lundi 30 mars 2020

Le livre des événements

Salut,

En 2015, après les attentats à Charlie Hebdo, un livre est monté au sommet des meilleures ventes, un livre qui en des circonstances ordinaires serait resté dans les quelques milliers et plus des palmarès.  C'était Le Traité sur la tolérance de Voltaire.  Pourquoi ce livre-là, pourquoi celui-là qui parle de tolérance et pas un des milliers d'autres sur le sujet?  Mystère des réseaux sociaux sans doute, mais quand même, on aurait dit que le besoin de comprendre, le besoin de faire quelque chose de concret a uni les gens et les a poussé vers ce livre.  Quelques mois plus tard après le Bataclan, ça a été Paris est une fête d'Hemingway qui a conquis les coeurs et les pvente.  Après les élections de 2016, une partie des habitants des États-Unis, stupéfiés, se sont massivement mis à lire 1984.

Et aujourd'hui, que lit-on?  La peste d'Albert Camus.  Roman très bien choisi.  Parce que ce roman parle d'une épidémie (peut-être pas d'une pandémie, mais c'est pas loin quand même!).  Parce qu'il parle de la peur qui s'installe lentement.  Que certaines personnes dans le déni commence à réagir quand il y a des morts.  Des médecins qui voient tout arriver.  Bref un roman parfait pour en ce moment.

Je ne sais pas d'où vient cette manie que tout le monde se jette sur un livre en particulier lors de circonstances tragiques ou sortant de l'ordinaire.  J'ai l'impression que les bulles numériques des médias sociaux jouent un énorme rôle, mais pas que.  Comme si, au milieu du chaos et de l'incertitude, la littérature était un refuge.  Parce que ce ne sont pas tant des romans actuels et contemporains qui prennent le haut du pavé, mais des oeuvres écrites il y a des décennies.  Et si les ventes numériques décollent, c'est aussi les ventes papiers qui le font.  Se rattacher à l'objet livre...  Se rattacher à quelque chose de plus grand, qui a vécu avant nous.   Toutes les expériences humaines sont dans les livres, les pires comme les meilleures.  Et je crois que d'aller lire quelqu'un qui l'a déjà vécu il y a longtemps, de savoir qu'ils ont trouvé des solutions, s'en sont sortis, est sûrement une source d'espoir.

Je ne me rappelle pas qu'il y ait eu un livre post-11 septembre 2001.  De un, à l'époque, les outils que nous utilisons aujourd'hui au quotidien, ces fameux réseaux sociaux, n'existaient pas encore pour propager les livres.  De deux, justement, ces réseaux n'existaient pas.  Or, de nos jours, ils nous maintiennent constamment dans un flux, nourri, pour le meilleur et pour le pire avec l'actualité qui peut être angoissante ou étouffante.  Prendre un livre, c'est aussi, quelque part, se retirer du monde, prendre du temps pour soit et simplement quitter le temps court pour s'inscrire dans le temps long.  Un exercice des plus salutaires pour la santé mentale, surtout dans les moments d'angoisse.  Lire n'a jamais cessé de prouver ses innombrables bienfaits, alors si un livre plus à la mode pousse les gens vers la littérature en temps de crise, et bien, tant mieux. 

Bonne lecture tout le monde, peu importe ce que vous lisez!

@+ Mariane

2 commentaires:

Gen a dit…

PlJe me souviens que post 11 septembre, la section "romans" de la bibliothèque de l'Uqam avait été carrément dévalisée. Pas un seul livre rassemnleur, donc, mais le même réflexe de se replier autour d'un livre.

Et il me semble que vois dans le fait de lire des "vieilles" oeuvres une manière de se dire "on a vécu pire et on a survécu".

Prospéryne a dit…

Tsé, j'ai commencé à écrire ce billet jeudi et déjà ce matin en le postant, je me disais: ishhh... c'est presque plus à l'ordre du jour...