1493 Comment la découverte de l'Amérique a transformé le monde Charles C. Mann Albin Michel 535 pages
Résumé:
Dans son livre précédent, 1491, l'auteur faisait un portrait de l'Amérique d'avant Colomb, des multiples peuples qui la composaient, de la politique, de la science, des techniques agricoles et j'en passe qui parsemaient cet immense continent. Dans cet opus-ci, il s'intéresse à l'après et aux conséquences immenses qu'ont eu les contacts à de nombreux niveaux. Comment les plantes de l'Amérique ont voyagé partout, sortant autant les Chinois du XVIe siècle que le Irlandais du XVIIe de la famine. Comment le caoutchouc a servi de support à la révolution industrielle. Comment l'argent du Potosì a entraîner des bouleversements monétaires autant en Europe qu'en Asie et aussi, comment l'immense brassage génétique qu'a entraîné l'esclavage a transformé le monde entier.
Mon avis:
Idées reçues, attachez vos tuques! Comme avec le premier tome, l'auteur nous amène un peu partout, loin des discours académiques, très près des problèmes concrets issus de l'héritage de l'arrivée de Colomb en Amérique, tout est étant richement documenté (la bibliographie de son ouvrage fait plus de cinquante pages). Ajouter à cela un talent de conteur à mille lieux des ouvrages scientifiques poussiéreux, et vous avez un livre qui est avant tout une aventure, une aventure autant humaine que biologique.
L'auteur défend une thèse, simple, mais redoutablement efficace: du contact avec l'Amérique a émergé un nouveau monde, un monde complètement nouveau, qu'il nomme l'ère de l'Homogénocène: l'ère où toutes les parties de la planète sont reliés les unes aux autres, par des liens complexes, parfois même sans le savoir, mais avec des impacts importants loin de leur lieu de départ. À partir de là, il commence à défiler les exemples, comme un long fil. L'argumentation est extrêmement logique et sort des sentiers battus. Sauf qu'elle est nourrie de tellement d'exemples qu'on ressort du livre, sinon convaincu, du moins, appelé à reconsidérer bien des certitudes.
Comme pour 1491, l'auteur, au lieu d'essayer de tout raconter, opte pour des exemples choisis, les mieux documentés souvent, à partir duquel il monte son argumentation, utilisant ces exemples pour ratisser plus large. Il le dit d'ailleurs dans l'introduction, il a fait des choix, mais ses choix sont pertinents. Ainsi, s'il traite des maladies introduites en Amérique par le contact avec les Européens, il ne traite en profondeur que de la malaria et de la fièvre jaune alors qu'elles ont été beaucoup plus nombreuses. Ce procédé permet de ne garder que les exemples ayant le plus d'impact pour soutenir sa thèse, mais d'un autre côté, elle permet d'éviter le piège de l'érudition trop pointue et garde le texte très accessible. Le texte étant d'ailleurs nourri de références et d'histoires concrètes, on est très impliqué dans celui-ci.
Puisant autant dans les documents historiques, dans les dernières recherches scientifiques que dans ses voyages sur les lieux mêmes des événements, nourris d'anecdotes avec les gens y habitant toujours, l'auteur nous permet de voir les impacts de ce qu'il raconte, entre autre, les immenses impacts écologiques qu'ont entraînés la culture du maïs en Chine ou de la canne à sucre dans les Caraïbes. Le nombre de catastrophe écologique citées dans ce livre est effarant. On dirait que malgré les siècles, l'être humain apprend peu et continue de jouer à l'apprenti sorcier avec la nature. Avec des résultats souvent catastrophiques! Sauf qu'en filigrane se dessine une autre réalité qu'il n'aborde que très peu, mais qui reste présente: désormais, peu importe où sur la planète, les actions des uns ont des impacts partout sur les autres. Ce qui fait réfléchir sur les racines de la crise écologique actuelle.
Si le livre reste un tour de force et un livre à lire, vraiment, je l'ai trouvé un peu moins fascinant que le premier opus. De un, l'auteur pousse une thèse de façon beaucoup plus marquée et c'est un peu agaçant. De l'autre, même tout le talent de conteur de l'auteur ne peuvent rendre certains passages aussi intéressants que d'autres. J'avoue sans problèmes que moi et le système monétaire chinois du XVIe siècle n'avons pas fait bon ménage...
Ce sont de biens minces défauts et je recommande chaudement cette lecture!
Ma note: 4.75/5
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