lundi 3 août 2020

Fouillé, retourné dans tous les sens

Salut!

J'ai adoré la série Altered Carbon.  Si vous ne l'avez jamais vu, pitchez-vous sur la première saison.  Si je résume très grossièrement l'intrigue: l'idée principale est que le corps n'est plus lié à l'esprit, aux souvenirs, à la mémoire, à la volonté et qu'on peut prendre conserver tout ça et...  les mettre dans un autre corps.  La série s'amuse ensuite à imaginer toutes les possibilité qu'offre une telle technologie (car on parle ici de sf et non de fantastique, les «piles» qui permettent le transfert n'ont rien de magique).  Et si on met le contenu de la pile dans plusieurs corps?  Et si on peut faire des sauvegardes et simplement transférer le contenu de la pile dans un nouveau corps (idéalement cloné dans la série)?  Et si il n'y avait plus de limite à la durée de la vie humaine?  Et si on mettait une femme dans un corps d'homme ou vice-versa?  Et si on oubliait la pile de quelqu'un dans un tiroir pendant trois cent ans?  Et si, et si, et si?

Altered Carbon le fait magnifiquement bien, dans le sens que la série explore en détails toutes les ramifications des possibles, mais surtout leurs implications sur la psychée humaine.  L'histoire a lieu dans un avenir qui sous certains aspects nous semblent cauchemardesques, mais où d'autres semblent intéressants... pour qui en a les moyens.  Et à force d'explorer les et si, elle en dégage des questions existentielles qui en valent la peine et font réfléchir la personne assise devant la télé.  En autant qu'elle ne soit pas déjà endormie devant un xième épisode.

La Sf est la reine des genres qui prend une idée, la regarde, puis se met à essayer, tester, retester, démolir, reconstruire tous les aspects que ce sujet peut comporter.  C'est ce qui la rend fascinante et tellement pertinente. La SF prend une idée, un concept et multiplie les, et si?  Et si l'être humain pouvait voyager partout dans l'espace (Star Trek), si on pouvait créer la vie à partir de la mort (Frankeinstein), comment vivrons-nous avec des robots (Le cycle des robots), pourrait-on les aimer (I.A. Intelligence artificielle)?  Et encore, je ne donne qu'un échantillon extrêmement limité du genre.

Chacune de ces oeuvres a exploré son concept, à sa façon.  Par les réflexions de son personnage principal sur ses actes (Frankeinstein), par de multiples aventures (Star Trek), par une relation porteuse (Intelligence artificielle), en créant des règles du jeu et en s'amusant à essayer de les outrepasser (Le cycle des Robots).  Chacune de ces méthodes est valide.  Et j'en aie sûrement oublié.  Mais l'idée derrière est la même: prendre un concept, le retourner dans tous les sens et se demander, et si je fais ça et ça et ça, qu'est-ce que ça donnerait?  Et faire une histoire avec le résultat de toutes ces réflexions.  

Je crois aussi que c'est l'une des raisons pourquoi certaines oeuvres de SF sont si marquantes, alors que d'autres non.  Star Trek a eu de nombreux successeurs, dans le sens que les émissions de space opera dans son sillage ont été nombreuses.  Le facteur nouveauté n'est pas à négliger, mais si certaines séries sont passées à l'oubli plus vite que d'autres, c'est qu'elles ont été innovantes dans la façon de multiplier les et si.  Ces séries, même située dans un sous-genre proche, exploraient d'autres questions: Babylon 5 parlait de la cohabitation humain extra-terrestre dans une station spatiale (et si ça existait, ce serait quoi?), comme Deep Space Nine, mais celle-ci abordait aussi les séquelles d'une guerre (et si la paix revenait, comment ferait-on pour vivre l'après entre des espèces différentes?).  The Expanse est centrée sur notre propre système solaire (qu'en sera-t-il quand on l'aura exploré et colonisé?).  Arthur C. Clarke a de son côté exploré l'idée de visite de vaisseaux spatiaux venus d'ailleurs dans Rama (et si ça arrivait, on ferait quoi?).  Je pourrais encore faire une longue liste d'oeuvre...

La beauté de la science-fiction c'est que c'est dans sa nature de poser des questions, de tester, d'inventer, mais ayant la spécificité de pousser les concepts à leurs limites.  Quand elle le fait (et elle ne le fait pas tout le temps), les résultats peuvent être incroyables et ouvrir de nouveaux horizons.  Tout ceci en prenant une simple question de départ et en la poussant à ses limites.

@+ Mariane      

3 commentaires:

Gen a dit…

Oui! Et les oeuvres médiocres de SF sont celles qui oublient de considérer tous les aspects de leurs concepts! (Cela dit, c'est la même chose dn fantasy : on dit "et si" et on devrait ensuite bâtir sur les implications)

Gen a dit…

*en fantasy

Prospéryne a dit…

Excellent résumé et je pense que ça s'applique aussi au fantastique. Caractéristique des genres de l'imaginaire au sens large? Sans doute. C'est en quelque sorte un code du genre que de changer une donnée par rapport à la réalité courante (que ce soit magique ou scientifique) et ensuite, d'en explorer les possibles.