lundi 16 mars 2020

Ceci n'est pas un billet sur le coronavirus

Je suis couchée dans mon lit, dans le noir total.  Il y a, juste à côté le fracas épouvantable des catastrophes.  Ça commence chaque fois comme un chuitement, un crissement qui se prolonge, fait un vacarme épouvantable et finit dans une floppée de petits sons de minuscules pierres qui roulent.  Ce ne sont pas des bombes qui tombent à côté de chez moi, mais le bruit est presque identique.  C'est le bruit des arbres au pied duquel j'ai passé toute mon enfance qui s'écrasent les uns après les autres sous le poids de la glace.  J'ai quinze ans, nous sommes en 1998 et c'est le mercredi soir de la pire crise de verglas du vingtième siècle.  Et je suis au coeur de la tempête.  Nous n'avons déjà plus d'électricité, nous ne savons pas quand nous en aurons de nouveau.  Nous ne savons pas de quoi sera fait demain.

Je suis dans mon cours au cégep, j'en sors, je vais voir une de mes professeurs.  Jusqu'à ce moment-là, c'est un mardi normal d'une journée normale.  Ma professeur est une personne très calme, du genre à ne pas s'en faire pour grand chose.  Or, en mettant les pieds dans son bureau, je constate qu'elle est stressée, je le sais en un regard.  C'est elle qui m'annonce qu'à New York, deux avions ont frappés les tours jumelles que j'avais vu moins de deux ans plus tôt se dresser à la pointe sud de l'île de Manhattan.  Je suis sortie de son bureau pour plonger dans les médias, radio, télé, j'ai tout regardé pendant deux jours.  J'ai eu l'impression que le monde avait changé.  Il avait changé.  Nous ne savions pas de quoi serait fait les lendemains.

Ce sont deux moments dont je me rappelle clairement, deux moments où il me semble, tout autour de moi a basculé.  Le monde a changé brutalement.  Et vous savez quoi?  Quelques jours et tout, lentement est rentré dans l'ordre.  J'ai appris à me laver à l'ancienne dans un bain à moitié plein d'eau chaude et non une douche.  J'ai appris à ne pas avoir peur de prendre les transports en commun, même si les menaces d'attentats étaient nombreuses.  Le quotidien a repris le dessus.  C'est puissant le quotidien.  C'est puissant l'habitude.  Quand tout bascule, c'est ce qui nous garde les deux pieds au sol.

C'est ce qui nous pousse à nous lever le matin, à penser si nos factures sont payées, à s'assurer que le quotidien tourne.  C'est une force qui après le choc nous pousse à retrouver une routine, une suite logique d'événement qui nous permet de tenir le coup à long terme.  C'est ce qui va finir par tous nous habituer.  Ce qui était anormal il y a un mois sera devenu normal.  Et on se découvrira de nouvelles routines quotidiennes qui nous aiderons à passer au travers.  Le quotidien viendra reprendre son service.

Là, je suis isolée chez moi, et pour une rare fois, j'haïs passionnément mon célibat.  Il y a plus d'une semaine que je n'ai pas touché un autre être humain.  Même au travail, tout le monde fait attention.  Normalement, j'irais m'entraîner, mais mon école de jiu est fermée.  J'irais voir des amis, mais là, encore, tout le monde fait attention.  Foutue pandémie...

Je me rassure en me disant que j'ai plein de livres à la maison à lire et plus de séries télés que je ne pourrais en regarder dans une vie à voir.  Bref, je ne risque pas de m'ennuyer!

Bonne isolation tout le monde!  La seule chose qui est vraiment en danger si vous suivez toutes les précautions, c'est votre PAL...

@+ Mariane

6 commentaires:

Alain a dit…

Heureusement qu'on a les moyens de rester en contact, même si c'est à distance. Mais c'est là qu'on se rend compte que ça ne comble pas tout.

Bon courage dans les prochaines semaines!

Prospéryne a dit…

De la patience et de l'endurance plus que du courage, je crois que cela prendra!

(C'est moi ou ma dernière phrase sonne comme Yoda?)

Gen a dit…

Je compatis tellement! Oui, les réseaux sociaux, ça aide, mais... misère que c'est dur de pas habiter avec la personne que j'ai envie de serrer contre moi. :'(

Laurianne a dit…

Je me demande aussi comment je vais combler mes 2 prochaines semaines... Des travaux scolaires, ok, mais j'aimerais bien faire autre chose aussi! :')

Prospéryne a dit…

Les 48 premières heures ont été les pires, ça va mieux maintenant, mais heureusement que le catalogue de visage, le chat et le téléphone existent!

Prospéryne a dit…

Si tu manques de livre, j'ai pas mal de trucs que je pourrais te prêter à la maison!