde. Différent n'est pas synonyme de mieux, pas plus que de dangereux. Par contre, se dire meilleur que les autres implique une coupure mentale entre le nous et le eux. Ce genre de coupure, subtile en apparence, peut finir par creuser des gouffres. Et à causer beaucoup de tort parce que l'on oublie trop facilement que la personne en face de nous reste avant tout un être humain.
Je suis de celles qui apprécient les bons ouvrages, bien écrits et qui pestent contre les horreurs que l'on retrouve parfois sur les tablettes des librairies (et oui, ça existe!). Par contre, je ne dresse pas mon petit doigt en lisant. Si un livre est mauvais, il est mauvais, ça ne fera pas de moi un membre de l'Élite que de le juger. Un mauvais livre aura toujours le mérite sur un excellent livre pas encore écrit d'exister. Et le temps fait souvent le tri entre le bon grain et l'ivraie de façon diablement plus efficace que les préjugés.
@+ Mariane
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