Prise dans une relation tordue avec Geoffroy, un français égocentrique et obsédé, Lucie décide de tout plaquer et quitte la ville. Elle roule sur la 117 jusqu'à tomber en panne et s'installe un peu par manque d'option dans un petit village où elle est bien vite adoptée par le propriétaire du motel, sa barmaid et son cuisinier. Tout en noyant son mal-être avec du Jack Daniel's et une tonne de fumée, Lucie se mêlera à la faune locale ce qui lui permettra de découvrir que son auteur préféré, Korsakoff, habite dans le coin, écrivain noyé lui aussi dans l'alcool et engagé dans une destruction expiatoire de son oeuvre. L'écrivain lui ouvrira les portes de quelque chose que l'on pourrait peut-être bien appelé un début de paix avec elle-même. Si on sait lire entre les lignes.
Critique:
Une chose est sûre au départ: ce n'est pas avec ce livre que l'on ferait passer un alcootest réussi à la littérature québécoise! Et la quantité de fumée qui se retrouve dans ce bouquin est aussi considérable. Passons ces quelques détails qui ne plairons pas aux tenants de la santé publique et allons plutôt vers la truculence de l'écriture de Sandra Gordon, qui rend avec une rare élégance la langue orale du Québec, surtout celle des régions. On ne peut pas parler d'un roman avec une intrigue très dense, c'est plutôt à une tranche de vie que l'auteure nous invite, une tranche dans la vie de Lucie, 24 ans, qui ne sait pas très bien où elle en est et noie son mal-être dans l'alcool et la fumée. Et pourtant, tout au long de ce livre, sans le dire vraiment, sans mettre des mots sur ses émotions, elle fera le grand ménage dans sa vie. Pas de grandes révélations, mais d'apitoiements ou de géniale guérison, juste un petit passage vers autre chose, doucement, tranquillement. L'autre personnage important, plus secondaire, c'est Henri Korsakoff, lui aussi alcoolique, qui brûle ses livres après les avoir voler dans les bibliothèques municipales qu'il sillonne comme un chasseur à l'affût. Sauf que lui ne survivra pas. On ne connaît pas les raisons de sa fin, mais on les devine par l'intermédiaire de Lucie. Korsakoff est un étrange personnage difficile à saisir. Tous les autres, Maurice, Sylvie, Pat, Ben sont comme dans la vraie vie, moitié dans l'ombre, moitié dans la lumière, avec chacun leurs secrets, leurs petites faiblesses et leur petites grandeurs. Sans jamais tomber dans le cynisme ou le tragi-comique, on suit simplement un groupe de personnes ordinaires pour un petit moment, sans rien attendre d'autre que le plaisir de suivre leurs aventures.. Ce livre est un petit bijou tranquille qui se déguste lentement comme une bonne bouteille de vin un samedi soir.
Ma note: 4.25/5
Je remercie Socadis pour ce service de presse et plus particulièrement Josée pour la belle découverte!
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