Le secret du 16V Natasha Beaulieu Alire 363 pages
Résumé:
Lilka Kaminski a douze ans. Le jour de sa rentrée au secondaire, elle rencontre Vienna. Tout de suite, elle est attirée vers cette jeune fille du même âge qu'elle, mais possédant un magnétisme et une maturité largement au-dessus d'elle, doté en plus d'une fascinante chevelure. Entre elles se nouent une amitié étrange, faite d'un mélange de fascination, d'attirance, de fusion et de domination. Au fil des années, cette amitié ne fera que se renforcer, au point de devenir le point central de la vie de Lilka. Lorsqu'à l'aube de l'âge adulte, Vienna décide de retourner dans sa Hollande natale pour pratiquer son métier de dominatrice, Lilka sent qu'une partie de sa vie la quitte, malgré la naissance de sa fille. Dix ans plus tard une lettre laconique lui annonce la mort de Vienna dans des circonstances troubles. De là un déclic, un réflexe de survie dans sa vie devenue si terne: Lilka quitte famille, mari et enfant pour tenter de comprendre ce qui s'est passé.
Mon avis:
Je place dès le départ ce livre dans la catégorie littérature érotique même s'il a une particularité étonnante: il contient très peu de scènes de sexualité et aucune d'entre elles n'est vraiment explicite. À chaque fois, on s'intéresse moins à ce que les gens font qu'à ce que cela les amène à ressentir, émotionnellement parlant. Malgré tout, il fait tout au long grimper le thermomètre et nous plonge dans une atmosphère d'une sensualité extrême. À couper au couteau je pourrais même dire. La relation entre Vienna et Lilka constitue certes le coeur de l'histoire, mais énormément de points d'intérêts se joigne à celle-ci: la famille polonaise de Lilka, l'intérêt des deux jeunes filles pour la musique de Madonna, le Québec et sa culture populaire au courant des années 1990. Tout est en filigrane de l'amitié Vienna-Lilka, mais c'est au final que l'on verra les fils et que l'on comprendra les liens. L'importance de Madonna, des paroles de ses chansons, de l'influence de l'artiste sur Lilka est bien amené. La chanteuse suit la vie de la jeune fille par petite touche, mais souvent en résonance avec ce qu'elle vit. La famille de Lilka sera très importante dans le récit, même s'ils sont essentiellement des personnages secondaires. Ses trois frères subiront l'influence profonde de Vienna. Celle-ci est mystérieuse, fascinante, intrigante même, mais n'agit pas dans le but de l'être: elle est comme elle est, point. Dominatrice, elle l'est de nature, bien avant d'en faire sa profession. Merci à l'auteure d'ailleurs d'avoir été ici moins dans le voyeurisme de ce métier que dans la relation qui s'installe entre un dominant et une dominé. Clairement, Lilka est une dominée, mais elle aime l'être, elle aime ce que cela lui fait ressentir. Pas de contraintes, plutôt du donnant-donnant. Ça peut être inconfortable de penser cela, mais c'est bien réel. Et bien rendue dans le livre. D'autres petits détails, comme la culture polonaise du père de Lilka, la chaleur de la famille Kaminski versus la distinction et la froideur apparente de celle de Vienna et de son demi-frère Oslo (ils ont leur propre appartement à quoi, dix ans?) et même les pouliches sont importantes dans ce récit. Je crois par contre que je ne pourrais plus jamais en voir une sans penser à ce roman vu leur rôle... Les fascinants cheveux de Vienna occupe à eux seuls une place à part dans le récit. Sans vouloir dévoiler l'intrigue, ils sont disons... particuliers. La façon de les décrire et de décrire le quasi-envoûtement qu'ils exercent sur Lilka est bien fait. Chapeau aussi à l'éditeur de s'être inspiré de la Vénus de Boticelli pour l'image de la couverture. Un choix très pertinent par rapport au sujet du livre. Le rapport au désir de vivre sa vie et de choisir celle-ci, de ne pas avoir peur d'être soi-même au risque de déranger, du conformisme, quitte à oublier qui on est traverse le livre. Aucun jugement, sinon une constatation que l'on fera au travers du personnage de Lilka et de sa redécouverte d'elle-même au moment de son enquête sur la mort de Vienna. Au final, si tout le livre est dans la tonalité réaliste, le livre s'avère dans les derniers moments un fantastique très bien ficelé. On pouvait avoir vu venir, mais pas de cette façon. J'ai trouvé que l'on passait trop vite sur les raisons de la mort de Vienna, surtout que l'une des deux trames narratives du livre se consacre justement à comprendre pourquoi et surtout de quoi elle est morte. L'explication est très mince et manque de clarté, mais c'est à la toute fin seulement du livre et la finale rattrape en partie le tout. Le reste du livre est un vrai bonheur de lecture, bien écrit, bien raconté et qui se dévore avec une grande facilité.
Ma note: 5/5
1 commentaire:
Belle critique!
Pour la Vénus, il faut surtout féliciter l'illustrateur de talent Bernard Duchesne.
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