mercredi 20 février 2019

Déni d'Anna Raymonde Gazaille

Déni  Anna Raymonde Gazaille  Leméac  289 pages


Résumé:
Une adolescente pakistanaise de 15 ans a été retrouvée pendue par son hijab au tremplin d'une piscine de Parc-Extension, le quartier le plus multi-ethnique de Montréal.  Suicide, meurtre, crime d'honneur?  Les pistes seront vite nombreuses, la pression des médias également.  Pour l'inspecteur Paul Morel et son équipe, c'est une incursion dans un monde qui possède ses propres codes, normes et façons de faire qu'ils vont découvrir.

Mon avis:
Divisons-ça en deux, la fleur d'abord et le pot ensuite.

La fleur: Un bon policier dont savoir nous tenir en haleine et nous mettre des fausses pistes dans les pattes et c'est le cas de ce roman.  Ajoutez à ça que l'on plonge dans des cultures qui ne nous sont pas familières, des manières de voir le monde complètement différentes.  Je ne connais pas les arcanes du SPVM, ni celles de la police en général, (je ne lis pas assez de policier pour ça), mais le portrait m'a semblé assez juste.

Maintenant, le pot.

C'est fou ce que la qualité de l'écriture d'un livre peut influencer notre plaisir de lecture.  Et ici, malheureusement, c'est très loin d'être à la hauteur.  Show don't tell qu'y disent.  Malheureusement, le tell l'emporte largement sur le show.  Et ça nuit beaucoup à la fluidité de la lecture.  Je tiquais sans cesse sur des passages.  Il y avait aussi la manie constante de l'auteure de rajouter une phrase ou deux à la fin d'un passage de dialogue décrivant l'action, mais sans rien pour explicitement nous indiquer que cette partie n'était pas dite, mais bien une description.  Ça aussi, ça me faisait tiquer à chaque fois et bon, il y en a partout dans le roman.

Du côté des personnages, tous les policiers sont intéressants, avec leurs propres personnalités et parcours de vie, mais...  on est tellement dans le tell que ça les rend impersonnels et froids.  De fait, les deux personnages les plus efficaces à ce sujet sont Losier et Ling les seuls dans l'équipe qui n'ont pas droit à leur moment «narrateur».  Comme on les regarde d'un point de vue extérieur, l'effet est d'autant plus efficace.

Il y a un petit côté pédagogique au livre, car il veut nous faire entrer dans la réalité des communautés immigrantes, principalement pakistanaises et kurdes, mais si par moment, c'est passionnant, à d'autres, c'est lourd (une note de bas de page pour expliquer ce qu'est un cours 101, sérieusement?).  Encore une fois la manie de l'auteure de trop vouloir nous raconter plutôt que de nous montrer.  La description de la vie des femmes sous le double joug du patriarcat et de l'islam est là pour dénoncer, mais pour qui se tient le moindrement au courant de ce genre de dossier, c'est de la redite à beaucoup d'articles de journaux parus dans les dix dernières années.  Ça sonne plaqué dans la bouche des personnages.

Au final, on se retrouve avec un livre assez page turner, mais qui fera grimacer les amateurs de littérature à cause des nombreux tics d'écritures.  Ça donne un roman inégal, mais qui n'est pas dépourvu de qualité.

Ma note: 3.25/5

1 commentaire:

Éloi a dit…

Je suis pas mal d'accord avec cette critique mais moi, ce qui m'a le plus dérangé, c'est cette vision du quartier qui est de la redite à tout ce qu'on a lu et entendu. Écrire sur un quartier "exotique" comme l'est Parc-Extension est tentant mais risqué si l'auteur(e) n'a pas une expérience intime avec l'endroit. Le cliché guette... L'auteure avoue dans l'avertissement qui termine le livre qu'elle a sciemment noirci le portrait de Parc-Extension pour les besoins de son récit et qu'elle espère que ses habitants ne lui en tiendront pas rigueur. Je crois qu'en faisant ceci, elle s'est éloignée de la réalité pour tomber dans les préjugés et je trouve ça décevant.