lundi 10 septembre 2018

Tannée des années 60...

Salut!

Quand je regarde les films marquants des dernières années au Québec, il me semble qu'ils ont souvent un point en commun: ils se passent dans les années 60 ou encore dans les années 70.  Comme si ces deux décennies, certes marquantes de l'histoire du Québec contemporain, n'en finissaient plus de nourrir encore projection et idées.   C.R.A.Z.Y. se déroulaient à cette époque.  Sorti cette année, Les rois mongols aussi.  La Passion d'Augustine il y a trois ans également.  Bon an mal an, il y a chaque année un film qui parle des années 60 qui débarque sur les écrans.

Mais ce n'est pas que ça.  C'est l'avalanche de documentaires sur cette période qui reviennent années après année.  2017 a constitué un record par son nombre de cinquantièmes célébrés.  Le moindre événement s'y étant déroulé a droit au tapis rouge pour sa commémoration et les héros de cette époque ont droit aux honneurs quand ils passent l'arme à gauche.  Cela m'avait frappée au moment de la mort de Jean Béliveau.  On aurait dit que les bulletins d'information et le contenu des médias avaient été tapissés à ses couleurs pendant trois jours avec reportages à l'appui et commentaires des animateurs radios à l'avenant.  La couverture médiatique de ce décès avait été intense.  Quelques mois plus tard, un comédien qui a marqué ma jeunesse, Hugo St-Cyr, est mort d'un cancer.  Il y a eu une brève mention dans la chronique culturelle.  Peut-être au bulletin de nouvelles, mais je n'en suis même pas sûre.  La différence de traitement m'a révoltée.

Héros des années 1960, soyez assurés que vous ferez les grands titres.  Certes, votre génération a fait bouger les choses, vous avez été nombreux à en faire des grandes, mais le problème c'est que vous n'êtes pas les seuls.  Combien de films ont été faits sur le référendum de 1980, alors même que le tissu narratif est des plus riches?  Combien sur celui de 1995?  Combien de films sur le verglas?  Ou tout simplement, combien évoquent les décennies 1980 et 1990?  À l'exception notable des films de Riccardo Troggi, les nostalgiques de ces décennies n'ont pas grand chose à se mettre sous la dent.  Et pourtant...

J'ai abordé le sujet avec mes parents.  Ils m'ont répondu quelque chose du genre: «Tu n'as pas connu cette époque-là, ce grand chamboulement.  IL y avait une énergie à l'époque qui était incomparable.  C'est dur à comprendre pour quelqu'un qui ne l'a pas vécu.»  C'est vrai.   Je ne l'ai pas vécu.  J'ai étudié ces années-là en cours d'histoire, mais je n'aie pas vécu la chape de plomb qui a précédé, ni le grand déblocage qu'ils ont constitué.  C'est un mythe pour moi, un mythe porteur, mais comme tous les mythes, cette décennie appartient au passé, à l'histoire, pas au présent.  Et moi je vis au présent.  Je suis une fille des années 80, qui a grandi dans les années 90 et qui a émergé au monde dans les années 2000.

Il s'en est passé des choses.  Autant, que dans les années 60.  D'une manière différente, avec d'autres événements, d'autres personnes, mais il s'en est passé.  Ce ne sont pas des décennies drabes.  Elles sont aussi flamboyantes que les années 60.  Si vous pensez aux vêtements de l'époque, et que vous vous dites, c'est pas comparable!, je vous invite à faire des recherches sur les coupes de cheveux et les épaulettes du début des années 80 ou la mode du fluo dans les années 90...  L'informatique grand public est né dans les années 80, les vidéoclips ont débarqué dans les années 80, l'internet est arrivé dans les années 90, pour ne nommer que ces exemples!  Simplement, on dirait que les cinéastes et les scénaristes sont encore peuplées de gens ayant vécu leur enfance deux décennies avant moi.  Il est un peu normal pour eux de retourner à leurs racines.  Ce ne sont pas les miennes.  Je ne m'y retrouve pas.

Quand j'ai vu le film Dédé à travers les brumes, j'ai eu comme une sorte de révélation.  Je me retrouvais dans ce film.  C'était mon adolescence, ma jeunesse, c'était la musique, la pub, les vêtements, les expression, l'allure, le ton d'une époque.  L'énergie aussi.  C'était, sans doute pour une rare fois, un film québécois dans lequel je me retrouvais.  J'ai mis du temps à mettre la main sur le DVD, mais depuis, je regarde le film au moins une fois par année.

Par la suite, j'ai commencé à remarquer le nombre de livres qui se publiaient sur des artistes ou de politiciens qui ont fait carrière durant les fameuses sixties.  Nommez-les tous, à tour de rôles, ils ont ont pondu leur ouvrage.  Je n'ai rien contre ce fait et j'avoue que bien des personnalités plus jeunes ne méritent pas nécessairement une biographie tout de suite, mais tout de même, le clivage est important.  On dirait que l'on retourne toujours à cette décennie, mais elle est terminée depuis 50 ans...

Il faudrait arrêter de nourrir notre imaginaire collectif majoritairement sur les années 1960.  C'était une période marquante, mais elle est terminée.  Beaucoup d'événements plus récents ont plus d'impacts sur notre vie quotidienne que les décisions prises dans les années 60, mais on dirait que collectivement, nous sommes incapables de s'affranchir de cette décennie.  Mais il faudrait bien le faire un jour, on ne peut pas toujours vivre dans le passé.  Aller plonger dans les décennies qui ont suivi pourraient aussi, collectivement, nous faire comprendre que notre société n'est plus du tout au même point qu'il y a 50 ans et que ce ne devrait plus nécessairement être le seul point de repère culturel.  Je crois sincèrement que sur ce point, les livres et les films peuvent vraiment aider à comprendre et à avancer.  Le discours que l'on fait sur notre passé éclaire souvent la vision que l'on a de notre présent.  Alors arrêtons bon sang de croire que tout été fait avant 1980!

@+! Mariane

5 commentaires:

Gen a dit…

C'est un problème avant tout démographique : tu deviens solides comme créateur vers 30 ans, tu seras solide pour environ 40 ans (après tu seras vieux et on te tassera) et ton public aura souvent ton âge. Et la période qui frappe le plus les gens, c'est leur enfance et adolescence.

Résultat : depuis les années 90 au Québec, on a des oeuvres qui chantent les louanges des années 60, parce que c'était l'enfance des créateurs et de leur public (public qui, en plus, forme la frange la plus nombreuse et riche de la population).

Là, les nouveaux créateurs commencent à s'établir. Ils ont la mi-trentaine et font des films et des livres sur leur enfance, les années 80! (Strangers Things et autres). Le temps que nos enfants soient sur le bord de crier "pitié lâchez-nous avec les années 80 et 90, vous aviez même pas de cellulaire", ce sera à leur tour de prendre le dessus et de nous submerger avec les glorieuses années 2010, cette époque où vous pouviez encore utiliser des sacs de plastique et des pailles. :p

Prospéryne a dit…

Sans doute, sans doute, tu me rassures, le meilleur est devant! Ou peut-être que non, parce que les coupes de cheveux des années 80...

Gen a dit…

Pwahahahahahaha!

myr_heille a dit…

J'allais dire la même chose que Geneviève! C'est notre job de faire ces films-là! ;)

Prospéryne a dit…

Quel dommage qu'on soit pas cinéaste!!!!